Intervention de Jean-Paul Fournier

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 19 juillet 2017 à 10h00
Projet de loi autorisant la ratification de l'accord entre la république française et la république portugaise relatif à l'assistance et à la coopération dans le domaine de la sécurité civile et l'approbation de l'accord entre le gouvernement de la république française et le gouvernement du grand-duché de luxembourg relatif à l'assistance et à la coopération dans le domaine de la protection et de la sécurité civiles — Examen du rapport et du texte de la commission

Photo de Jean-Paul FournierJean-Paul Fournier, rapporteur :

Monsieur le président, mes chers collègues, nous examinons ce matin le projet de loi autorisant la ratification des accords signés en 2015 avec le Portugal et le Luxembourg, relatifs à l'assistance et à la coopération dans le domaine de la protection et de la sécurité civiles.

Avant d'exposer les principales dispositions de ces traités, quelques éléments de contexte pour vous présenter les raisons ayant présidé à leur signature.

Le mois dernier, le centre du Portugal a été touché par de violents incendies qui ont causé la mort de 64 personnes et dévasté 54 000 hectares de forêts. Pour faire face à cette catastrophe, le Portugal a sollicité l'assistance de plusieurs pays européens disposant de moyens aériens, dont la France. Un détachement de la Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises, composé de 15 personnes, d'un avion léger de reconnaissance et deux Canadair, a ainsi apporté son aide aux autorités portugaises pendant près d'une semaine. Lors de leur mission, 233 largages ont été effectués par les aéronefs français.

Cette coopération en matière de lutte contre les feux de forêt a été mise en oeuvre à plusieurs reprises depuis le début des années 2000, mais ne s'appuie à ce jour sur aucun fondement juridique. Les ministères de l'intérieur français et portugais ont alors souhaité remédier à cette situation et ont entamé des négociations en 2007 qui ont abouti à la conclusion de cet accord.

S'agissant de nos relations bilatérales avec le Luxembourg, elles sont plus régulières compte tenu de notre frontière commune mais également plus anciennes. Elles reposent en effet sur un accord signé en 1962 et amendé en 1988, dont le champ apparaît aujourd'hui comme trop restreint. Nos deux pays se sont donc entendus sur un nouvel instrument, au champ élargi, et tenant compte des différentes évolutions apportées à notre coopération.

Les stipulations des deux accords que nous examinons aujourd'hui présentent de nombreuses similitudes, et s'inspirent très largement des dernières conventions passées par la France en matière de sécurité civile.

Tout d'abord, ils ont le même objet, à savoir :

- l'assistance mutuelle en cas de catastrophe ou d'accident grave ;

- la coopération en matière de prévision et de prévention des risques naturels et technologiques ;

- l'échange d'informations et d'expertise dans le domaine de la sécurité civile ;

- et enfin la formation des personnels de secours.

Pour tenir compte de sa proximité avec la centrale nucléaire de Cattenom située en Moselle à une vingtaine de kilomètres de sa frontière, le Luxembourg a souhaité élargir le champ de l'accord à la protection et la sauvegarde des personnes, des biens et de l'environnement menacés par une catastrophe naturelle ou technologique majeure. Des modalités d'assistance sont également prévues par l'accord en cas d'accident nucléaire ou de situation d'urgence radiologique ayant des conséquences transfrontalières.

Les traités encadrent les demandes d'assistance en instaurant une procédure claire en la matière. Il est ainsi entendu que chaque pays peut refuser la demande d'assistance qui lui est soumise ou interrompre la mise à disposition de ses moyens en cours de mission.

S'agissant des aspects budgétaires, plusieurs principes sont posés.

Premièrement, la coopération et l'assistance sont mises en oeuvre dans la limite du budget de chaque Partie à l'accord.

Deuxièmement, la formation des personnels et l'échange d'informations et d'expertise sont financés par la Partie qui en établit la demande.

Troisièmement, l'assistance en cas d'accident grave ou de catastrophe est fournie à titre gratuit.

Enfin quatrièmement, les préjudices subis par les secouristes ou leurs équipements ne sont pas pris en charge par la Partie requérante ; en revanche, celle-ci indemnisera les dommages causés par les équipes de secours dans le cadre de leur intervention, à l'exception des actes malveillants sans lien avec la mission.

Les accords créent en outre des commissions mixtes, composées de représentants des ministères de l'intérieur de chaque pays, et chargées de proposer et de mettre en oeuvre les actions de coopération entre les services. Elles peuvent émettre des avis sur les affaires soumises par l'une des Parties et favorisent les échanges d'information et d'expérience dans le cadre de réunions régulières. Sauf exception législative ou réglementaire, les informations obtenues en application de ces accords peuvent être publiées.

Enfin, l'accord avec le Luxembourg se distingue par une stipulation propre à sa situation géographique. Elle autorise le préfet de la zone de défense et de sécurité Est ainsi que les préfets de Moselle et de Meurthe-et-Moselle à conclure avec le ministre de l'intérieur luxembourgeois les arrangements particuliers nécessaires à l'application du traité en zone frontalière. Il s'agirait, par exemple, de préciser les modalités de coordination des centres de gestion des crises à l'occasion d'évènements graves, ou encore de définir les conditions d'intervention des hélicoptères de secours français en territoire luxembourgeois.

Établir des conventions internationales dans le domaine de la sécurité civile présente deux avantages majeurs. Cela permet, d'une part, de donner un cadre juridique solide et incontestable en vue du développement de nos relations bilatérales, en particulier sur les aspects statutaires et financiers. Cela contribue, d'autre part, à sécuriser l'action des équipes de secours et à écarter les risques contentieux en cas de dommages subis ou causés par ces équipes sur les biens et les personnes.

Par conséquent, ces accords sont de nature à pérenniser nos coopérations en garantissant à nos partenaires une lisibilité quant aux règles de sa mise en oeuvre, qui n'ont plus à être fixés avant chaque action de coopération ou demande d'assistance opérationnelle.

Ils permettent enfin de partager des savoir-faire spécifiques et de dégager des synergies par la mutualisation des moyens de secours. La France pourrait ainsi profiter de l'expertise du Portugal en matière d'alerte précoce de tsunamis ou de gestion des catastrophes d'origine sismique - même si notre pays est peu sujet à ce type de phénomènes naturels -, ou encore des compétences luxembourgeoises en matière de communication de crise par liaisons satellites ou d'évacuation médicale aérienne.

En conséquence, pour l'ensemble de ces raisons, je ne peux que recommander l'adoption de ce projet de loi.

À ce jour, seul le Luxembourg a achevé sa procédure de ratification.

Pour ce qui nous concerne, l'examen en séance publique est prévu demain matin, selon la procédure simplifiée, ce à quoi je souscris.

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