Intervention de Christophe Tardieu

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 12 juillet 2017 à 9h00
Chronologie des médias — Ouverture par christophe tardieu secrétaire général du centre national du cinéma et de l'image animée cnc

Christophe Tardieu :

Monsieur Leleux, perdurent encore quelques éléments d'incertitude dans le caractère normatif de la chronologie des médias. En effet, la signature de l'accord de 2009 représente un miracle obtenu sous une amicale pression parlementaire et grâce au grand talent de Véronique Cayla, alors présidente du Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC) au ministère de la Culture et de la Communication. Sur cette base fragile, la situation a évolué et les acteurs ont changé. Il convient donc de moderniser l'accord de 2009. La loi du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine prévoit que l'arrêté d'extension tombe en juillet 2018. Cette disposition constitue une incitation forte à négocier même si, pour certains acteurs, cette perspective semble encore lointaine. Pourtant, le temps dont ils disposent pourrait encore être raccourci si la ministre de la culture décidait la fin de l'arrêté d'extension.

Il est vrai que la directive européenne de 1997 indique que les modalités de la chronologie des médias doivent être fixées par accord interprofessionnel, la Commission européenne considérant que les États, par trop protectionnistes, prennent trop souvent des décisions inadaptées aux pratiques de marché. Néanmoins, le délai de la fenêtre en salles est fixé par la loi. Cette dichotomie peut sembler juridiquement incertaine, raison pour laquelle le CNC réfléchit à la légitimité de cette articulation avec son conseiller juridique.

Je ne peux que constater, avec Sylvie Robert, que si les pertes d'abonnés annoncées par Canal+ sont effectivement importantes, sa stratégie à l'égard du cinéma français demeure peu lisible. Vous comprendrez combien nous sommes inquiets de l'incertitude qui plane sur l'avenir du premier financeur privé du cinéma français. La diminution du chiffre d'affaires de Canal +, qui doit en verser 12,5 % à la création, a d'ores et déjà des conséquences immédiates sur les préfinancements de films. Néanmoins, l'accord signé par la chaîne en mai 2015, s'agissant des clauses de diversité, est valable jusqu'en 2020 et, à ce jour, il est rigoureusement respecté. Canal+ est également confronté à un choix stratégique : la chaîne doit-elle abandonner le hertzien pour être uniquement diffusée en linéaire ? Dans ce cas, ses obligations, notamment consacrer 12,5 % du chiffre d'affaires au cinéma, feront l'objet d'une nouvelle négociation avec le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA). Il va sans dire que si le chiffre d'affaires de Canal+ continuait de s'éroder, les conséquences pour le cinéma en seraient dramatiques.

Vous avez raison, monsieur Percheron, de parler d'exception française : notre modèle est unique tant par le niveau des investissements publics au bénéfice de la création (le CNC dispose par exemple d'un budget annuel de 650 millions d'euros pour soutenir le cinéma et le jeu vidéo) que par les obligations faites au secteur privé. Nous sommes optimistes quant à sa pérennité même si des fragilités demeurent. La France produit de très nombreux films, au point que certains évoquent une crise de la surproduction, les salles accueillent un nombre de spectateurs record, bien supérieur aux chiffres constatés dans les autres pays européens, nos oeuvres sont fréquemment primées dans les plus grands festivals et nos engagements internationaux en coproduction comme en soutien aux pays défavorisés grâce à l'aide aux cinémas du monde, ne se démentent pas. Frédérique Bredin, présidente du CNC, a d'ailleurs décidé de mener une politique active de soutien à la francophonie qui a conduit le centre à signer des accords de partenariat avec la Tunisie et le Maroc et à créer, avec ses homologues suisse, belge, canadien et luxembourgeois, un fonds de soutien destiné au cinéma d'Afrique subsaharienne.

Madame la présidente, vous avez très justement pointé du doigt une faiblesse de notre système : il faut que nous prenions mieux en compte l'avis des spectateurs. Nous réfléchissons à cet égard à ce que les commissions du CNC qui attribuent les aides sélectives intègrent des représentants des spectateurs. Nous développons également des enquêtes qualitatives qui toutes montrent que les Français ont une excellente image de leurs salles de cinéma. Il est vrai que notre parc est unique en Europe en nombre comme en qualité.

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