Intervention de Nicolas Mazars

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 12 juillet 2017 à 9h00
Chronologie des médias — Audition conjointe de représentants des producteurs créateurs exploitants et distributeurs

Nicolas Mazars, responsable juridique de l'audiovisuel et de l'action professionnelle de la Société civile des auteurs multimédias (SCAM) :

Merci pour ce préalable au sujet des opérateurs vertueux, qui soulève le problème de la rémunération des auteurs. À partir du moment où l'on bénéficie d'une fenêtre privilégiée, on se doit parallèlement d'être redevable vis-à-vis de certaines obligations légales, dont le droit d'auteur.

S'agissant de la chronologie des médias, deux problématiques sont plus particulièrement frappantes au regard de l'accord de 2009. La première, c'est sa rigidité. Cette règle s'applique en effet de la même façon à un blockbuster comme à un documentaire qui sort dans dix salles, financé grâce à moins d'un million d'euros, alors que ces films n'ont pas la même vie, pas la même économie ni le même public. Le document possède en effet certaines particularités. La chronologie des médias aurait donc bien besoin d'être adaptée, preuve en est que toutes les télévisions payantes n'investissent pas dans le documentaire, Canal+ en tête.

Or, s'il n'existe pas d'achat de droits sur la première fenêtre, de la sortie en salle à la diffusion gratuite, le film n'est pas exposé - sauf en VàD, mais les films modestes ne sont pas forcément en « tête de gondole » des propositions. En règle générale, ce sont toujours les mêmes films qui sont proposés en première page, et rarement les plus modestes. Il existe donc des « trous dans la raquette » par désintérêt pour certaines fenêtres. Le glissement des fenêtres aiderait à resserrer davantage les liens de l'exploitation, permettrait une exploitation plus suivie des oeuvres afin que ces films soit exposés au public et mieux financés de façon permanente. Les télévisions gratuites hésitent à financer un film qui ne viendra pas sur leur antenne avant deux ans. Passé ce délai, les médias s'en sont désintéressés, sans parler du piratage, que les télévisions gratuites sont les premières à subir, beaucoup de spectateurs ayant déjà vu le film avant sa diffusion à la télévision.

En second lieu, il est frappant de constater l'inadéquation de la chronologie des médias avec l'évolution technologique. En matière de disponibilité des oeuvres, le gel des droits de la VàD constitue une pratique récurrente. Dans l'une de ses dernières propositions, le CNC évoquait le dégel de la VàD : c'est un pas indispensable. Ceci est en effet dommageable pour ceux qui n'ont pas envie de s'abonner à Canal+ mais qui désirent voir un film en particulier. La VàD n'ayant pas pris le relais du DVD, ce gel pourrait constituer une première piste d'évolution.

Face aux nouveaux modèles économiques que l'on voit poindre, il est difficile d'y voir clair, et la chronologie des médias est si rigide, qu'on ne peut rien expérimenter.

Il n'existe par exemple aujourd'hui aucune possibilité de Day and Date ou de géolocalisation dans des régions où un film n'est pas accessible en salle. On pourrait promouvoir certains petits films, et mettre une fenêtre de VàD en amont de la sortie en salle pour créer un effet de bouche-à-oreille. Il n'est toutefois pas possible de l'expérimenter en l'état.

Or, si l'on veut y voir clair demain, l'évolution de la chronologie des médias me semble devoir passer par l'expérimentation, afin de déterminer ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas. C'est une question de bon sens.

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