Intervention de Philippe Bonnecarrere

Commission des affaires européennes — Réunion du 27 juillet 2017 à 8h35
Politique régionale — Perspectives de la politique de cohésion : communication de m.philippe bonnecarrère

Photo de Philippe BonnecarrerePhilippe Bonnecarrere :

Je ne vous présenterai ici que des éléments, s'agissant d'une étape dans le travail que vous m'avez confié sur la politique de cohésion.

Cette politique est un outil essentiel de l'action économique et sociale européenne. Sur la période 2014-2020, elle a représenté 372 milliards d'euros - soit 500 milliards avec les cofinancements nationaux.

La France, sur la période, reçoit 15,5 milliards d'euros - hors fonds agricole (FEADER) : 3,9 milliards, soit 27 %, pour nos cinq régions ultrapériphériques ; 4,3 milliards, soit 30 %, pour les dix régions dites en transition ; 6,3 milliards, soit 43 %, pour les douze régions les plus développées. Cette répartition a de quoi surprendre puisqu'elle attribue, en valeur absolue, davantage aux plus riches ; cependant, il faut rapporter ces sommes au nombre d'habitants : chacun, sur la période, bénéficie de 1792 euros dans les régions ultrapériphériques, de 175 euros dans les régions en transition et de 93 euros dans les régions les plus développées.

L'ensemble est donc important et correspond, en moyenne, au montant d'investissement dans la plupart de nos communes. Reste la question de savoir si ces crédits doivent être maintenus pour les régions dites les plus développées, concernées cependant par des disparités internes et par la question de la ruralité.

Sur les « retours » de ces investissements, ensuite, deux chiffres peuvent nourrir de la perplexité : pour 17 euros de contribution aux fonds, la France en récupère 5, nous sommes un pays nettement contributeur ; ensuite, selon une étude du gouvernement polonais, pour 100 euros d'investissements de cohésion réalisés en Pologne, Hongrie, République tchèque et Slovaquie, le retour économique direct et indirect est seulement de 7,50 euros pour la France, mais de 40 euros en Allemagne.

La politique de cohésion résulte d'un partenariat effectif entre l'Union européenne, chaque État membre et ses régions, c'est de bonne méthode ; elle est l'une des seules politique qui soit tangible, visible pour nos concitoyens - chacun peut voir la contribution européenne aux projets locaux, c'est important.

Même constat favorable sur la finalité même de la politique de cohésion : la convergence et la solidarité régionale ; les fonds encouragent aussi ce qu'on appelle la « stratégie de spécialisation intelligente », nous en avons besoin pour atténuer certains effets de la mondialisation.

Deuxième volet de mon propos : les défis de la politique de cohésion - ils sont nombreux et importants.

Celui des ressources budgétaires en premier lieu, que nous avons également vu pour la PAC : le Brexit privera l'Union de 10 milliards nets d'euros annuels, et les trois nouvelles ambitions politiques de défense, de sécurité et de contrôle des migrations demandent 20 milliards supplémentaires, après 2020, l'ensemble représentant 20 % du budget européen - il faudra nécessairement faire des arbitrages. Vous a été distribué le tableau des cinq scénarios budgétaires envisagés par la Commission, dont quatre passent par la réduction des ressources dédiées à la politique de cohésion.

Deuxième défi à relever, celui de l'adaptation aux exigences longtemps ignorées de flexibilité, de simplification et de cohérence.

La Commission européenne présentera à l'automne ses propositions pour la politique de cohésion « post 2020 ». Le Sénat doit jouer son rôle dans ce débat, l'enjeu de cohésion territoriale y est très important. Des questions, Monsieur le Président : parviendrons-nous à une position commune sur les arbitrages entre les grandes politiques européennes, au premier chef la politique de cohésion et la PAC ? Quelle hiérarchie de nos priorités ? Quelles propositions sur les autres défis, en particulier celui de la simplification ?

Je crois que nous devons faire mûrir notre hiérarchie des priorités et définir, avec nos collègues députés, la façon dont nous ferons le mieux entendre la voix parlementaire. Je dois vous avouer mon agacement devant le très grand nombre d'associations d'élus, de régions, qui viennent exprimer directement à Bruxelles, au nom de la France, leur propre position... Ce n'est pas la meilleure façon d'organiser l'expression de la France à Bruxelles, il y a là matière à rationaliser.

Les délais de versement des fonds structurels, enfin, restent bien trop importants. Nous connaissons tous des cas où les structures ont rencontré les plus grands problèmes de trésorerie parce qu'il fallait parfois deux ans pour recevoir les subventions européennes. Nous n'avons certes pas les pouvoirs de contrôle de la commission des finances, Monsieur le Président, mais je me demande si nous ne pourrions pas auditionner des présidents de région pour voir ce qu'il en est précisément.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion