Intervention de Anne-Yvonne Le Dain

Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques — Réunion du 15 novembre 2016 : 1ère réunion
Présentation par mme geneviève fioraso députée ancienne ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche de son rapport au premier ministre intitulé « open space : l'ouverture comme réponse aux défis de la filière spatiale »

Anne-Yvonne Le Dain, députée :

Tout d'abord, je vous remercie pour ce document, qui est remarquablement agréable à lire. J'ai trois observations.

La première, qui me paraît être très française avant d'être européenne, c'est qu'on a souvent plusieurs groupes industriels compétents dans le même domaine. C'est vrai dans le domaine du spatial, de l'eau, du traitement des déchets. Ces groupes sont en compétition sur les appels d'offres des marchés étrangers.

Dans votre rapport, vous dites d'une manière très juste que la puissance publique se refuse à jouer un rôle d'arbitre et que paradoxalement, quand elle-même lance les appels d'offres, elle tente de trouver des compromis qui peuvent être moins pertinents que les solutions de chacune des entreprises concernées. Donc on a une vraie question industrielle en France concernant ces fameuses majors (grandes compagnies).

Une question subsidiaire à mon observation est : ne sont-elles pas toutes un peu trop dirigées par des ingénieurs des grands corps de l'État qui se sont connus à l'ENA ou à Polytechnique ? Je pense à la direction générale de l'armement (DGA), aux Mines... Il y a peut-être aussi, parfois, une compétition personnelle.

Cela met quand même en péril, et c'est ma deuxième observation, les sous-traitants qui peuvent être français, puisque comme vous l'avez souligné, il y a beaucoup de talents dans ce pays qui parfois créent des jeunes pousses (start-up), susceptibles de devenir des PME puis des ETI, mais restant à cette taille intermédiaire en raison de cette chape planant au-dessus d'elles.

Donc se pose une question : comment se fait-il qu'aux États-Unis, les petites entreprises arrivent à grandir, contrairement à ce qui se passe en France ? Je ne suis pas sûre que ce soit un problème de culture. En France, les jeunes, plein d'énergie, finissent, à 45 ans, par rentrer dans le rang. Avec ces grandes entreprises française, issues de la grande époque de la constitution, dans les années 1960, des grands corps de l'État et de la grande industrie française (Aérospatiale, Airbus, etc.), est-ce que nous ne sommes pas en train de nous handicaper nous-mêmes dans nos modes de gouvernance ?

Ensuite, n'y a-t-il pas également des effets de mode ? Concernant la question agricole que vous avez évoquée, je connais à Montpellier un certain nombre de jeunes pousses dans le domaine spatial et dans le domaine de l'informatique numérisée, y compris de la conduite de culture, qui ont dix ou douze ans et qui marchent très bien mais qui, à leurs débuts, étaient complètement ignorées et qui se sont débrouillées toutes seules, y compris dans le domaine de la vigne.

La question, c'est donc : pourquoi ne décolle-t-on pas malgré tous ces succès ? Pourrait-on éviter de redécouvrir l'eau chaude alors qu'on invente le monde !

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