Je félicite les rapporteurs spéciaux de nous avoir éclairés sur ce sujet. J'avais en mémoire que l'amendement dont nous discutons, d'origine parlementaire, avait été adopté en séance contre l'avis du Gouvernement. On comprend d'ailleurs son opposition : sans simulation ni évaluation des risques depuis démontrés, son adoption n'était pas raisonnable.
J'ai en revanche du mal à souscrire aux conclusions des rapporteurs spéciaux, hormis leur recommandation de report d'un an.
Un exemple pour appuyer mon propos. La métropole du Grand Paris a un budget de 3,5 milliards d'euros. Quand elle en a fini des redistributions, il lui reste 27 millions d'euros, pour 7 millions d'habitants. Autant dire : assez pour organiser le concours des apiculteurs et coller des vignettes sur les voitures non polluantes, mais pas pour aider les communes à construire des logements !
Avec ce qui a été adopté à l'Assemblée nationale, la métropole perdrait 138 millions d'euros : elle n'équilibrerait donc plus son budget.
Cela étant, je m'inquiète des propositions formulées dans ce rapport. Nous nous sommes battus, au Sénat, pour garder le lien entre CVAE et territoire. Vous proposez de le modifier pour faire de la CVAE un nouvel outil de péréquation à l'échelle nationale. Or le résultat serait le même que celui obtenu avec la tentative de réforme de la dotation globale de fonctionnement (DGF). J'avais alors soutenu que réformer la DGF sans prendre en compte toutes les autres dotations de péréquation - dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale (DSU), FPIC, notamment - était condamné à l'échec, ce qui a été démontré par le groupe de travail monté par notre commission.
Même chose ici : vous nous proposez une réforme de la CVAE alors qu'on nous annonce une réforme de la taxe d'habitation ! Remettons tout sur la table - impôts, DGF, péréquation - au lieu de procéder à des réformes isolées, faites sans appréciation globale des effets sur les collectivités.
De grâce, n'allez pas chercher dans la répartition de la CVAE ce que vous ne trouvez pas dans le FPIC, ce n'est pas possible ! Si les élus veulent des impôts territorialisés, et je pense qu'il en faut, ils doivent aussi accepter le risque de leur variation. Le risque de voir disparaître une entreprise de son territoire existait du temps de la taxe professionnelle, il existe toujours.
Le Gouvernement vient de se rendre compte que la réforme de la taxe d'habitation va poser bien des difficultés ; c'est l'occasion de tout remettre à plat.