Intervention de Chantal Jouanno

Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes — Réunion du 20 juillet 2017 : 1ère réunion
Audition de Mme Marlène Schiappa secrétaire d'état auprès du premier ministre chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes

Photo de Chantal JouannoChantal Jouanno, présidente :

Mes chers collègues, nous avons le plaisir d'accueillir ce matin Marlène Schiappa, secrétaire d'État auprès du Premier ministre chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes, que je remercie pour sa présence. Nous lui adressons toutes nos félicitations et nos encouragements pour la mission qui l'attend. Elle pourra compter sur notre soutien pour l'aider dans son action.

Je précise que notre réunion fait l'objet d'une captation vidéo.

Madame la ministre, cette prise de contact est tout à fait bienvenue avant la nouvelle législature qui s'ouvrira début octobre 2017, après le renouvellement sénatorial du 24 septembre, et j'imagine que vous reviendrez rencontrer la nouvelle délégation.

Nous souhaiterions que vous veniez nous exposer au moins une fois par an vos priorités et chantiers à venir, notamment dans le cadre du rendez-vous budgétaire annuel, qui est toujours un temps fort de nos activités. Nous voudrions aussi pouvoir vous rencontrer à chaque fois que l'actualité de votre ministère - ou d'autres ministères - touchera l'évolution des droits des femmes ou tous les sujets qui leur sont connexes. Nous espérons également pouvoir compter sur votre mobilisation à chaque fois que des textes législatifs seront susceptibles d'affecter les droits des femmes.

Enfin, nous attachons une grande importance à votre présence, dans le cadre des débats en séance publique que nous organisons sur des rapports emblématiques de la délégation, pour réagir à nos propositions.

En 2016, nous avons eu ainsi l'occasion de tenir deux débats dans l'hémicycle, en présence de la ministre des Droits des femmes : l'un sur les femmes victimes de la traite des êtres humains, au mois de mai, l'autre sur les violences conjugales, au mois de novembre, deux sujets qui tiennent à coeur de nos sénatrices et sénateurs.

Je vous annonce que nous ambitionnons d'ores et déjà d'organiser à la rentrée un tel débat sur le rapport Femmes et agriculture : pour l'égalité dans les territoires1(*), le tout dernier rapport adopté par la délégation. Il reste encore à caler la date de ce débat public, ce qui ne sera pas des plus simples entre les élections sénatoriales de septembre prochain et l'installation de la nouvelle délégation...

Au regard des attentes de la délégation, il me paraît important de vous présenter rapidement ses travaux et son bilan au cours des trois dernières années (2014-2017), mais aussi l'esprit dans lequel nous travaillons, même si nous avons déjà eu l'occasion, lors d'une précédente rencontre, d'échanger sur les orientations de la délégation.

Au cours de la période 2014-2017, nous avons mené trois types de travaux.

En premier lieu, des activités événementielles, notamment à l'occasion du 8 mars, mais aussi un colloque annuel portant sur des thèmes variés : « Femmes citoyennes » en 2015, organisé à l'occasion de la célébration du 70ème anniversaire du premier vote des femmes ; « Associations : les femmes s'engagent ! » en 2016, destiné à rendre hommage à l'engagement associatif des femmes ; « Être agricultrice en 2017 », un thème qui parle particulièrement au Sénat, en tant qu'assemblée représentative des territoires. Organisé à l'occasion du Salon international de l'agriculture, ce colloque a abordé trois thématiques : les défis opposés aux agricultrices, les innovations qu'elles portent dans le domaine agricole et leurs engagements politique, associatif et syndical.

Je voudrais mentionner aussi, parmi les événements que nous avons organisés, le récent hommage à notre ancien collègue Lucien Neuwirth, dans le cadre de la commémoration (par anticipation) de l'adoption de la loi du 28 décembre 1967 relative à la régulation des naissances2(*). Plusieurs sénateurs et sénatrices ont participé à cet hommage, aux côtés de la présidente du Planning familial et de Laurence Rossignol, alors ministre des familles, de l'enfance et des droits des femmes. La cérémonie a donné lieu à la publication d'un recueil de tous les discours prononcés à cette occasion.

Le soutien sans concession des droits sexuels et reproductifs est une préoccupation constante de la délégation. La libre disposition du corps des femmes est un débat récurrent et il est important de ne jamais baisser la garde sur ces sujets : on ne peut pas dire qu'il y ait forcément une évolution naturelle vers plus de droits des femmes. On peut en effet observer des tentatives de retour en arrière, dans les discours ou dans les faits, dans certains pays.

En second lieu, la délégation a publié 12 rapports d'information au cours de la période écoulée, portant sur des thèmes d'actualité ou sur des thèmes de fond récurrents intimement liés aux droits des femmes dans leurs différents aspects. Le temps étant compté ce matin, je n'en citerai que deux, qui me paraissent représentatifs de l'esprit dans lequel nous travaillons.

Le rapport Des femmes engagées au service de la défense de notre pays3(*), tout d'abord, qui rend compte d'une rencontre passionnante avec des femmes militaires, ouverte par le ministre de la Défense, Jean-Yves le Drian. En effet, à l'occasion du 8 mars 2015, la délégation a souhaité mettre à l'honneur, conjointement avec le ministre de la Défense, les femmes militaires et les accueillir, toutes armées et générations confondues, pour leur permettre de témoigner devant nous de leur vocation.

Nous avons valorisé non seulement les femmes militaires, avec toutes les difficultés qu'elles peuvent rencontrer, mais aussi la politique du ministère de la Défense, qui mène une action assez engagée dans ce domaine, et nous avons voulu que ce rapport soit porté par l'ensemble des groupes politiques. Il a ainsi été co-signé par une co-rapporteure par groupe politique représenté au Sénat ; c'est d'ailleurs une « marque de fabrique » des travaux de la délégation de faire en sorte que l'ensemble des rapports ou des prises de position engagent les membres de la délégation, par-delà leurs convictions politiques. Notre objectif est de trouver des points de consensus et de compromis autour des droits des femmes. Le cadre institutionnel que constituent les délégations le permet peut-être plus facilement que les commissions législatives, où les débats sont plus politisés.

J'évoquerai aussi le rapport L'égalité entre hommes et femmes pour la justice climatique4(*), qui s'inscrivait dans les travaux menés par le Sénat dans le cadre de la COP 21. À cette occasion, la délégation a adopté, ainsi qu'elle y avait été invitée, une contribution à la résolution du Sénat qui, en application de l'article 34-1 de la Constitution, visait à affirmer le rôle déterminant des territoires pour la réussite d'un accord mondial ambitieux pour le climat. Cette contribution de la délégation, prise en compte dans le texte de la résolution adoptée par le Sénat, mettait en évidence le fait que les femmes sont plus exposées aux conséquences du changement climatique du fait de leur plus grande pauvreté et de leur situation d'exclusion, mais aussi qu'elles pouvaient être les premières porteuses de solutions par leur rôle dans l'agriculture et la gestion de l'eau. Dans cette logique, la résolution du Sénat formait le voeu que l'Accord de Paris reconnaisse l'égalité entre femmes et hommes comme une dimension fondamentale de la lutte contre les conséquences des changements climatiques et associe davantage les femmes aux négociations climatiques internationales.

J'en viens maintenant à l'activité législative de la délégation, dont je citerai trois initiatives représentatives de notre mode de travail.

- Des membres de la délégation ont été à l'origine de l'article 87 de la loi de modernisation de notre système de santé5(*), introduit en première lecture au Sénat pour prévoir dans le code du travail un régime d'autorisation d'absence pour les salariées engagées dans un parcours de procréation médicale assistée (PMA). Ce parcours est souvent long et difficile et la délégation, par la recommandation n° 17 du rapport Femmes et santé : les enjeux d'aujourd'hui6(*), dont les co-rapporteures étaient Françoise Laborde et Annick Billon, a souhaité que le code du travail prenne en compte les contraintes liées, pour les femmes concernées, à la difficulté de concilier leur travail avec des rendez-vous médicaux souvent très éloignés de leur domicile et de leur activité professionnelle.

- Des membres de la délégation ont également été à l'origine de l'introduction de l'interdiction de l'agissement sexiste, dans le code du travail et dans le statut des fonctionnaires. La création, dans le code du travail, de l'article L. 1142-2-1 définissant l'agissement sexiste est en effet due à trois initiatives conjointes de membres de la délégation dans le cadre de la loi dite Rebsamen7(*). De même, deux amendements identiques de membres de la délégation ont par la suite permis d'aligner le statut des fonctionnaires sur le code du travail en ce domaine8(*). Ces dispositions sont extrêmement importantes, mais il y a encore du chemin et l'on pourrait sans doute en élargir le champ d'application.

- Enfin, plusieurs sénateurs issus de tous les groupes, et pour la plupart membres de la délégation, ont co-signé une proposition de loi constitutionnelle déposée le 8 mars 2017. Ce texte vise à inscrire l'égalité entre les femmes et les hommes dans la Constitution, en modifiant le premier alinéa de son article premier. C'est à l'occasion de notre rapport sur le thème « femmes et laïcité » que nous nous sommes rendu compte que ce n'était pas le cas aujourd'hui. Cela paraît incroyable, puisque dans cet article premier il est inscrit que : « La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion ». Il nous semble important de rajouter la mention explicite « sans distinction de sexe », pour inscrire clairement le principe d'égalité entre les femmes et les hommes dans notre loi fondamentale de manière plus satisfaisante que la rédaction du préambule de 19469(*).

Voilà, madame la ministre, une présentation sans doute trop rapide de nos travaux. On aurait pu vous en dire beaucoup plus. Je n'ai pas cité les noms des membres de la délégation qui assistent à cette réunion. Je voudrais avoir un mot pour Brigitte Gonthier-Maurin, ma prédécesseure, particulièrement assidue à la délégation. Je voudrais aussi saluer Laurence Rossignol, qui vous a précédée, qui revient parmi nous ce matin.

Mes chers collègues, avant de céder la parole à madame la ministre, je vous propose de procéder à l'adoption du rapport présentant le bilan de l'activité de la délégation en 2014-2017, dont une version provisoire figure dans vos dossiers. Il me semble qu'il n'y a pas d'opposition ? Je n'en vois pas : le rapport est donc adopté.

Madame la ministre, je vous remercie à nouveau d'avoir accepté notre invitation et je vous laisse sans plus tarder la parole. À l'issue de votre présentation, les membres de la délégation poseront des questions ou feront part de leurs réactions.

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