Intervention de Jean-Paul Bodin

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 11 octobre 2017 à 9h45
Projet de loi de finances pour 2018 — Audition de M. Jean-Paul Bodin secrétaire général pour l'administration du ministère des armées

Jean-Paul Bodin, secrétaire général pour l'administration du ministère des Armées :

La directive « temps de travail » est en effet un sujet qui nous préoccupe. J'ai travaillé ce matin même avec la direction des affaires juridiques et la direction des ressources humaines sur ce sujet. Il existe, pour l'heure, deux orientations possibles. L'une consisterait à interroger la Commission européenne sur l'applicabilité de la directive aux emplois militaires ou liés à la sécurité. C'est une démarche éminemment politique, qui dépasse le ministère et revient au gouvernement. Il nous appartient donc, en interne, de travailler sur les conditions de transposition de cette directive dans le droit national. Nous pouvons nous appuyer sur les expériences étrangères, notamment celle de l'Allemagne, qui applique la directive, y compris au sein de la brigade franco-allemande, ce qui nous fournit des indications sur ce qu'il faut absolument éviter pour ne pas se retrouver dans des situations extrêmement difficiles. Nous sommes en train d'inventorier les activités liées aux opérations, de toute évidence exclues du champ de la directive, et celles d'une zone plus difficile à cerner, entre l'activité administrative de gestion quotidienne et ces activités opérationnelles.

Nous faisons une lecture aussi exhaustive que possible de la directive, pour essayer de trouver l'ensemble des éléments qui peuvent nous permettre pour les activités les plus importantes en volume et les plus sensibles, de nous exonérer. Le chantier est ouvert et nous sommes appelés, à la demande de la ministre, à y travailler durant le trimestre à venir avant d'entrer dans une phase de discussion, tant avec nos partenaires européens qu'avec les structures représentant le personnel militaire, et notamment le Conseil supérieur de la fonction militaire, le CSFM, et le Conseil de la fonction militaire, le CFM. On sait que lorsque la directive est appliquée, comme cela est le cas chez nos voisins allemands, elle pose de réelles difficultés, mais on se rend compte aussi que le texte comporte un certain nombre de possibilités d'aménagement.

J'ajoute, cela étant posé, que le sujet n'est pas simple politiquement, puisque cette directive de 2003 a été prise par les autorités européennes à l'initiative de la France. Il est donc un peu compliqué, quelques années plus tard, d'aller dire que nous n'en voulons pas. Et je ne suis pas certain que le ministère des Armées puisse tenir une position indépendante du champ interministériel.

Vous m'interrogez sur les écarts de rémunération. Le Haut comité d'évaluation de la condition militaire suit très attentivement cette question, et a remis plusieurs rapports qui ont été pris en compte dans les décisions importantes intervenues ces deux dernières années en termes de rémunération indiciaire ou d'évolution catégorielle. On ne peut donc parler de décrochage, quand un mouvement de rattrapage a été entrepris. Il faut y rester attentif, et veiller aux catégories qui ont le plus de difficultés financières et notamment les militaires du rang. Il faut éviter, par exemple, lorsque le salaire minimum évolue, un décrochage de leur rémunération. Il faut s'assurer que les dispositions visant à caler les choses fonctionnent. C'est l'objet de discussions toujours âpres avec Bercy, mais il reste que des dispositions concrètes ont été prises, qui seront poursuivies en 2018.

Sur le syndrome post-traumatique, j'ai entendu comme vous ce qui a pu être dit récemment. C'est un sujet que le commandement et les ministres ont pris à bras le corps. M. Le Drian a vraiment tenu, durant cinq ans, un langage de vérité, et le ministère a conscience de la nécessité d'être plus clair, plus direct que nous ne l'étions dans le passé. Des efforts très importants ont été entrepris. Les équipes de médecins militaires sont parfaitement au point sur ces sujets. Notre expertise nous a d'ailleurs permis d'apporter une aide précieuse, lors des attentats, aux victimes d'actes de terrorisme. On peut adresser des critiques au ministère, mais s'il y a un sujet qui a été pris en mains, c'est bien celui-là. Lorsque nous avons travaillé, récemment, et notamment sous l'autorité de M. Todeschini, pour élaborer un plan d'évolution de l'INI, l'Institut national des Invalides, nous avons inscrit l'établissement dans un parcours qui part des hôpitaux militaires, chargés de prendre en charge les patients durant la phase aiguë et va, dans une phase ultérieure, jusqu'à une prise en charge de plus longue durée. C'est ainsi que sera mise en place, à l'INI, une capacité d'accueil à cette fin. Je n'ignore pas qu'une personne s'est beaucoup exprimée publiquement sur le sujet. Je puis vous assurer que son dossier de demande de pension est en cours de traitement : l'expertise médicale, qui réclame du temps, a été récemment consolidée et ce dossier sera traité dans des délais tout à fait acceptables. C'est là un mauvais procès sur un sujet qui a été pris en main, à la demande des ministres, par le commandement et les services de santé, avec beaucoup d'efficacité.

J'en arrive aux cessions parisiennes, sujet important eu égard aux sommes en jeu. Après Bellechasse, la caserne de la Pépinière et Saint-Thomas d'Aquin, nous avons à présent à céder l'îlot Saint-Germain et le Val-de-Grâce. Pour l'îlot Saint-Germain, le Premier ministre a confirmé, le 11 septembre, la décision prise par son prédécesseur de cession de l'ilot central et de l'immeuble qui borde la rue Saint-Dominique pour réaliser des logements sociaux. Cette cession entraîne une décote très importante sur la valeur de cet immeuble. Nous avons eu des discussions assez tendues sur le sujet, puisque ce bien aurait pu être vendu pour un peu plus de 80 millions d'euros et qu'il ne le sera, in fine, que pour 29 millions, sur lesquels le ministère s'engage à payer des dépenses de désamiantage, pour 2 millions. L'idée d'obtenir des logements en contrepartie a fait l'objet de discussions serrées, et nous avons obtenu, sur le contingent à disposition du préfet et sur celui de la Ville, que 50 logements soient réservés au personnel militaire. Nous avons utilisé, pour la première fois, une disposition de la loi Duflot qui ouvre cette possibilité d'ouvrir de telles discussions. Nous ne manquerons pas d'y recourir à nouveau.

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