Intervention de Jacques Bigot

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 18 octobre 2017 à 10h05
Proposition de loi d'orientation et de programmation pour le redressement de la justice — Proposition de loi organique pour le redressement de la justice - examen du rapport et des textes de la commission

Photo de Jacques BigotJacques Bigot, rapporteur :

Le rapport de notre mission d'information est en effet très évocateur, puisque ses 127 propositions abordent de nombreuses questions touchant à l'organisation de la justice. Si c'est bien la question du financement qui préside à l'esprit de ce texte, il reste que ce renforcement des moyens de la justice ne saurait se passer d'une organisation nouvelle, plus efficiente - ce qui ne relève pas, pour l'essentiel, du législateur, et pas même, parfois, du pouvoir réglementaire...

La proposition de loi organique vise, principalement, à stabiliser la nomination des magistrats. Le fait est que dans certaines juridictions, les magistrats aspirent rapidement à une autre affectation, pour des raisons d'ordre géographique ou tenant à la charge de travail. Cela est vrai tant à Vesoul qu'à Bobigny, pour ne citer que ces exemples. Le texte prévoit donc que les magistrats resteront trois ans au moins dans leur affectation, quatre dans les fonctions spécialisées, avec en parallèle une durée maximale d'affectation de dix ans dans la même juridiction, tout en laissant une indispensable souplesse au Conseil supérieur de la magistrature. Il nous paraît important de l'affirmer dans la loi.

La proposition de loi ordinaire traite bien de questions d'organisation - son chapitre II est intitulé « Moderniser le service public de la justice en innovant et en maîtrisant la révolution numérique » -, mais on sait que l'essentiel de cette révolution passera par une évolution des modes d'organisation interne, qui ne relèvent pas de notre compétence. Le texte s'en tient à définir des cadres juridiques applicables à la mise à disposition des décisions de justice, aux sites internet de prestations juridiques et d'aide à la décision de justice, aux dispositifs de règlement alternatif des litiges - on sait que des sites commencent à se créer qui proposent aux gens de mettre en oeuvre des procédures de conciliation : il faut en définir le cadre et leur fixer une déontologie. Tel est l'objet, fort pertinent, des articles 7 et 8.

S'agissant de l'organisation de la justice à proprement parler, la proposition de loi reprend un point intéressant du rapport de la mission d'information, sur lequel nous nous étions montrés assez unanimes : la création d'un tribunal départemental de première instance, institution unique venant remplacer les tribunaux d'instance et les tribunaux de grande instance, étant entendu que, dans certains départements, deux tribunaux peuvent rester nécessaires, compte tenu de divers critères comme le flux d'affaires ou la démographie. Il s'agit, en somme, de promouvoir une organisation plus rationnelle. On se souvient que la loi de modernisation de la justice du XXIe siècle avait déjà transféré les audiences du tribunal de police au tribunal de grande instance, et que toute une série de compétences du juge d'instance ont peu à peu disparu au profit du tribunal de grande instance. Cette proposition de nouvelle organisation, à laquelle nous nous étions montrés plutôt favorables, n'est pas de nature à nuire, ainsi que le précise l'auteur de la proposition de loi, à la proximité du juge, car les structures existantes seraient maintenues et fonctionneraient sous forme de chambres détachées. Il y a là un équilibre possible.

Rappelons-nous aussi que la loi de modernisation de la justice du XXIe siècle entendait décharger le juge d'un certain nombre de tâches, et renforcer la conciliation. La proposition de loi s'inscrit dans cette perspective en conférant force exécutoire aux procès-verbaux de conciliation dressés par les conciliateurs de justice - nous vous proposerons un amendement sur ce point, qui pose aujourd'hui des difficultés juridiques susceptibles, néanmoins, d'être réglées à l'avenir. Elle vise également à permettre au juge de déléguer sa mission de conciliation à des juristes assistants ou à des greffiers assistants du magistrat. Tel est l'objet de l'article 13.

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