Une précision sur les contrats de protection juridique. Ainsi que nous le relevons dans le rapport, ces contrats tels que proposés par les assureurs, en France, à la différence d'autres pays, n'ont pas pour objet la prise en charge des frais financiers d'accès à la justice. Ils visent plutôt à organiser un service de conseil juridique, à faire de la médiation - ce qui exclut, du même coup, les contentieux familiaux, pénaux et prudhomaux, c'est à dire les contentieux du quotidien.
J'en arrive au dernier point de la proposition de loi ordinaire, qui concerne le redressement de la justice pénale. Le groupe socialiste et républicain, dans sa contribution annexée au rapport d'information, avait manifesté des réserves sur ce point. Soyons clairs, nous ne sommes pas pleinement d'accord. Je sais gré, cependant, à l'auteur de la proposition de loi de ne pas y avoir inscrit la suppression de la contrainte pénale, et de poser clairement, à l'article 27, une question qui suscite l'incompréhension des populations. Depuis 2009, la loi précise que, lorsqu'une peine d'emprisonnement de moins de deux ans est prononcée par le tribunal correctionnel, son exécution est soumise à l'appréciation du juge de l'application des peines. Elle peut donc ne pas être exécutée en détention. Si bien que les gens en viennent à penser que les peines d'emprisonnement prononcées ne sont pas effectives. Le Président de la République, lui-même, n'a-t-il pas déclaré qu'il fallait que les peines d'emprisonnement prononcées soient effectivement exécutées ? Avant sa suppression, on réglait le problème de la surpopulation carcérale par la grâce présidentielle du 14 juillet, qui permettait de faire de la place dans les prisons. Mais il n'est pas sûr que ce soit là une solution adéquate. L'article 27 a le mérite de poser le débat, en soulignant que les juges qui prononcent la sanction ne doivent pas renvoyer à d'autres la décision sur ses modalités d'exécution. Lors des auditions de la mission d'information, les juges de l'application des peines se sont plaints de voir leurs collègues en correctionnelle se décharger sur eux. Et nos auditions sur ce texte nous ont amenés à constater une rupture totale et une absence de dialogue manifeste entre les magistrats et l'administration pénitentiaire, à telle enseigne que les visites d'établissements pénitentiaires par des magistrats sont assez exceptionnelles. Des juges prononcent ainsi des peines sans jamais se préoccuper des conditions qui prévalent en maison d'arrêt. Certains directeurs de maison d'arrêt disent qu'ils ne peuvent plus accepter de détenus, sauf à créer un risque de sécurité. L'article 27 nous permettra d'avoir un vrai débat sur ce problème, et d'interpeller la ministre de la justice sur le sens de la peine. Nous constatons que très peu de tribunaux correctionnels font le choix de l'ajournement du prononcé de la peine, qui donnerait le temps de se renseigner après le prononcé de la culpabilité. Certes, la sanction est nécessaire, mais on sait qu'après la peine, il y a aussi la sortie, et que les courtes peines d'emprisonnement sont inefficaces et conduisent souvent à la récidive.
Pour toutes ces raisons, il importe que la politique pénale soit bien comprise au niveau des juridictions. Nous vous proposerons un amendement pour aller dans ce sens. Il y a là un vrai sujet, qui appelle une prise de conscience du monde judiciaire. Nous n'avons pas le pouvoir de provoquer une telle prise de conscience par la loi, mais nous avons celui d'interpeller : tel est le sens des articles 27 et 28 qui, sans résoudre le problème, ont le mérite d'ouvrir le débat.