Intervention de Agnès Buzyn

Commission des affaires sociales — Réunion du 17 octobre 2017 à 9h25
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 — Audition de Mme Agnès Buzyn ministre des solidarités et de la santé et de M. Gérald daRmanin ministre de l'action et des comptes publics

Agnès Buzyn, ministre :

Monsieur le président, vous nous avez demandé où en est la généralisation du tiers payant. Nous attendons les conclusions du rapport que nous avons commandé au mois de juillet sur la faisabilité de cette généralisation au 1er décembre prochain. Ce rapport nous sera rendu en fin de semaine ; nous nous déciderons sur ce fondement.

En ce qui concerne le financement des Ehpad, il y aura une mesure dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, avec une augmentation de 100 millions d'euros des sommes affectées aux soins et un accroissement du nombre de postes d'infirmières de nuit car les résidents sont de plus en plus âgés et de plus en plus malades. Nous prenons donc en compte la difficulté croissante de la prise en charge de nos aînés.

En outre, nous instaurons un comité de suivi de la tarification des Ehpad, qui s'est réuni fin septembre pour sa première réunion au ministère. Cette réforme doit se faire sur sept ans, nous avons le temps d'accompagner les établissements. Pour l'instant, l'évolution de la tarification est favorable pour 80 % des établissements et défavorable pour 20 % d'entre eux.

En ce qui concerne votre question sur la télémédecine, madame Deroche, nous considérons comme vous qu'il y a encore trop de verrous réglementaires. Les expérimentations ont mis trop de temps à se mettre en oeuvre, elles sont trop limitées, alors que la télémédecine est entrée dans l'usage des professionnels de santé, on ne peut l'ignorer. Nous intégrons donc cette pratique dans le droit commun.

Toutefois, je souhaite saisir la Haute Autorité de santé sur l'encadrement de sa pratique car tous les actes médicaux ne peuvent se faire par télémédecine. Nous allons avancer de manière pragmatique avec les professionnels de santé sur ce sujet.

L'Ondam, fixé à 2,3 %, est considéré par certains comme trop exigeant mais le comité d'alerte de l'Ondam a souligné que notre prévision est réaliste. Nous souhaitons engager un milliard d'euros d'économies grâce à la baisse des prix des médicaments. Nous allons faire monter en puissance les génériques et avancer sur les biosimilaires. Il y a des marges de progrès sur le coût des traitements.

Nous souhaitons aussi travailler avec les professionnels de santé sur la maîtrise médicalisée, que j'appelle plutôt « pertinence des soins ». Ce sujet est central pour maîtriser les dépenses et pour bien soigner car il ne s'agit pas que d'efficience. Il faut octroyer le bon acte au bon patient et au bon moment. Nous avons à ce sujet un plan quinquennal commun avec l'assurance maladie et les ARS.

Le niveau d'économie à l'hôpital est équivalent à celui de 2017. Cela accompagne l'évolution des hôpitaux ; les groupements hospitaliers de territoire, les GHT, constitueront un levier d'économie, notamment grâce aux achats. Ces évolutions s'articulent autour de la pertinence et de l'efficience sur cinq ans ; ce n'est donc pas une révolution.

En ce qui concerne l'innovation, vous avez évoqué, madame Deroche, le fonds d'amorçage de 10 millions d'euros pour le fonds d'intervention régional uniquement, le FIR, qui est à la main des ARS ; nous ajoutons à cela 20 millions d'euros dans un fonds pour l'innovation, qui fera l'objet d'un comité stratégique incluant les professionnels de santé et les fédérations hospitalières, et qui siègera au niveau de la Cnamts. Il devra être capable de financer et de suivre des expérimentations. Ce fonds servira aussi à payer les rémunérations innovantes, notamment au forfait, au parcours ou à la pertinence des soins.

Ce sont des modes innovants de tarification que nous souhaitons accompagner au travers de ce fonds. Tout ce qui se révélera utile sera ensuite déployé à l'échelon national. Cela ne se substituera pas à la tarification à l'acte ou à la T2A, cela viendra en complément. Ce fonds de vingt millions d'euros sera abondé en tant que de besoin à partir du fonds national de gestion du risque.

La T2A représente 60 % du financement des établissements de santé ; je souhaite que cette proportion diminue. On connaît les dérives de cette tarification, la pression sur les professionnels de santé et sur les établissements. Nous souhaitons inciter financièrement à la pertinence du parcours de soins (article 35 du PLFSS), augmenter la prise en compte de la qualité dans le modèle de financement (les incitations financières à l'amélioration de la qualité, ou IFAQ), intensifier le virage ambulatoire, moderniser les soins de suite et de réadaptation ou encore accompagner l'offre de soins avec notamment la télémédecine (article 36 du projet de loi).

Il y a donc beaucoup de projets de modification en profondeur, dont les effets se manifesteront progressivement au cours des cinq prochaines années.

Madame Doineau, nous souhaitons effectivement accompagner l'extension des obligations vaccinales d'un effort de communication à l'égard du grand public et des professionnels de santé. En effet, si je suis très bien soutenue à cet égard par les sociétés savantes et par les académies de médecine, de pharmacie et des sciences, 30 % des généralistes ont des doutes sur la vaccination et 25 % en font part aux patients.

Nous devons donc accompagner les médecins de terrain par de l'information rigoureuse et des outils de communication. Nous travaillons sur des supports devant être publiés le 1er janvier 2018.

La branche famille de la sécurité sociale sera, vous l'avez dit, excédentaire mais il y a tout de même un déficit sur l'ensemble du régime général. Nous souhaitons donc que l'esprit de responsabilité touche l'ensemble des branches. En outre, il y aura 70 millions d'euros de dépenses supplémentaires à destination des familles les plus en difficulté car le taux de pauvreté a augmenté ces dernières années.

En ce qui concerne les crèches, il faut favoriser le nombre de places de garde. Il ne faut pas un modèle unique ; il faut favoriser les crèches, les assistantes maternelles, la garde à domicile. Tous les territoires n'ont pas les mêmes besoins. Cela fera l'objet d'objectifs de la convention d'objectifs et de gestion, la COG, que je vais signer avec la Cnaf.

La question n'est pas de porter atteinte, via le PLFSS, à l'universalité des prestations sociales, ce que je ne souhaite pas mais de remettre en cause notre politique familiale à l'aune de la baisse flagrante de la natalité française depuis deux ans. Est-ce que notre politique familiale répond à cet enjeu ? Je veux que l'on ait à ce sujet un débat apaisé et non idéologique ni doctrinaire. Cela aura aussi une traduction dans la COG.

Vous avez aussi évoqué l'allocation sur le complément de mode de garde, qui est décalée d'un mois. Les familles n'auront plus à assurer l'avance des frais.

Madame Rossignol, j'ai répondu à votre question sur les modes de garde et sur la T2A. Vous parliez de continuité avec le mandat précédent mais je vois pour ma part deux ruptures : l'expérimentation ambitieuse de nouvelles tarifications sur cinq ans et le temps de discussion que je souhaite avoir autour de la PMA. Il s'agit d'ailleurs pour moi d'un sujet relevant d'une loi de bioéthique, qui implique la tenue d'états généraux. Il ne faut pas de dogmatisme, pas d'idéologie. Cela fera donc l'objet d'une loi de bioéthique.

Pour les violences faites aux enfants, le médecin référent se met progressivement en place dans les établissements. Nous débutons une mission autour de la continuité des soins car il faut non seulement un référent mais il faut aussi des médecins capables d'assurer les soins pertinents.

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