Intervention de Mounir Mahjoubi

Réunion du 25 octobre 2017 à 14h30
Intelligence artificielle enjeux économiques et cadres légaux — Débat interactif

Mounir Mahjoubi, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargé du numérique :

Monsieur le sénateur, je répondrai à votre question, qui rejoint celle de M. Longuet, sur les rôles respectifs de l’État et du secteur privé.

La question n’est pas celle de l’intelligence artificielle, mais des nouveaux usages que celle-ci permet et qui vont profondément affecter les réseaux et les infrastructures, dans plusieurs secteurs. Cela conduira à des marchés forcément imparfaits : on frôle là la nécessité, sinon de biens communs et de services publics, du moins d’une pensée commune ou publique.

Dans un tel cas, nous avons plusieurs outils juridiques à notre disposition. Il y a, tout d’abord, la standardisation des protocoles, qui vise au moins à s’assurer que les différents véhicules autonomes parlent le même langage et que, dans notre ville connectée, ils puissent échanger les uns avec les autres.

Il y a, ensuite, la délégation de service public pour l’infrastructure et la partie profonde du réseau. Qu’est-ce qui fera fonctionner les voitures autonomes de demain ? À l’heure de l’intelligence artificielle et de l’autonomie énergétique, ces réseaux ne sont pas forcément physiques.

Cela pose une question très actuelle pour le Gouvernement : est-il du rôle des collectivités locales ou encore du Gouvernement de penser ces réseaux virtuels, ces plateformes qui permettent l’interconnexion entre acteurs privés ? Il serait particulièrement dangereux de laisser les acteurs privés sans accompagnement pour la maîtrise des effets de réseau. De fait, cela laisserait la victoire à un seul acteur : le plus gros.

En effet, mettre sur un marché des véhicules, ou des technologies, non compatibles entre eux revient à mettre en compétition des prisons pour attraper des prisonniers : une fois qu’elles ont attrapé un consommateur, elles le gardent chez elles pendant une quinzaine d’années et, si l’on veut parler à ce consommateur, il faut passer par la plateforme. Tel est aujourd’hui leur modèle économique !

C’est pourquoi notre rôle, si nous misons sur le secteur privé, choix que nous avons fait dans nos économies, est de penser notre intelligence artificielle dans cette régulation. Les données personnelles et industrielles, leur échange et leur standardisation, enfin la capacité à créer une véritable compétition et de la concurrence, voilà les grands enjeux à l’heure de cette transformation numérique.

Je lance d’ailleurs un appel, et même un SOS : sur ces sujets, on manque de réflexion, on manque de chercheurs, en France comme en Europe, et on manque d’un travail parlementaire. C’est pourquoi je nous invite à tous nous saisir de ce sujet et je m’engage à ce que le Gouvernement travaille plus en la matière.

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