L'évolution récente de la conjoncture économique ouvre des perspectives favorables pour les finances sociales. La remontée dynamique de la masse salariale des entreprises du secteur privé, qui devrait être légèrement meilleure que prévue pour 2017, devrait se poursuivre en 2018. Les différents indicateurs dont nous disposons, notamment les encaissements, les déclarations préalables à l'embauche ou encore ceux portant sur la situation de trésorerie des entreprises, témoignent de cette évolution positive, qui se traduit mécaniquement par une amélioration du solde du régime général.
L'an prochain, l'évolution de notre plafond d'emprunt sera modérée, passant de 33 à 38 milliards d'euros. Il s'agit certes de montants importants pour une dette qui, dans la pureté des principes, devrait se limiter à des avances de trésorerie. Toutefois, sur le plan technique, elle ne soulève pas de difficultés de financement. La question du partage de cette dette et de la séparation entre ce qui relève du structurel et du conjoncturel est de nature éminemment politique. En tant qu'opérateur, sur un plan purement technique, nous constatons que le financement de cette dette ne présente pas de difficulté en raison de la très bonne notation de la France et de l'Acoss et des conditions de marché très avantageuses. Nous empruntons à des taux négatifs, ce qui nous rapporte 100 millions d'euros de revenus financiers. Toujours en termes strictement techniques, si cette dette avait été transférée à la Cades, l'impact aurait finalement été moins favorable pour les finances publiques, du fait du contexte très particulier que nous avons connu ces dernières années. La Cades emprunte à long terme, ce qui la rend moins à même de tirer profit de cette situation tout à fait exceptionnelle.
Je n'en tire pas de conclusion générale. Je suis tout à fait conscient, je le répète, que cela est lié à un contexte de taux tout à fait particulier. En cas de renversement de contexte de taux, je ne pourrais plus vous dire la même chose.
Les perspectives de moyen et long termes, telles que décrites dans l'annexe B du PLFSS, font état d'un retour à l'équilibre à partir de 2018 puis d'une situation excédentaire. Si ces hypothèses se réalisent, l'Acoss devrait donc s'engager dans une trajectoire durable de désendettement.
Alors que nous avons historiquement deux missions, la perception des cotisations sociales et la gestion des flux financiers pour le compte des régimes, les réformes proposées par le Gouvernement viennent élargir ce champ. Ainsi, l'article 7 du PLFSS, qui modifie le financement de l'assurance chômage, fait en quelque sorte de l'Acoss une chambre de compensation entre l'Etat et l'Unédic.
Pour l'instant, nous percevons les cotisations chômage et les versons à l'organisme bénéficiaire. Aux termes de cet article, les salariés seront exonérés de cotisation, conduisant à une perte de recettes pour l'assurance chômage. Nous continuerons toutefois à verser à l'Unédic des ressources intégrant le montant de ces exonérations, la compensation étant effectuée par l'affectation à l'Acoss d'une recette fiscale, en l'espèce d'une part de TVA. L'écart potentiel entre cette dernière et les ressources qui auraient été obtenues par les cotisations salariales, qu'il soit positif ou négatif, sera réparti entre les différentes branches du régime général par arrêté interministériel. Cela répond à un double objectif : préserver les recettes de l'assurance chômage sans pour autant créer de relations financières directes entre l'Etat et cette dernière.
La suppression du RSI, prévue par l'article 11 du PLFSS, nous mobilise en tant que réseau de recouvrement et aura un impact très fort sur notre activité. Depuis 2008, les Urssaf assurent conjointement avec le RSI la collecte des cotisations des travailleurs indépendants, des artisans et des commerçants. Les très grandes difficultés rencontrées jusqu'à ce jour étaient notamment liées à la mauvaise articulation entre les compétences des Urssaf et celles du RSI. Ainsi, historiquement, le RSI recevait les déclarations de revenus, et l'Urssaf, après avoir calculé leur montant, envoyait les appels de cotisation et était chargée du recouvrement amiable, tandis que le recouvrement forcé relevait du RSI.
La LFSS pour 2017 a permis de simplifier cette organisation en instituant une responsabilité partagée des deux réseaux dans le recouvrement des cotisations des travailleurs indépendants. Au niveau national, ainsi que dans chaque région, des directeurs sont chargés de cette mission et s'appuient sur des agents des Urssaf et du RSI. Ils ont une autorité fonctionnelle sur l'ensemble des équipes intervenant dans ce domaine et relevant de chacune des deux caisses. D'importants progrès ont ainsi été réalisés en matière de construction commune des politiques de recouvrement. A mes yeux, cette mesure a posé le premier jalon de la réforme à venir car les réseaux travaillent déjà ensemble et un pilotage unique a été mis en place.
Cette réforme, en transférant à terme la responsabilité de l'intégralité du recouvrement au régime général, permet d'aller plus loin en confiant aux équipes de direction, outre l'autorité fonctionnelle qu'elles ont actuellement sur les agents de chaque réseau, un pouvoir hiérarchique sur eux une fois qu'ils auront tous intégré les Urssaf. D'importants progrès devraient également être réalisés en matière de service rendu aux travailleurs indépendants, en rapprochant davantage l'accueil des assurés, au guichet ou par téléphone, de la gestion des dossiers. A l'heure actuelle, l'accent est mis sur le back office, les directeurs régionaux n'étant pas responsables de l'accueil. Pour faire progresser la qualité du service, ces deux aspects doivent être mieux intégrés.
Une réforme d'une telle ampleur doit être mise en oeuvre progressivement et faire l'objet d'ajustements dans le temps. Le PLFSS prévoit une période de transition de deux ans à compter du 1er janvier 2018. Le transfert du personnel du RSI vers le régime général n'est pas possible à cette date, en raison notamment de la nécessité d'identifier les possibilités de reclassement et de consulter les instances le représentant. Dans un premier temps, le fonctionnement restera proche du système actuel : les directeurs régionaux seront secondés par des équipes de l'Urssaf et des caisses locales déléguées pour la protection sociale des travailleurs indépendants, qui succèdent au RSI. A terme, l'intégration des personnels sera complète et nous permettra, en faisant évoluer les organisations, de faire progresser la qualité du service rendu.
Par ailleurs, pour répondre aux attentes des travailleurs indépendants, la modulation des échéanciers de cotisations en temps réel va être mise en place. Le décalage dans le temps entre la perception des revenus et le paiement des cotisations est source d'importantes difficultés pour certains indépendants, alors que les possibilités actuelles de révision des échéanciers ne sont pas suffisamment utilisées. Des possibilités de modulation des échéanciers vont donc être expérimentées en 2018, avant une généralisation en 2019. Le Gouvernement s'est également engagé à améliorer l'offre de service aux autoentrepreneurs, notamment sur le plan numérique.
Cette réforme va conduire la branche « recouvrement » à engager la transformation des outils mis à disposition des travailleurs indépendants, ce qui suppose des travaux informatiques très importants. Toutefois, contrairement à 2008 et à la création du RSI, il ne s'agit pas ici de construire un système nouveau au lendemain d'un « big bang », mais bien d'améliorer l'existant.