Intervention de Pierre-Jean Benghozi

Commission de l'aménagement du territoire et du développement durable — Réunion du 25 octobre 2017 à 16h00
Audition de M. Sébastien Soriano président de l'autorité de régulation des communications électroniques et des postes arcep

Pierre-Jean Benghozi, membre du collège de l'Arcep :

La couverture mobile et numérique du territoire est la priorité absolue de l'Arcep. Chaque citoyen se demande à tout moment si son téléphone mobile « capte bien ». L'autorité compétente prend en compte ce souci majeur et permanent.

Il y a aujourd'hui une conjonction de planètes. L'importance de couvrir tout le territoire, difficile à faire entendre dans le passé, est aujourd'hui reconnue. Chacun - y compris les opérateurs - est prêt à jouer sa partition pour répondre à l'impatience de la couverture.

Le constat, pourtant, est aigre-doux. Doux, car la Fédération française des télécoms annonce une couverture de 70% de la population dans les zones peu denses couvertes par les différents opérateurs - seul Free est un peu à la traîne. Mais aigre, car cette évolution n'est pas satisfaisante, au regard de la complétude, de l'aménagement du territoire... Les usages dépassent en effet considérablement les anticipations, y compris celles formulées par l'Arcep. Nous sommes toujours en retard dans la fixation des échéances et des objectifs de couverture, alors que le volume de données mobiles (la consommation individuelle) double chaque année... En 2012, lors de l'attribution de la bande 800 pour la 4G, on avait fixé des objectifs sur les zones de déploiement prioritaire à 2028 ; lors de l'attribution de la bande 700 en 2015, les objectifs concernant les trains du quotidien ont été assortis d'échéances lointaines. Si 70% des zones prioritaires sont aujourd'hui couvertes, cela signifie que 30% ne le sont pas. Il faut donc accélérer et traiter par exemple les zones gris clair, mal couvertes, ou améliorer la qualité du service en internet mobile et en fonctionnalités diverses, car la qualité est très variable.

Il convient de suivre précisément le respect des engagements pris par les opérateurs en échange du droit d'usage. Ces engagements peuvent se révéler insuffisants, eu égard à l'impatience numérique que je mentionnais. Mais nous suivons chaque trimestre le déploiement de la 4G, et de la 3G dans les centres-bourgs qui en sont dépourvus.

Autre action importante de l'Arcep : le travail d'information, d'anticipation, de relais d'expérience. Nous avons affiné les cartes pour pousser les opérateurs à aller au-delà des obligations formelles, à investir afin de se différencier de leurs concurrents. Ce qu'indique le thermomètre sur la place du village - le critère binaire « capte ou ne capte pas » - ne reflète pas la qualité de la connexion pour chaque utilisateur. Le 18 septembre dernier, nous avons annoncé la publication de nouvelles cartes de couverture pour la région Nouvelle Aquitaine, avec quatre niveaux de performance, de « très bonne couverture » à « couverture limitée » et « inexistante », et des précisions sur la captation à l'extérieur et à la captation à l'intérieur des bâtiments - distinction fondamentale pour les activités telles que le commerce électronique. Ces nouvelles cartes correspondaient à une telle attente que nous avons enregistré 48 millions de consultations ! Dès le premier jour, le compteur du serveur de l'Arcep explosait ! Ces informations sont importantes pour éclairer le choix du consommateur avec d'autres critères que les types de forfaits et les tarifs, mais aussi pour guider les politiques publiques à partir d'un diagnostic précis des manques, et pour stimuler les efforts des opérateurs, ainsi incités à améliorer leur offre. Notre démarche est progressive, les cartes ne sont pas toujours précises, en dépit des mesures de vérification déjà effectuées pour la région citée, et que nous étendrons bientôt au reste du territoire. En 2018, nous diffuserons des cartes sur l'outre-mer et élargirons ces différentes cartes, au-delà des services voix et SMS, aux services d'internet mobile.

Il est temps de changer de braquet sur le mobile. Notre ambition, dans les zones de couverture limitée, correspond au slogan olympique « plus vite, plus loin, plus haut » ! Nous voulons pousser les opérateurs à investir seuls, plutôt qu'en partenariat avec les collectivités, car les mécaniques sont alors plus complexes. Nous conseillons au Gouvernement de se saisir du levier que représentent les renouvellements de fréquences 2G et 3G, entre 2021 et 2024, pour renégocier avec les groupes des engagements beaucoup plus contraignants. Les discussions devraient associer les collectivités locales, en bonne intelligence entre le public et le privé, et en s'appuyant sur des engagements opposables, sur la base de l'article L33-13 déjà cité.

L'objectif est d'améliorer significativement les choses dès 2020. Il y a des arbitrages à faire entre solutions pérennes de long terme et solutions « sparadraps » de court terme, pour régler des problèmes locaux, éventuellement par des solutions à la demande, temporaires. À cet égard, nous avons besoin de tous vos retours sur les priorités et les besoins.

Autres sujets importants, le déploiement des réseaux très haut débit radio, le réaménagement des bandes pour l'arrivée de la 5G - nous accordons souvent des autorisations d'expérimentation technique aux opérateurs, pour tester des solutions - ou la nouvelle bande de fréquence pour des réseaux d'entreprise 4G privés, qui s'adresse aux aéroports, centrales nucléaires ou grands sites industriels.

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