Il n'y a en effet pas d'unanimité sur la transformation du CICE en baisse des cotisations sociales. Le comité de suivi du CICE lui-même est très critique : cette mesure, qui devait créer un million d'emplois, n'en a finalement créé ou maintenu que 100 000 tout au plus.
Tous ceux qui ont travaillé sur la compétitivité dans l'industrie ou dans les secteurs exportateurs savent que le niveau de salaire n'y est pas déterminant. D'ailleurs, beaucoup des bénéficiaires du CICE n'appartiennent pas aux branches les plus concernées par la concurrence mondiale.
Cet outil, ni calibré, ni conditionné, ni ciblé, est extrêmement coûteux et le comité de suivi doute de son impact sur la compétitivité, contrairement à ce que tout le monde répète. Il devrait, à mon sens, être remplacé par des aides ciblées sur les secteurs qui affrontent la compétition internationale. Sa généralisation a été un gaspillage d'argent public.
Sa transformation en allègement de cotisations empêche en outre de conditionner cette aide, contrairement à un crédit d'impôt. C'est une application de la thèse selon laquelle la baisse du coût du travail renforce la compétitivité, qui n'a pourtant jamais été vérifiée ! En Allemagne, par exemple, ce ne sont pas les réformes Schröder qui ont été déterminantes, mais plutôt l'investissement industriel et les choix d'orientation des filières.
Pour ces raisons, je ne voterai pas cet article.
J'aborderai maintenant un sujet plus complexe, le basculement du financement des cotisations vers la CSG, avec les conséquences qui en découleront pour les retraités. À l'origine, la CSG visait à élargir le champ des cotisants, notamment grâce aux revenus du capital. En réalité, la part de ces revenus est assez faible dans les recettes de la CSG et de plus, ils vont bénéficier en 2018 d'allègements considérables. Certes, les retraités doivent être solidaires des plus jeunes, mais il conviendrait aussi de réfléchir à une solidarité du capital envers le reste des cotisants.
Nous sommes devant une évolution majeure : que devient notre protection sociale issue du Conseil national de la Résistance (CNR) ? Soit on s'oriente vers une universalité de la santé, comme c'est le cas actuellement, et il n'est alors pas illégitime que le système de financement de la sécurité sociale soit adossé à un prélèvement d'impôts plutôt qu'à des cotisations. Le seul problème est que la CSG n'est pas un impôt progressif. C'est pourquoi nous pourrions imaginer la progressivité de la CSG, en toute constitutionnalité. En l'état, le système n'est pas juste.
Au demeurant, pour le chômage et la retraite, il convient de rester adosser à la cotisation des entreprises, l'un des fondamentaux du projet du CNR, à savoir la mutualisation des risques et l'assurance collective. En tuant ce principe, on transformera peu à peu l'aide aux chômeurs en une aide aux personnes, ce qui implique un changement de projet sociétal. Personnellement, je n'y suis pas favorable. Et si l'on conserve l'assurance collective mutualisée, comment faire pour éviter que les entreprises à forte main-d'oeuvre soient très perturbées ? On pourrait instaurer une cotisation sur la valeur ajoutée créée dans l'entreprise, ce que d'aucuns appelleront taxer les robots. Néanmoins, cette contribution doit être juste, car nous devons moderniser nos outils de production.
S'agissant des retraites, le rapport de notre collègue est assez partial. N'ayant pas été une inconditionnelle de la politique du précédent gouvernement...