Merci beaucoup de votre invitation. Je m'attacherai surtout à vous présenter Campus France et à replacer l'attractivité de la France dans le contexte mondial. Le contrat d'objectifs et de moyens nous satisfait, il y a peu à en dire.
À la fin des années 1990, la France manquait d'un organisme comme le Deutscher Akademischer Austauschdienst (DAAD, office allemand d'échanges universitaires) ou le British Council, c'est pourquoi les ministres Claude Allègre et Hubert Védrine ont décidé, en 1998, de créer un organisme de promotion de l'enseignement supérieur français à l'étranger.
Jusqu'en 2015, le bloc anglo-saxon (États-Unis, Grande-Bretagne) était en tête pour attirer des étudiants ; la France se situait à la troisième place avec 310 000 étudiants étrangers accueillis sur notre territoire, dont la moitié d'Africains, 25 % d'Européens, 18 % d'Asiatiques et 8 à 9 % d'Américains.
Le nombre d'étudiants en mobilité dans le monde double tous les 12 ans : ils étaient 2 millions en 2000, 4 millions en 2012 et on estime qu'ils seront 9 millions en 2025. En 2015, la France est passée en 4e position, dépassée par l'Australie, même si elle reste le premier pays francophone d'accueil. La Russie, 6e, est juste derrière l'Allemagne, 5e : les étudiants des pays de l'ancien bloc soviétique, qui s'étaient détournés de la Russie après la chute de l'URSS, y retournent désormais massivement grâce une politique très attractive de bourses et des campagnes de communication. Ensuite viennent le Canada (7e), le Japon (8e) et la Chine (9e) qui mène une politique d'influence depuis les années 2000. L'objectif de ce plan stratégique, « Le rêve chinois », est que la Chine passe de premier pays d'envoi à premier pays d'accueil des étudiants dans 20 à 30 ans. Les Émirats arabes unis sont passés de la 18e place en 2010 à la 12e place en 2015. L'Arabie saoudite attribue des bourses d'études islamiques, et est ainsi passée de la 29e place en 2010 à la 13e place en 2015 ; la Turquie, passée de la 31e à la 14e place avec 30 000 bourses du même type en 2015, 60 000 bourses en 2016, 90 000 bourses en 2017, etc. L'Ukraine et les Pays-Bas sont également offensifs, avec, dans ce dernier pays, des cours dispensés intégralement en anglais à partir du master pour tous les étudiants.
Face à ces nouveaux concurrents, la France reste dans le peloton de tête mais elle recule. Quelle politique veut-on mener, notamment à l'égard de l'Afrique ? Nous avons des liens anciens avec ce continent et nous devons être présents car nos concurrents y sont également. La comparaison entre les espaces Campus France et les instituts Confucius en Afrique est édifiante, notamment à Dakar. La Turquie mène également une politique d'influence active en Afrique, avec notamment l'implantation d'instituts culturels.
La France est aujourd'hui en concurrence avec des pays qui investissent massivement. Or, en quinze ans, les moyens que la France allouait aux bourses ont été divisés par deux. Le projet de loi de finances pour 2018 prévoit un maintien des sommes allouées aux bourses, mais il faudrait faire beaucoup plus. Les pays anglo-saxons attribuent peu de bourses mais mènent des campagnes de promotion massives réalisées par de grandes agences de communication. La France est au milieu du gué : elle n'a ni les moyens de réaliser des campagnes de communication importantes, ni d'attribuer autant de bourses que ses concurrents - notamment l'Allemagne qui en attribue massivement.
Exemple flagrant, alors que les étudiants tunisiens venaient très majoritairement en France il y a quelques années encore, ils ne sont plus que 50 % actuellement, et se dirigent désormais vers l'Allemagne, qui veut aussi construire une université tuniso-allemande, la Roumanie ou encore l'Espagne. Autre exemple : le Cameroun, pays à la fois anglophone et francophone, où l'Allemagne arrive désormais devant la France, qui n'attire plus que 15 % des étudiants camerounais poursuivant des études à l'étranger.
Campus France est un établissement sous tutelle des ministères des affaires étrangères et de l'enseignement supérieur. Le forum Campus France rassemble tous les types d'établissements d'enseignement supérieur : universités, écoles d'ingénieurs, écoles de commerce, écoles d'art, centres de langues, etc.
Nous faisons de la communication à l'étranger car les étudiants ont le choix de leur lieu d'études et nous devons les convaincre. Nous les aidons à s'inscrire et à se rendre en France, mais cela nécessite une politique de visas plus souple, y compris pour les visas de circulation qui permettent aux étudiants étrangers ayant obtenu un master ou un doctorat en France de garder un lien avec notre pays.
La loi relative au droit des étrangers en France a créé une carte de séjour « Passeport talent », mais il faut appliquer la loi et délivrer effectivement ces cartes de séjour. Vous avez tous connaissance de visas refusés. Menons une politique de délivrance des visas plus ouverte allant dans le sens d'une plus grande attractivité. L'élection de notre Président de la République (et également son initiative « Make Our Planet Great Again ») a donné l'image d'une France ouverte sur le monde, positive, qui attire les étrangers. Poursuivons dans cette voie.