Les discussions sur la prolongation du Plan ont été longues et difficiles même si les résultats obtenus ont été salués. La prolongation consiste en un doublement de la durée du plan mais avec des montants plus limités qu'espérés notamment par la France.
Le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, a proposé à la rentrée 2016, dans son discours sur l'état de l'Union, de doubler la durée du plan. La Commission prévoyait également de porter le FEIS de 21 milliards à 33,5 milliards, ce qui permettrait de mobiliser 500 milliards d'investissements d'ici à fin 2020. Quant à la garantie, elle est relevée de 16 à 26 milliards d'euros.
La proposition de règlement publiée en septembre 2016 prévoit que les fonds seront concentrés sur les investissements durables afin de contribuer à atteindre les objectifs de l'Accord de Paris.
Une amélioration de la couverture géographique, notamment dans les régions les moins développées est en outre souhaitée (un accord vient d'ailleurs d'être signé il y a quelques jours en Guyane). Enfin de nouveaux secteurs sont introduits : la pêche et l'agriculture durables.
La Commission met par ailleurs tout particulièrement l'accent sur la nécessaire additionnalité des financements garantis et les critères de sélection des projets : les interventions du Fonds seront désormais motivées et rendues publiques. Cet élément de transparence, très demandé par le Parlement européen, est une avancée qu'il convient de saluer et qui facilitera également le contrôle des parlements nationaux.
Enfin, la Commission promet un renforcement des outils techniques afin de couvrir plus efficacement les besoins.
Après d'âpres négociations, la finalisation de l'adoption de la prolongation du plan est imminente. Les principales améliorations apportées, notamment l'extension de la couverture géographique et sectorielle ainsi que la priorité donnée aux actions liées au changement climatique sont saluées tant par le Parlement européen que par le Conseil. Le Parlement européen a souhaité, dans une résolution adoptée le 15 juin dernier, que les régions les plus fragiles soient privilégiées et que les investissements risqués soient priorisés. Les commissions du budget et des affaires économiques et monétaires demandaient par ailleurs que les petits projets soient mieux pris en compte.
Les principaux sujets de négociation en juin et septembre ont porté sur le financement du relèvement de la garantie et l'introduction d'un droit de regard du Parlement européen sur la stratégie d'investissement du Fonds.
Sur le premier sujet, un point d'équilibre a finalement été trouvé. À la demande du Parlement européen, les redéploiements de crédits affectés à d'autres programmes européens ont été limités ; il a finalement accepté que 275 millions d'euros provenant du Mécanisme d'interconnexion pour l'Europe (MIE) soient redéployés, le programme cadre de recherche « Horizon 2020 » étant épargné. La provision de garantie a été réduite à 25 %, sauf pour les PME et les investissements en capital pour lesquels elle reste fixée à 50 %, soit légèrement plus que le taux d'échec de ces opérations. Enfin, le Fonds bénéficiera de 125 millions d'euros de flux financiers (remboursements d'emprunts, revenus d'intérêts/du capital...) provenant du MIE. Autre nouveauté : les revenus générés par le FEIS contribueront à hauteur de 525 millions d'euros au financement de la garantie. Enfin, 150 millions d'euros seront ponctionnés sur les marges budgétaires non utilisées sous le plafond d'une ou plusieurs rubriques du cadre financier pluriannuel 2014-2020.
Une autre pierre d'achoppement concernait la gouvernance du comité de pilotage du FEIS. Les députés européens ont obtenu la possibilité de nommer un expert indépendant qui en deviendra le 5ème membre aux côtés des 3 experts nommés par la Commission et d'un expert nommé par la BEI. Toutefois, contrairement à leur souhait, la personnalité qu'ils nomment ne disposera pas du droit de vote.
S'agissant de la tarification des opérations de financement du FEIS, la BEI est invitée à étudier toutes les options possibles (réduction des taux d'intérêt, combinaison avec d'autres programmes locaux/nationaux) de nature à réduire les coûts de financement incombant aux porteurs de projets, notamment dans des pays où les marchés de capitaux ne fonctionnent pas de manière optimale ou pour des projets très innovants, mais aussi très risqués.
L'accord Parlement européen/Conseil a été validé par le Coreper d'hier et sera approuvé par le prochain Conseil, avant d'être entériné par le Parlement européen lors de sa 2ème ou de sa 4ème session plénière, à la mi-novembre ou à la mi-décembre.
Le cadre prolongé et modifié répond-il aux préoccupations de notre commission des affaires européennes et du Sénat ?
Je rappelle que dans le cadre du suivi de la mise en oeuvre du plan, notre commission a notamment mis particulièrement l'accent, dès l'origine, dans ses propositions de résolution et avis politiques, sur le rôle que les collectivités territoriales devaient jouer dans la mise en oeuvre du plan. Fin 2015, le rapport d'information présenté par nos collègues Jean-Paul Emorine et Didier Marie dressait un premier bilan positif de la mise en oeuvre du plan, soulignant le rôle clé des banques publiques de développement mais s'inquiétait du rôle que les collectivités territoriales étaient susceptibles de jouer dans un modèle économique excluant les subventions. La résolution alors adoptée reprend cette préoccupation tout en mettant l'accent sur la nécessité de faciliter le déploiement de projets d'investissements de taille moyenne.
Un an plus tard, la commission relevait avec satisfaction le rééquilibrage sectoriel et géographique en cours mais considérait que la place des collectivités territoriales restait perfectible.
Le nouveau cadre proposé a indéniablement le mérite de proroger la durée du plan et de financer l'augmentation de la garantie qui l'accompagne. L'exigence d'additionnalité, qui justifie l'octroi d'une garantie aux seuls investissements qui ne pourraient être engagés en son absence, pourra désormais être contrôlée grâce à la publication des motifs du comité du Fonds. Le rôle des collectivités territoriales semble de mieux en mieux pris en compte mais pourrait être renforcé. Le Commissariat aux investissements que nous avons entendu ainsi que la Caisse des dépôts et Bpifrance, prévoit d'ailleurs de renforcer sa communication dans leur direction : il nous a ainsi montré la maquette mise à jour de la brochure qu'il a élaborée à leur attention avec la BEI.
Il convient de souligner que plusieurs autres améliorations restent nécessaires : le renforcement de l'articulation avec les fonds structurels, devra être poursuivi ; l'assistance technique apportée aux PME devrait également être améliorée ; enfin le développement de plateformes d'investissement pour le financement de projets de toutes tailles doit être poursuivi, même si la France a été particulièrement réactive en la matière.
Si notre commission en était d'accord, ces différents éléments pourraient être repris dans un communiqué.