Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la commission des affaires sociales se félicite tout d’abord de la bonne santé financière de la branche accidents du travail et maladies professionnelles. Cette dernière est en effet bénéficiaire, ce qui est toujours encourageant. Il est vrai que les entreprises sont à l’origine, par leurs cotisations, de la totalité des recettes. Ainsi, malgré de nouvelles dépenses mises à sa charge, le solde prévisionnel de la branche s’élèverait à 500 millions d’euros en 2018. Ce résultat est d’autant plus remarquable que son financement repose intégralement, je le répète, sur les employeurs, qui ont consenti des efforts répétés ces dernières années pour apurer la dette. Car celle-ci, je le rappelle, ne fait pas l’objet de reprises par la CADES, contrairement à ce qui s’est passé pour les autres branches.
Compte tenu de cette situation, nous regrettons que les mesures nouvelles pour la branche AT-MP demeurent finalement assez timides, même s’il s’agit d’avancées auxquelles nous ne pouvons qu’être favorables et même si les résultats obtenus en matière de sinistralité sont très encourageants. Je le rappelle, on dénombre 33, 8 accidents pour 1 000 salariés et le nombre d’accidents du travail est dix fois moins élevé qu’il y a cinquante ans. Des efforts importants ont donc été réalisés par l’ensemble des employeurs et des employés.
Une partie grandissante des ressources de la branche AT-MP est en fait consacrée à des transferts vers d’autres branches ou vers des fonds. Elle est en particulier le principal financeur des dispositifs mis en place pour les victimes de l’amiante, l’État s’étant de son côté clairement désengagé, ce que nous déplorons. En effet, je le rappelle, l’État a sa propre responsabilité, non seulement en tant qu’employeur, mais aussi pour son rôle dans le domaine régalien, l’interdiction de l’utilisation de l’amiante ayant été très tardive.
À lui seul, le Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante, le FIVA, a été doté de 5, 6 milliards d’euros depuis sa création, dont 5, 1 milliards d’euros en provenance de la branche AT-MP. Pour la première fois, les dépenses d’indemnisation ont connu en 2016 une baisse, que l’exercice 2017 semble confirmer. Vingt ans après le début de l’interdiction de l’usage de l’amiante, une telle inflexion pourrait indiquer le passage d’un cap : compte tenu du délai de latence des maladies liées à l’amiante, les études épidémiologiques prévoyaient un pic des demandes en 2020. Avec une légère avance par rapport aux prévisions, ce pic pourrait donc être aujourd’hui dépassé, ce qui est encourageant.
La situation du Fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante, le FCAATA, n’appelle pas de remarques particulières. Je souligne simplement que le nombre de ses allocataires diminue également.
Notre commission vous proposera néanmoins un amendement visant à renforcer l’information des personnes ayant demandé l’inscription d’un établissement sur la liste des employeurs ouvrant droit à l’ACAATA, l’allocation de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante - et non « la cata » !... Il s’agit d’une mesure adoptée par le Sénat l’année dernière, mais qui avait été supprimée par l’Assemblée nationale malgré l’avis contraire de nos collègues de la commission des affaires sociales.
Au total, les dépenses de la branche AT-MP au titre des fonds Amiante ont désormais plutôt tendance à diminuer. Tel n’est pas le cas des dépenses durablement générées pour la branche par la réforme du compte pénibilité, le 1er octobre dernier. La montée en charge de ce dispositif, dont la gestion et le financement seront tous deux dorénavant assurés par la branche AT-MP de la CNAMTS, la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés, fait encore l’objet de nombreuses incertitudes.
Il semble d’ailleurs que la CNAMTS ait pris connaissance assez tardivement du transfert envisagé par le Gouvernement ; l’évaluation de l’impact financier de la mesure demeure peu approfondie. La branche sera probablement confrontée à une hausse importante des demandes de reconnaissance de maladies professionnelles.
En outre, si la Caisse nationale d’assurance vieillesse, la CNAV, avait mis en place un dispositif d’ouverture et de gestion des droits, elle n’avait pas développé l’activité de prévention en entreprise. Tout l’enjeu sera d’y affecter les moyens nécessaires et d’éviter de rester dans une simple logique de réparation. Dans ce domaine, madame la ministre, veillons à ce que les efforts d’économies demandés à la branche AT-MP de la CNAMTS n’obèrent pas sa capacité d’action.
Enfin, notre commission s’interroge une nouvelle fois sur l’avenir du versement à la branche maladie au titre de la sous-déclaration des AT-MP. Ce transfert, qui s’élève à 1 milliard d’euros, ce qui n’est pas rien, est entièrement financé par des ressources mutualisées entre les employeurs. Les limites de l’exercice d’évaluation, qui débouche sur un mécanisme par nature inflationniste, sont connues. En outre, au regard de la progression continue du transfert, il est permis de s’interroger sur la réalité des efforts engagés pour lutter contre la sous-déclaration.
Au-delà de 2018, le PLFSS prévoit la poursuite de la croissance des excédents de la branche AT-MP. Il paraît légitime d’en tirer les conséquences pour les employeurs, en engageant une décroissance des taux de cotisation.
Il nous faudra cependant être vigilants concernant l’avenir des dépenses mutualisées, afin d’éviter qu’elles ne fragilisent les fondements assurantiels de ce système centenaire, qui a su s’adapter aux évolutions de la société et auquel notre commission des affaires sociales a toujours été très attachée.
En vous remerciant de votre attention, mes chers collègues, je vous engage à voter les objectifs de dépenses de la branche AT-MP pour 2017.