Intervention de Jean-Marie Mizzon

Réunion du 13 novembre 2017 à 16h00
Financement de la sécurité sociale pour 2018 — Discussion générale

Photo de Jean-Marie MizzonJean-Marie Mizzon :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, ce premier projet de loi de financement de la sécurité sociale est important, car il marquera la trajectoire que vous comptez donner à votre politique sociale, madame la ministre.

Les annonces se sont multipliées ces dernières semaines : stratégie nationale de santé, lutte contre les déserts médicaux, lois de bioéthique, retraites, assurance chômage. C’est l’ensemble de notre politique sociale que vous comptez réformer, en tout début de quinquennat.

Nous approuvons la méthode qui consiste à engager une concertation avec l’ensemble des acteurs concernés avant de faire des propositions. Il n’est plus acceptable que les réformes soient uniquement inventées dans des think tanks et traduites dans des cabinets ministériels avant d’être votées en bloc par des majorités aux ordres. Consultez, discutez, inspirez-vous des expérimentations et idées développées dans les territoires de métropole et d’outre-mer.

Je m’exprimerai sur les équilibres et les recettes de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, ainsi que sur la branche assurance maladie. Nassimah Dindar s’exprimera quant à elle sur les branches famille et vieillesse, et insistera sur la question de l’accès aux soins.

L’année dernière, à la même époque, la ministre de la santé nous présentait le dernier projet de loi de financement de la sécurité sociale du quinquennat comme l’aboutissement de mesures ayant permis le redressement des finances sociales. La protection sociale était réhabilitée, les comptes à l’équilibre, les retraites sauvées, les hôpitaux financés : le satisfecit était total.

La majorité sénatoriale avait alors exprimé des réserves – c’est peu dire – quant à la sincérité du texte qui était soumis au Sénat. Votre texte, madame la ministre, le confirme. Le déficit de la branche maladie était beaucoup plus dégradé que ce qui avait été prévu : il est de 4, 1 milliards d’euros au lieu des 2, 6 milliards d’euros annoncés. Nassimah Dindar aura l’occasion de le développer concernant la branche vieillesse : le Gouvernement avait fait preuve d’imagination pour afficher des comptes sous un jour favorable.

Le recours à des artifices comptables n’est pas l’apanage de votre prédécesseur ; il faut le reconnaître, tous les gouvernements y ont recouru. Les lois de financement de la sécurité sociale sont des textes difficiles à appréhender, techniques, où la communication prend logiquement une place importante. J’espère, madame la ministre, que vous assumerez vos projets de loi de financement de la sécurité sociale avec un peu plus d’honnêteté.

Pour 2018, vous prévoyez un déficit de 2, 2 milliards d’euros. La progression de la masse salariale entraîne une importante hausse des recettes, de plus de 3 %. Quant à l’ONDAM, la progression de 2, 3 % que vous proposez serait obtenue au prix d’un important niveau d’économies, de près de 4, 2 milliards d’euros. Des objectifs exigeants, qui dépendent en partie d’informations tendancielles que nous ne maîtrisons pas.

Au-delà de ces chiffres conjoncturels, n’oublions pas la dette sociale qui, elle, est toujours bien présente.

Ce premier projet de loi de financement de la sécurité sociale tient l’une des promesses du président de la République : soutenir le pouvoir d’achat des actifs par la baisse de leurs cotisations sociales, financée par une hausse de la CSG.

L’article 7 va très vraisemblablement faire l’objet de nombreuses discussions dans cet hémicycle. Est-il juste de faire supporter cette baisse de cotisations par les retraités ? Certes, une partie d’entre eux bénéficiera d’une baisse de la taxe d’habitation, dont l’application, elle, est étalée sur trois années. Certains, cependant, subiront une perte nette de leur pouvoir d’achat.

On peut gloser des heures sur les chiffres, trouver les exemples que l’on veut ; à ce jeu chacun développe des trésors d’imagination, tous plus documentés les uns que les autres. Il y a là, en réalité, une question générale, un enjeu de société : doit-on solliciter davantage les retraités, notamment les plus modestes d’entre eux ? Nous aurons l’occasion d’en débattre, et le groupe Union Centriste proposera des solutions alternatives.

J’en viens au sujet, ô combien sensible, du RSI. Vivement critiqué pour les erreurs dont les indépendants font les frais dans le calcul de leurs cotisations ou de leur retraite, il a concentré les critiques de la majorité, si ce n’est la totalité, des candidats à la présidence de la République.

Emmanuel Macron met donc en œuvre une promesse de campagne. Il n’en demeure pas moins que des doutes et des inquiétudes subsistent sur les modalités de la réforme que vous nous proposez, madame la ministre. N’était-il pas préférable, conformément à votre méthode sur d’autres sujets, ceux que j’évoquais en préambule, de consacrer au RSI un texte en propre, plutôt que d’introduire un article de plus de trente pages dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale ? Nous en débattrons, car il faut de la clarté en la matière.

Je terminerai sur les recettes, en abordant brièvement la question de la fiscalité du tabac. La lutte contre le tabagisme est un enjeu crucial de santé publique, et il est démontré que l’augmentation du prix des paquets de cigarettes conduit à une diminution de la consommation, au moins dans un premier temps. Les consommateurs, en effet, se tournent soit vers les revendeurs frontaliers – je puis vous en parler en connaissance de cause, en tant que sénateur mosellan –, soit vers les marchés de contrebande.

Augmenter le prix du tabac sans lutter efficacement contre la fraude est donc inutile et n’aura qu’un seul effet : faire disparaître le métier de buraliste. Il faut accentuer la lutte contre la contrebande et veiller à l’uniformisation, à l’échelle européenne, du prix des paquets de cigarettes. Il me semble que vous vous y êtes engagée, madame la ministre.

J’en viens maintenant à la situation de la branche maladie. Les dispositions du PLFSS relatives à cette branche sont organisées en quatre thématiques : prévention, innovation, pertinence et qualité des soins, modernisation du financement du système de santé.

Vous abordez la question de la prévention principalement via l’extension de l’obligation vaccinale. Cette mesure fait partie des choix de société sur lesquels nous devons être particulièrement attentifs. Il existe des doutes, fondés ou non, sur la dangerosité des vaccins ou des adjuvants qu’ils contiennent. Cela ne nécessiterait-il pas un état des lieux plus approfondi ? Je pense, par exemple, à la question de la vaccination des adolescents.

Un sujet qui n’apparaît pas, alors qu’il le mériterait, est celui de la médecine scolaire. Médecins et infirmières scolaires sont des rouages essentiels de la prévention. Et pourtant, depuis des années, l’État fait trop peu pour améliorer les conditions de travail de la médecine scolaire, au point que l’Académie de médecine tire la sonnette d’alarme. C’est dans ces services que peuvent être dépistés les grands problèmes de l’adolescence : addictions, obésité, troubles neuropsychiques.

Nous soutenons l’article 35 sur la mise en place d’un cadre légal permettant le déploiement d’expérimentations innovantes. Il faut encourager le décloisonnement sur le terrain, dans les départements notamment. Tel devra être le cas en matière de télémédecine, je parle ici de l’article 36 : c’est une des solutions visant à remédier à la désertification médicale. Il est urgent d’agir en la matière.

Pour conclure, sachez, madame la ministre, que les sénateurs du groupe Union Centriste abordent l’examen de ce texte de manière tout à fait positive. Nous aurons des discussions, des désaccords peut-être, mais nous partagerons le même objectif : garantir à tous l’accès à notre système de protection sociale.

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