Manifestement, cela fait rire Claude Raynal ! Est-ce si drôle que cela ?
Malgré le surcroît de charges lié à la construction d'un budget plus sincère, la hausse des dépenses en 2018 n'était pas inéluctable et trouve sa principale explication dans la mise en oeuvre d'un programme d'économies très modeste. D'après le projet de budget pour 2018, seules trois missions devraient voir leurs dépenses diminuer d'un montant supérieur à 100 millions d'euros. Les économies sont en fait ciblées sur les deux missions « Travail et Emploi » et « Cohésion des territoires » et sur la mission « Administration générale et territoriale de l'État » qui subit un effet calendaire plus qu'un véritable effort d'économies.
La masse salariale devrait connaître une nouvelle hausse en 2018, progressant de 1,6 % par rapport à la prévision d'exécution pour 2017. C'est une augmentation moins marquée que le dérapage des dépenses de personnel en 2017, dont la croissance devrait atteindre 5,8 %, un montant inédit sur les quinze dernières années. Le précédent gouvernement a en effet ouvert les vannes - Claude Raynal rit moins - alors que tous les pays faisaient un effort de maîtrise des dépenses publiques.
La hausse des dépenses de personnel résulte à hauteur de 0,3 milliard d'euros de la hausse des effectifs. Il y a eu des créations de postes liées à la sécurité, mais la progression provient également des mesures catégorielles (+ 600 millions d'euros) et du glissement-vieillesse technicité (+ 300 millions d'euros). Tous les coûts ne sont pas reportables, notamment pour le ministère de l'éducation nationale.
Par conséquent, il n'est pas impossible que la hausse des dépenses de personnel soit en réalité supérieure aux 2,1 milliards d'euros budgétés par le projet de loi de finances pour 2018. En effet, une partie des mesures décidées sous la précédente mandature se traduira en hausses budgétaires pour 2018. Lorsqu'on crée des postes de policiers, de gendarmes, de magistrats, ou de militaires, l'impact est pluriannuel et la montée en charge progressive du fait de la nécessité de former le nouveau personnel.
Cependant, la hausse de la masse salariale aurait pu être contenue grâce à un programme résolu de réduction de postes au sein de la fonction publique. Lors de la campagne présidentielle, Emmanuel Macron avait souhaité réduire le nombre d'agents publics de 120 000 emplois sur la durée du quinquennat, dont 50 000 postes dans la fonction publique d'État. Une telle diminution supposerait, si l'effort était équitablement réparti sur chacune des années de la période, une suppression nette d'environ 10 000 postes par an de 2018 à 2022.
L'exercice 2018 est très en-dessous de ce quantum puisque le solde global des créations et suppressions d'emplois devrait s'élever à seulement 1 600 emplois équivalents temps plein en 2018 dont l'impact en équivalents temps plein travaillé (ETPT) serait limité à 682 ETPT, soit moins de 2 % de l'objectif prévu sur le quinquennat.
L'effort très limité sur les effectifs de l'État en 2018 se traduit, au regard des hausses enregistrées dans le courant de l'année 2017, par une augmentation nette de 16 008 ETPT et de 8 677 ETPT hors effets de périmètre.
L'impact de l'extension en année pleine des schémas d'emploi de 2017 est particulièrement marqué pour le ministère de l'éducation nationale, avec une hausse de 7 774 ETPT. Il est également significatif pour le ministère de la justice (+ 1 119 ETPT) et celui des armées (+ 783 ETPT).
Au total, le budget 2018 présente de réels motifs de satisfaction - en particulier concernant l'amélioration de la sincérité de la budgétisation initiale - mais aussi des carences substantielles : un plan d'économies modeste, des baisses d'impôt dont l'effet réel sur le pouvoir d'achat des ménages reste à démontrer, un déficit fortement dégradé, sans parler du contentieux sur la taxe de 3 %.
Enfin, il convient de mentionner le « Grand plan d'investissement » (GPI), lancé par le Gouvernement, avec de grandes ambitions affichées mais des moyens finalement assez limités. Sur les 57 milliards d'euros affichés, figurent en effet 10 milliards d'euros qui correspondent en réalité au « recyclage » du PIA 3 et 12 milliards d'euros à des redéploiements de crédits déjà existants.
En outre, une partie des initiatives annoncées ne fait finalement que prolonger des dispositifs déjà existants, tout en leur donnant effectivement les moyens de se poursuivre. S'agissant du projet de loi de finances pour 2018, certains crédits sont simplement labellisés GPI mais n'ont finalement rien de différent de ce qu'ils étaient auparavant, par exemple les crédits de fonctionnement du secrétariat général pour la modernisation de l'action publique.