Intervention de Albéric de Montgolfier

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 8 novembre 2017 à 9h05
Projet de loi de finances pour 2018 — Examen des principaux éléments de l'équilibre sur le projet de loi de finances pour 2018 - tome i du rapport général

Photo de Albéric de MontgolfierAlbéric de Montgolfier, rapporteur général :

Certains ont exprimé des frustrations. Je précise que nous n'en sommes pas encore à l'examen des articles fiscaux de première partie de la loi de finances. Nous sommes ici sur le cadrage macroéconomique.

J'éprouve comme vous les plus grands doutes sur la capacité des collectivités territoriales à réaliser les économies ambitieuses qui leur sont demandées, d'autant qu'un certain nombre de mesures nationales impactant leurs budgets ont été annoncées. Les objectifs sont donc ambitieux et le mécanisme de contractualisation est plus que flou.

Sur le cadrage macroéconomique, je maintiens mes propos. Les doutes que nous avons émis sur le précédent budget tenaient au fait que les hypothèses retenues n'étaient pas conformes à celles des différents économistes. Il y avait également une sous-budgétisation chronique et répétée. Le Gouvernement a d'ailleurs dû prendre des mesures d'urgence. Il existait donc des éléments d'insincérité, comme l'a souligné la Cour des comptes. Aujourd'hui, tout cela a été corrigé.

Le Gouvernement ne profite pas de cette embellie. Quoi qu'il en soit, il a raison de ne pas repousser les mesures fiscales en fin de quinquennat. Il est important de ne pas attendre pour engager les baisses d'impôts.

En revanche, comme vous, je regrette le manque d'ambition en matière de maîtrise de la dépense. Il y a peu de réformes structurelles. Je pense, par exemple, au temps de travail dans la fonction publique. La Cour des comptes a établi que seuls 400 000 fonctionnaires, sur les 2 millions que compte l'État, travaillaient 1 607 heures. S'ils travaillaient tous 1 607 heures, cela ferait des gains considérables ! Notre commission avait adopté à mon initiative en novembre 2015 un amendement pour que les fonctionnaires travaillent 37,5 heures par semaine. Quelle horreur ! Pourtant, la Cour des comptes chiffrait cette économie à 5 milliards d'euros.

Je répondrai à mon collègue de l'Ardèche que ce n'est pas dans les territoires que se pose le problème de l'évolution de la fonction publique. Pensez-vous que la France est mieux administrée avec les ARS, les agences de bassins et les opérateurs de l'État qui ne maîtrisent ni les plafonds d'emplois ni les ratios de mètres carrés ? La création des DREAL est-elle un progrès ? Aujourd'hui, les préfets sont déresponsabilisés. Nous assistons à une sorte d'atomisation.

En ce qui concerne les missions de l'État, les conséquences de la décentralisation n'ont pas été tirées. L'État doit-il encore gérer les routes ? Sommes-nous satisfaits de l'existence des directions interdépartementales des routes ? L'État doit-il intervenir aux côtés des départements sur le handicap ? Il existe aujourd'hui un certain nombre de doublons.

Gérard Longuet a parlé de l'enseignement. Nous entendrons le ministre cet après-midi. Nous proposons de multiples options dans le secondaire alors que nous accusons du retard dans le primaire. Notre pays est-il mieux administré qu'il y a vingt ans ou que les pays voisins ? Nous consacrons 2 points de plus de PIB que l'Allemagne à la fonction publique et 4 points de plus aux retraites. Faisons-nous mieux que les Allemands ? Concrètement, avec moins de moyens, nous pourrions mieux administrer ce pays.

Je suis déçu qu'Éric Bocquet n'ait pas posé sa question habituelle sur le diktat des institutions européennes ! Pour parler clairement, je ne me soucie pas tant de la règle des 3 % ; ce qui m'inquiète plutôt, c'est le comparatif avec les autres pays. Savoir que nous sommes le dernier élève de la classe, que notre situation est moins bonne que celle de la Grèce, de l'Espagne, de l'Italie ou du Portugal, je me pince ! Cela signifie que les autres ont été capables de faire des efforts que nous n'avons pas encore consentis ! Aujourd'hui, tous les pays font un effort en matière de désendettement, sauf la France. La dette publique approche 100 % du PIB. Le risque de remontée des taux aux États-Unis est réel. Concrètement, en 2027, il nous faudrait trouver 17,7 milliards d'euros de plus chaque année. Ce jour-là, la France sera clairement incapable de payer.

Le meilleur ami de notre ancien Président de la République, François Hollande, je l'ai souligné, c'est la finance qui a été anesthésiante pendant cinq ans et lui a servi des taux d'intérêt bas. La France a augmenté son stock de dettes comme jamais, servie par des marchés gavés de liquidités. Rappelons que la dette est le deuxième poste du budget de l'État après l'éducation nationale, mais il pourrait devenir le premier. Nous devons nous inquiéter de laisser une telle dette à nos enfants.

Quant à la responsabilité des ministres, elle relève de la Cour de justice de la République, mais elle sera prochainement supprimée. Dans les démocraties, la meilleure des sanctions est celle des urnes. En l'occurrence, le Président de la République avait lui-même tiré les conséquences de la situation en ne se représentant pas.

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