Je souhaiterais vous faire part de cinq réflexions.
Première réflexion : je l’ai dit lundi, ce fut l’honneur de Marisol Touraine de mener avec détermination la lutte contre le tabagisme. Toutefois, le très récent Panorama Santé dressé par l’OCDE compte encore 22, 4 % de fumeurs en France, contre une moyenne de 18, 4 % dans le reste des pays. Le prix du paquet à 10 euros, une augmentation substantielle des prix – mesure que nous avions d’ailleurs recommandée dans un rapport rédigé par Catherine Deroche et moi-même – sont des moyens reconnus pour dissuader de fumer nos concitoyens, notamment les plus jeunes d’entre eux ; nous avons tous en tête les 73 000 décès par an dus au tabagisme.
Deuxième réflexion : la France dispose de frontières ouvertes avec des pays qui jouissent d’une fiscalité sur le tabac bien inférieure à la nôtre. Baisse des ventes chez les buralistes ne signifie donc pas baisse de la consommation. Celle-ci s’explique aussi par le déport de l’achat de tabac du circuit officiel vers le marché noir ou, dans les départements frontaliers, vers des achats légaux à l’étranger. Le marché parallèle représente, selon le chiffre des douanes, 27 % du tabac consommé en France. Il serait impératif d’accélérer l’harmonisation fiscale européenne, mais les intérêts des pays sont très divergents. En revanche, la traçabilité des cigarettes de l’usine de fabrication jusqu’à la vente au consommateur final doit être mise en place. C’était un objectif du protocole de l’Organisation mondiale de la santé, l’OMS, pour éliminer le commerce illicite des produits du tabac, protocole adopté en 2012 à Séoul et élaboré avec le concours de 180 pays.
La hausse du prix du tabac doit être assortie d’un plan de lutte contre le marché parallèle, en liaison avec la gendarmerie, la douane, la police et la justice, sans oublier le contrôle des ventes sur internet. Aujourd’hui, en deux clics, me dit-on, il est possible de se faire livrer chez soi des cartouches de cigarettes de l’ancienne marque au paquet rouge.
Troisième réflexion : quelle place, quel rôle éventuel pour la cigarette électronique ? La vapoteuse ne peut-elle pas être envisagée comme un moyen d’arrêt du tabac ?
Quatrième réflexion : les mesures de prévention mises en place doivent être inventives, notamment en direction des jeunes. Là encore, il faut avoir les chiffres en tête : avec 40 % de fumeurs réguliers chez les 16-25 ans et 19 % chez les adolescents, la France est gravement touchée par ce problème du tabagisme des jeunes.
Cinquième et dernière réflexion – monsieur le président, je termine – : quelle diversification, quel avenir pour les 24 000 buralistes en France, dont 43 % sont implantés dans des communes de moins de 3 500 habitants ? Ils constituent encore ce qui est parfois l’un des derniers lieux de vie et de rencontre dans de nombreux villages et petites villes.