La commission est défavorable à l’ensemble des amendements, que ceux-ci portent sur le conventionnement sélectif conditionné au départ à la retraite d’un médecin ou sur l’expérimentation.
Lors de précédents débats, notamment lors de l’examen de la loi Santé et des précédentes lois de financement de la sécurité sociale, la commission s’était opposée à l’instauration d’un conventionnement sélectif, que rejette le corps médical, notamment les internes et les jeunes médecins.
La MECSS a conduit au premier semestre une mission sur les dispositifs incitatifs en faveur de l’offre de soins dans les zones sous-dotées. Le rapport de nos collègues Jean-Noël Cardoux et Yves Daudigny, publié en juillet 2017, avance de nombreuses propositions pour agir plus vite et plus efficacement, mais confirme la position de la commission à ce sujet : sans négociation avec les professionnels de santé concernés et sans leur assentiment, une évolution de cette nature pourrait être inefficace au regard des enjeux des zones sous-dotées. En effet, ce dispositif pourrait détourner de jeunes médecins de l’exercice en libéral, voire de l’exercice de la médecine tout court. En outre, l’instauration du principe « une installation pour un départ » dans les zones surdotées n’apporte nullement la garantie d’un rééquilibrage géographique de l’offre de soins au profit des zones sous-dotées.
Le conventionnement sélectif a été mis en place avec l’accord de la profession pour les infirmiers, dans un contexte démographique très différent de celui des médecins – ces professionnels étaient en surnombre, ce qui n’est pas le cas des médecins. Or on constate des effets de contournement, avec des installations à la lisière des zones dites « surdenses » et un impact finalement assez limité sur les zones les plus fragiles en termes d’accès aux soins. Cela a également été constaté lors de la mise en place de cette mesure en Allemagne, comme l’a souligné un rapport publié l’an dernier par le rapporteur général et Yves Daudigny.
Bien sûr, cette question de l’accès aux soins, invoquée sur toutes les travées de cet hémicycle, est cruciale et suscite des inquiétudes fortes parmi les élus. Par exemple, en région Pays de la Loire, une enquête sur la ruralité a révélé que, après l’accès au numérique, l’accès aux soins était le deuxième sujet de préoccupation des élus, même si les problèmes de démographie médicale et d’installation ne touchent pas que les zones rurales. Certaines d’entre elles se sont organisées : c’est le cas du département de la Mayenne, qui a créé un pôle de santé en milieu hyper-rural, qui fonctionne remarquablement bien – Mme la ministre s’y est d’ailleurs rendue –, avec une prise en compte de la situation de l’ensemble des professionnels de santé – médicaux et paramédicaux –, qui se sont organisés autour d’un vrai projet de santé de territoire.
Les zones périurbaines ou certains quartiers de ville sont aussi concernés, et le problème touche à la fois la médecine libérale et la médecine salariée. Actuellement, un centre de santé au Mans – qui n’est pas une ville totalement paumée en pleine campagne, elle est même plutôt proche de Paris – n’arrive pas à recruter un médecin salarié.
Le problème est donc beaucoup plus complexe, et il n’y a pas de solutions miracle. Dans le plan qu’a présenté Mme la ministre dans le cadre de sa stratégie d’accès aux soins, c’est la multitude des mesures prévues qui permettra d’apporter une solution, notamment le développement des maisons de santé pluriprofessionnelles ou des centres de santé, car, dans certains territoires, l’exercice de la médecine salariée correspond le mieux à la situation. Ces maisons de santé ne doivent pas se résumer à des murs. Beaucoup d’élus construisent de beaux centres de santé en se disant que les médecins viendront, mais qui restent des coquilles vides.