Ce document présente la quasi-totalité de l’effort budgétaire et financier consacré par l’État aux territoires ultramarins. Cet effort, il faut le préciser, correspond à 3, 9 % du budget général, alors que les populations ultramarines représentent 4, 3 % de la population nationale, même s’il est indiqué dans le document de politique transversale que les crédits inscrits ne traduisent pas le « coût des outre-mer », mais la mise en œuvre budgétaire des politiques publiques conduites par l’État pour ces territoires.
La hausse de 1, 26 % de ce budget par rapport aux exercices précédents s’inscrit dans une certaine continuité, en dépit d’une situation financière nationale toujours contrainte.
Ce budget se présente comme un budget de responsabilité au regard de la priorité donnée au Gouvernement de rétablir les comptes publics de la France, mais surtout comme un budget de transition pour les territoires ultramarins, dans la perspective des Assises des outre-mer. Le Gouvernement s’est en effet engagé à s’appuyer, pour les prochains projets de loi de finances, sur le Livre bleu outre-mer, qui résultera des Assises des outre-mer, lancées en octobre 2017 et devant s’achever au printemps de 2018.
Monsieur le secrétaire d’État, les Ultramarins auront-ils la patience d’attendre demain, alors que la situation est aujourd’hui plus qu’alarmante ? Tous les voyants sont au rouge : emploi, insécurité, immigration, éducation, finances locales, pour ne citer que ces domaines.
Les maires des communes d’outre-mer que j’ai rencontrés au congrès des maires sont tous en ébullition. Les socio-professionnels sont excédés, confrontés à une chute de leurs commandes et à des grèves qui se multiplient. Tous exhortent le Gouvernement à agir urgemment, évoquant le risque d’explosion sociale, les événements de Guyane de mars et avril derniers étant encore dans toutes les mémoires.
Je sais le Président de la République très attentif et conscient des enjeux. Il a l’expérience de ces dossiers. Pour autant, monsieur le secrétaire d’État, il y a urgence à agir dès ce budget pour 2018 en envoyant des signes positifs sur des sujets très sensibles.
Je pense aux accords de Guyane, qui manquent de visibilité dans ce budget, notamment le plan d’urgence qui semble avancer le frein à main tiré.
Je pense aussi à la suppression brutale des contrats aidés, sujet unanime de mécontentement dans les outre-mer. Il semblerait que des dispositions particulières pour ces territoires soient prises, mais elles mériteraient d’être davantage mises en lumière.
Je pense encore aux dispositions d’incitation fiscale à l’investissement productif et dans le secteur du logement. Un moratoire sur la défiscalisation, en attendant d’aller plus loin, serait bienvenu.
Le CICE outre-mer, porté à 9 %, est également un sujet sensible. Pourquoi ne serait-il pas maintenu ?
La baisse de plus de 8 % des crédits affectés au logement est un autre sujet sensible, de même que la baisse des crédits affectés à la mobilité, à la continuité territoriale.
Je pense enfin aux finances locales : la Cour des comptes a elle-même constaté, dans son dernier rapport d’octobre 2017, que le système de péréquation actuel était défavorable aux communes d’outre-mer.
Sur ces différents points, je proposerai des amendements visant à offrir des opportunités de plus grande adaptation de ce budget à nos réalités ultramarines. J’espère que vous leur donnerez une suite favorable.
Pour terminer, à la lumière de toutes les difficultés que vous rencontrez pour faire rentrer dans ce budget les attentes des populations ultramarines, je veux insister sur la nécessité d’instaurer dans nos territoires la responsabilité d’un réel développement propre, de façon à sortir de cette dépendance budgétaire que vous-même vous ne souhaitez pas non plus.
La croissance par les transferts publics a atteint ses limites. Le Président de la République lui-même veut donner une nouvelle marque, un nouveau souffle aux politiques publiques. Ce qui vaut pour la France doit aussi pouvoir servir d’objectif à la réflexion des outre-mer sur leur avenir – les moyens ne pouvant évidemment être identiques.
Les outre-mer doivent sortir par leurs propres moyens de l’économie de transfert. Le développement endogène devient une nécessité urgente. Nous devons penser notre développement en fonction de nos réalités, de notre environnement complexe, de nos caractéristiques mentales et sociales propres. Il ne saurait y avoir d’égalité réelle sans émancipation réelle, pour reprendre les mots de notre collègue député Serge Letchimy.