Nous voterons cette motion tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité.
Le motif principal d’inconstitutionnalité réside dans la loi précédente, mais est encore élargi par ce texte, dont l’objectif principal est de permettre l’application de la loi relative à la rétention de sûreté et à la déclaration d’irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental de façon immédiate, puisque celle-ci n’aurait d’effet que dans un très grand nombre d’années.
Or la rétention de sûreté est une peine – nous pouvons tourner autour du pot, si vous m’autorisez cette expression, mais, dans la mesure où elle est décidée par le juge, c’est bien de cela qu’il s’agit – qui rétablit de fait la perpétuité.
Évidemment, elle se distingue de l’internement psychiatrique. Il est inutile de revenir sur ce débat qui a déjà eu lieu. Toutefois, il nous faut constater que le problème de la définition des troubles de la personnalité demeure. Le législateur n’en est pas responsable, cela tient sans doute aux incertitudes de la psychiatrie.
Toujours est-il que, par des glissements successifs, on en vient à officialiser le rétablissement de la perpétuité, de la relégation définitive ou de la mort sociale, peu importe comment on l’appelle. C’est très grave, notamment au regard des principes fondamentaux de notre droit qui sont rappelés dans la Constitution.
Madame la garde des sceaux, vous avez affirmé que les arguments que j’avais faits valoir étaient des contrevérités. Pour qu’il soit inscrit au Journal officiel que vous m’avez à tort taxée de menteuse, je rappelle avoir fait remarquer que, en moins de trente ans, la population carcérale avait doublé. Et même si elle a baissé légèrement récemment, cela ne change strictement rien à cette réalité, qui fonde toute mon argumentation. Pour ma part, je continue de penser qu’il n’existe pas de lien direct entre l’aggravation de la loi pénale et les évolutions de la criminalité. Évidemment, à cette question de fond, vous ne répondez pas !
Par ailleurs, je ne nie pas que les intentions de soins en milieu carcéral existent – c’est d’ailleurs sur ce point que le rapporteur m’a répondu –, mais, dans ce domaine comme en amour, seuls les actes comptent. Ainsi, Francis Évrard, le meurtrier du petit Enis, a passé trente-deux ans en prison sans soins ni suivi psychiatrique !
Voilà qui doit nous conduire à réfléchir à l’applicabilité et à l’application des lois que nous votons et non à nous conduire comme des girouettes élaborant sans cesse des textes tendant à confirmer ou à aggraver les lois que nous avons déjà adoptées !