Intervention de Philippe Paul

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 29 novembre 2017 à 9h35
Projet de loi de finances pour 2018 — Mission « sécurités » - programme 152 « gendarmerie nationale » - examen du rapport pour avis

Photo de Philippe PaulPhilippe Paul, co-rapporteur :

Monsieur le Président, mes chers collègues, je voudrais d'abord évoquer brièvement les principaux axes du projet de loi de finances pour 2018 en ce qui concerne le programme 152 « Gendarmerie nationale », avant de présenter quelques sujets de préoccupation.

Il s'agit globalement d'un budget stable, en continuité avec le précédent. Le montant prévisionnel des crédits de paiement s'élève ainsi à 8,7 milliards d'euros, soit une augmentation modérée de 50 millions d'euros ou 0,56%. De même, la croissance des effectifs est comparable à celle de l'année dernière : environ 500 emplois supplémentaires dans le cadre d'un « Plan de renforcement des forces de sécurité intérieure » annoncé par le Président de la République, plan qui prévoit la création de 10 000 emplois nouveaux au sein des forces de police et de gendarmerie sur la période 2018-2022, dont 2 500 emplois pour la gendarmerie nationale.

Les crédits de personnels ne progresseront que faiblement en 2018, de l'ordre de 0,5 %, du fait de la modération du nombre de nouveaux emplois créés en 2017, d'un glissement vieillesse-technicité à l'effet globalement négatif ainsi que du gel du point d'indice de la fonction publique en 2018. Malgré cette modération, les dépenses de personnel représentent toujours plus de 84 % des dépenses totales du programme, alors que cette proportion était de moins de 80 % il y a un peu plus de dix ans. Sur le long terme, cette évolution peut préoccuper si l'on considère la diminution progressive de la proportion des dépenses de fonctionnement, qui contribuent à rendre les gendarmes efficaces dans l'accomplissement de leurs missions, et des dépenses d'investissement, qui préparent l'avenir.

En ce qui concerne les crédits de fonctionnement, le projet de loi de finances (PLF) pour 2018 prévoit ainsi une diminution de 51 millions d'euros en crédits de paiement. Cette baisse, qui touche les dépenses d'habillement, de protection et d'équipements informatiques et de communication, s'explique toutefois principalement par la fin des plans gouvernementaux des années précédentes. En revanche, les dépenses de fonctionnement courant, qui financent la vie quotidienne des brigades, évoluent peu, se stabilisant à un niveau, il est vrai, assez bas.

Au total, les crédits de fonctionnement doivent donc permettre de reconduire les dépenses courantes à un niveau sensiblement identique à celui de l'année dernière. En matière d'informatique en particulier, une enveloppe de 9,6 millions d'euros est prévue pour reconduire la location des tablettes et smartphones NEOGEND qui permettent désormais aux gendarmes d'accéder à tous les logiciels nécessaires sur le terrain.

En matière d'investissements, les crédits permettront de financer la quatrième année du plan de réhabilitation de l'immobilier domanial, avec la rénovation de 5 900 logements. Au total, l'importante augmentation affichée par rapport à 2017 pour ces crédits d'investissement est en réalité due pour une large part aux restes à payer sur les programmes de réhabilitation des années précédentes.

J'aborderai, à présent, quelques sujets de préoccupation. Tout d'abord, le vieillissement des matériels. En 2018, le budget consacré au renouvellement automobile devrait se monter à 70 millions d'euros d'autorisations d'engagement (AE) et 61 millions d'euros en crédits de paiement (CP). Ceci devrait permettre de renouveler un peu moins de 3 000 véhicules. C'est tout juste suffisant. La direction générale met en avant une légère diminution du kilométrage moyen, mais certains véhicules sont entretenus jusqu'à des kilométrages énormes. En outre les voitures sont souvent utilisées pour faire des barrages routiers et peuvent être fortement endommagées par des conducteurs en fuite : récemment encore, pas moins de huit véhicules ont été mis hors d'usage à l'occasion d'un tel barrage !

Par ailleurs, s'agissant des véhicules lourds, la capacité blindée de la gendarmerie nécessite 90 véhicules. Actuellement, il reste 71 véhicules blindés à roues de la gendarmerie (VBRG), qui datent de 1974, complétés par 20 véhicules de l'avant blindé (VAB), rachetés à l'armée de Terre lors de l'engagement en Afghanistan. Actuellement, les VBRG ne sont maintenus opérationnels que grâce à la « cannibalisation » des matériels de réforme. Or, ils sont actuellement très sollicités. À la mi-2017, 38 étaient déployés Outre-mer et des renforts importants vont être envoyés en Nouvelle-Calédonie à l'occasion du futur référendum en 2018. Le coût estimé pour le remplacement de ces véhicules vieillissants serait d'environ 45 millions d'euros, à quoi il faudrait ajouter le maintien en condition opérationnelle. Je pense qu'il faudra prochainement envisager cette dépense.

S'agissant des hélicoptères, la gendarmerie dispose de 15 EC 145 et de 15 EC 135 biturbines, dont la moyenne d'âge -respectivement de 12 et 6 ans - est satisfaisante, mais aussi de 26 hélicoptères AS 350 « Écureuils » monoturbines qui affichent un âge moyen de 32 ans. Pour l'instant, cette flotte a un bon taux de disponibilité grâce au soutien de la structure intégrée du maintien en condition opérationnelle des matériels aéronautiques du ministère de la Défense (SIMMAD). Toutefois, les écureuils sont vraiment vieillissants ; le premier ayant été livré en 1978. Or, il n'est pas envisagé de solution de remplacement pour le moment. Renouveler les 10 AC 350 les plus obsolètes représenterait un coût d'environ 140 millions d'euros, plus 6,5 millions par an de MCO.

Dernier point d'inquiétude sur le matériel : les moyens de projection du GIGN. Celui-ci peut en effet se transporter sur ses lieux d'intervention grâce au groupement interarmées d'hélicoptères (GIH), créé en 2006, organisme à vocation interarmées basé à Villacoublay qui relève du commandement des opérations spéciales pour l'emploi et reçoit des personnels et des matériels de l'armée de terre et de l'armée de l'air. Le GIH a pour mission l'appui des opérations du GIGN mais aussi du RAID.

Les hélicoptères du GIH sont des vieux PUMA de l'armée de l'air et de l'armée de terre, au nombre de sept, dont 2 en alerte immédiate 24/24, qui ne devraient pas voler au-delà de 2020. Cela pose de manière urgente la question de leur renouvellement. Je rappelle que la première mission du GIH est de permettre la projection du GIGN sur les centrales électriques nucléaires en cas d'attaque de ces installations. C'est donc un sujet important que nous devrons sans doute traiter dans la LPM. Le montant pour renouveler la flotte en replaçant les engins actuels par 4 hélicoptères de transport « moyen », de type « CARACAL », serait d'environ 125 millions d'euros pour l'acquisition, puis 10 millions d'euros par an pour leur MCO.

Tels sont, mes chers collègues, les principaux points que je voulais souligner concernant le budget présenté par le Gouvernement pour la gendarmerie nationale. Il n'en demeure pas moins que ce budget me semble globalement satisfaisant, même s'il faudra sans doute faire un effort supplémentaire dans les prochains exercices pour assurer une remontée plus forte des moyens de fonctionnement et des moyens mobiles. Sous ces réserves, je vous propose de donner un avis favorable Aux crédits du programme Gendarmerie inscrits au PLF 2018.

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