Monsieur le Président, mes chers collègues, dans le projet de loi de finances pour 2018, les ressources publiques allouées aux sociétés nationales de programme et à l'INA s'élèvent à 3,816 milliards d'euros, soit une baisse de 1 % par rapport à 2017. C'est la conséquence de la réduction d'environ 80 millions d'euros de la part du produit de la taxe sur les services fournis par les opérateurs de communications électroniques (TOCE) affectée au financement de l'audiovisuel public, que ne compense pas la progression du produit attendu de la redevance, estimé à hauteur de 42,9 millions d'euros. Le taux de la redevance augmente de 1 €, mais son assiette, compte tenu des nouveaux usages - TV sur internet ou sur mobile -, progresse moins que par le passé. Il serait utile de réfléchir à une évolution de l'assiette de la redevance englobant les nouveaux supports.
Les opérateurs de l'audiovisuel extérieur ne reçoivent que 8,78 % de cette masse, France Médias Monde : 257,8 millions d'euros (HT) et TV5Monde : 77,4 millions d'euros ; soit une progression de 6,2 millions d'euros - en hausse de 2,5 % - pour FMM, mais une insuffisance de financement par rapport au contrat d'objectifs et de moyens 2016-2020 adopté au début de l'année, et une baisse de 1 million d'euros - soit -1,3 % - pour TV5 Monde.
Cet arbitrage connu au dernier moment, à la fin du mois de septembre, crée de sérieuses difficultés pour l'un et l'autre des opérateurs de l'audiovisuel extérieur sur une scène mondiale marquée par l'intensification de la concurrence, la révolution numérique et les évolutions technologiques, et sur laquelle les grandes puissances renforcent leurs moyens d'action, au service de stratégies d'influence, dont l'objectif n'est pas nécessairement l'exposé d'une information fiable et objective et l'expression de la pluralité des opinions. Nous entrons, nous l'avons vu avec la campagne américaine, mais aussi avec les groupes terroristes, dans l'ère des luttes informationnelles, notamment dans l'espace numérique.
La couverture de France 24 atteint 333 millions de foyers. L'audience de ces différents médias - France 24, RFI et MCD - atteint 104 millions de personnes par semaine, pour plus de la moitié en Afrique francophone - soit 55,8 millions de personnes - et pour un peu plus du quart en Afrique du Nord-Moyen-Orient - soit 26,7 millions de personnes. S'agissant des environnements numériques, ils enregistrent 31,3 millions de visites hebdomadaires. Le groupe compte 36 millions d'abonnés sur Facebook et plus de 16 millions sur Twitter. France Médias Monde a conclu avec l'État un contrat d'objectifs et de moyens 2016-2020, dont les principaux axes de développement sont l'enrichissement des grilles de programme avec l'ouverture d'un service en espagnol depuis le 26 septembre dernier - ce qui représente un coût en année pleine de 7,3 millions d'euros -, l'adaptation aux évolutions des modes de diffusion - TNT en Afrique et HD - et à la révolution numérique ainsi que le renforcement des actions de marketing et de communication, ce qui est d'autant plus nécessaire que le réseau des attachés linguistiques et audiovisuels s'est considérablement affaibli.
Pour financer ces priorités stratégiques dans un cadre financier durablement équilibré, la société devait bénéficier d'une augmentation de sa dotation publique de 8,2 millions d'euros en 2018 - dont 4,4 millions d'euros pour le programme en espagnol - et elle s'est engagée à maîtriser l'évolution de ses charges. En 2017, premier exercice effectif de mise en oeuvre du COM, l'État a tenu ses engagements et FMM a pu consolider son offre éditoriale et lancer France 24 en espagnol. L'exercice s'avèrera beaucoup plus difficile en 2018. Certes, la dotation progresse par rapport à 2017, mais de façon insuffisante pour poursuivre la mise en oeuvre des objectifs du COM d'autant qu'une mauvaise nouvelle n'arrivant jamais seule, la régie publicitaire de France 24 - France Télévisions Publicité - a surestimé ses prévisions de 700 000 euros et que s'imposent dans la relation avec les pigistes les termes d'un accord négocié par Radio France et France Télévisions, qui renchérit de 500 000 euros les coûts de production. Comme les marges de réduction des coûts de fonctionnement sont largement épuisées, la société a conduit deux plans de départs volontaires, le dernier en 2011, et conclu de nombreux accords sur les modalités et le temps de travail, permettant ainsi une meilleure productivité.
FMM ne pourra maintenir l'équilibre de ces comptes sans amputer une partie de sa diffusion. Plusieurs pistes ont été explorées : la suppression de la diffusion en Afrique de l'Est en swahili - solution qui ne recueille pas l'approbation du ministère des affaires étrangères - ou encore, compte tenu de l'échéance de contrats, l'abandon de la diffusion aux États-Unis -à Los Angeles et à New-York-, ainsi qu'en Scandinavie. Ce sont là des positions qu'il serait très difficile de reconquérir par la suite.
Les efforts engagés par FMM risquent donc d'être interrompus dans leur élan dès la première année d'exécution du COM et dans un contexte international où, nous semble-t-il nous devrions soutenir l'action de nos médias extérieurs. C'est pourquoi, Raymond Vall et moi-même, nous vous proposerons un amendement permettant de corriger cette situation, à l'instar de ce que propose d'ailleurs la commission des finances.