La situation en Guadeloupe est similaire à ce qu'a décrit ma collègue de La Réunion.
En Guadeloupe, les hommes ont longtemps considéré qu'ils étaient propriétaires de leur femme, comme en témoigne l'anecdote suivante : je n'ai appris le prénom de l'une de mes tantes que le jour de ses obsèques car, au cours de sa vie, elle n'était connue que sous la dénomination de « tante Serge », la coutume voulant que la femme prenne le prénom de son époux : Mme Auguste, Mme Gaston... Je pense que c'est une tradition que n'accepteraient plus les jeunes générations.
À cette époque, beaucoup de femmes confrontées à la violence de leur conjoint ne trouvaient nul réconfort auprès de leurs parents et notamment de leur mère, qui les renvoyaient à leur foyer violent.
Même si cela a aussi changé, beaucoup de femmes meurent encore sous les coups en Guadeloupe et en Martinique ; cette violence à l'encontre des femmes existe aussi en France métropolitaine : un policier guadeloupéen y a récemment tué sa femme et plusieurs de ses enfants. Quand les femmes se rebellent contre le joug imposé par leurs hommes, ceux-ci ne l'acceptent pas et peuvent basculer dans une violence extrême.
Par ailleurs, un récent article du Quotidien du médecin mentionne que les femmes en situation précaire négligent souvent leur santé pour s'occuper de leur famille. Il y a là un vrai sujet pour la délégation.
En Guadeloupe, la lutte contre les violences faites aux femmes résiste aux alternances politiques. La déléguée départementale aux droits des femmes est ainsi restée en poste pendant vingt ans et a su décliner sur le terrain les politiques publiques de l'État, avec le concours des associations. Des dispositifs innovants ont été mis en place pour permettre l'expression des femmes dans le cadre de groupes de parole, au sein desquels hommes et femmes conversent pour exprimer leurs non-dits, poser clairement les problèmes sous-jacents à une communication insuffisante entre les sexes et aboutir à un apaisement de relations qui débouchaient auparavant trop souvent sur des violences dont les enfants étaient aussi généralement victimes.
J'ai demandé à la présidente d'une de nos associations locales d'adresser à la présidente de la délégation aux droits des femmes du Sénat une synthèse des actions qui ont été menées en Guadeloupe.
Les personnes handicapées éprouvent notamment des difficultés à accéder aux dispositifs de prévention du cancer du sein et à un suivi gynécologique, car selon leur handicap, elles ne sont pas toujours en capacité de réagir et de signaler leurs maux par elles-mêmes, demeurant alors tributaires de la bonne volonté des personnes qui les assistent.
Nous menons des actions de prévention avec le concours d'associations ou, dans un cadre intercommunal, des CISPD,6(*) au sein desquels certains bailleurs sociaux s'impliquent en nommant des référents dans les immeubles qui peuvent procéder à des signalements de familles rencontrant des difficultés ; néanmoins, des freins subsistent, des femmes restant hésitantes à faire remonter l'ensemble des informations dont elles peuvent disposer.
Souhaitons que les récentes campagnes de libération de la parole des femmes permettent à terme de surmonter ces réticences afin de nous donner les moyens d'agir.