Intervention de Pierre Ouzoulias

Commission des affaires européennes — Réunion du 30 novembre 2017 à 8h30
Agriculture et pêche — Usage du glyphosate : communication de m. pierre médevielle au nom du groupe de travail composé en outre de mm. yannick botrel pierre cuypers daniel gremillet et claude haut

Photo de Pierre OuzouliasPierre Ouzoulias :

Je voudrais réagir en tant que membre de l'OPECST. L'OPECST a été saisi par la commission des affaires européennes et la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale sur le sujet du glyphosate. L'OPECST n'a pas souhaité - et je crois que c'était sage - rendre un énième avis sur la question. Mais l'Office a estimé qu'il pouvait se pencher sur les formes de saisine des différentes instances, la façon dont elles avaient conduit leur analyse, leur méthodologie et la restitution publique.

M. Cédric Villani a très justement insisté sur le fait qu'aujourd'hui, la seule façon de protéger un avis scientifique est d'en discuter politiquement, dans un cadre transparent. C'est un avis que je partage complètement : quand on laisse la science aux seuls spécialistes et qu'on en prive d'accès les citoyens, on fragilise l'avis scientifique. C'est un point essentiel.

Deuxièmement, il a été question de la santé des agriculteurs et de celle des consommateurs, mais je n'ai pas entendu parler de la santé des sols, alors que c'est fondamental. Qu'en est-il de la composition chimique, végétale, organique d'un sol après l'utilisation de ces produits sur une longue durée ? J'ai quelques idées, que je ne livrerai pas ici, mais j'aimerais qu'on en parle. Je pense que c'est un élément qu'on oublie quelque peu dans l'analyse. L'agriculture doit aussi se préoccuper de l'entretien des sols et de leur capacité à reproduire la vie.

Troisièmement, permettez-moi, sans vouloir paraître docte, de m'exprimer ici en tant qu'historien. En effet, le domaine sur lequel je travaille traite de l'agriculture depuis le néolithique. Le modèle d'agriculture dont on parle ici est très récent dans l'histoire de l'humanité : il remonte aux années 1960-1970, et qui consiste à remplacer la main-d'oeuvre humaine par des intrants et par la mécanisation.

Je suis originaire de Haute-Corrèze : ce modèle économique a tué mon pays ! Dans mon village, lorsque j'étais enfant, il y avait trente agriculteurs. Aujourd'hui, il n'y en a plus qu'un. Demain, il n'y en aura sans doute plus du tout.

Vous dites qu'il faut absolument défendre ce modèle : je constate, pour ma part, qu'il a vidé un grand nombre de régions de leurs forces vives. Vous m'objecterez que ce sont des choses qui ne sont pas intéressantes, que les petites exploitations familiales ne sont pas rentables, qu'elles ne permettent pas d'exporter. Certes, mais cela faisait vivre le pays !

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