Intervention de Marie-Pierre Monier

Réunion du 4 décembre 2017 à 10h00
Loi de finances pour 2018 — Culture

Photo de Marie-Pierre MonierMarie-Pierre Monier :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, mon intervention portera spécifiquement sur le programme 175 « Patrimoines », dont les crédits enregistrent une baisse de 3, 95 % en autorisations d’engagement et de 0, 28 % en crédits de paiement. Même en tenant compte des transferts entrants, si l’on note une légère progression de 0, 22 % en crédits de paiement, la baisse en autorisations d’engagement est notable, de l’ordre de 3 %. En réalité, même en crédits de paiement, en euros constants, en tenant compte de l’inflation, les moyens ne progressent pas.

Derrière une volonté affichée de faire du patrimoine un axe majeur de votre politique culturelle, madame la ministre, ces chiffres nous alertent sur la réalité des moyens budgétaires que le Gouvernement a souhaité accorder à ce programme, qui demeure le parent pauvre de votre budget. C’est le seul programme de la mission qui ne bénéficie pas d’une augmentation, alors que la transmission du patrimoine aux générations futures constitue l’une de vos orientations stratégiques pour l’année à venir. Je rappelle pour mémoire que 2018 sera l’année européenne du patrimoine.

Comme l’a mis en avant notre ancien collègue Yves Dauge dans son excellent rapport intitulé Plan national en faveur des nouveaux espaces protégés, des centaines de bourgs et de villes petites ou moyennes sont en train de mourir, leurs centres historiques se vident de leurs habitants et de leurs commerces, leurs patrimoines bâtis se dégradent.

La politique patrimoniale est essentielle pour recréer de l’attractivité économique, mais aussi pour réduire la fracture territoriale entre les grandes métropoles et la France des petites villes et de la ruralité. C’est donc aussi un enjeu de cohésion sociale. Cette situation alarmante doit être renversée par une politique volontariste en mots, mais surtout en actes et sur la durée. Une revitalisation de grande ampleur est vitale pour la survie de ces territoires et de leurs centres historiques.

La loi LCAP a permis des avancées importantes avec la création des sites patrimoniaux remarquables, qui permettent de recréer des conditions d’attractivité économique et touristique, dans ces communes. Le chantier est immense, et il faut aller plus loin.

Nous nous réjouissons des quelques mesures que le Gouvernement propose pour la revitalisation de ces territoires. Je pense au fonds de 15 millions d’euros pour la restauration du patrimoine situé dans les communes de moins de 10 000 habitants ou aux 9 millions d’euros concernant la revitalisation des centres-bourgs et des petites villes. Nous ne pouvons que vous encourager en ce sens. Pour aller plus loin, je compte proposer des amendements visant à faire bénéficier ces territoires fragilisés d’une fiscalité plus incitative.

J’en viens aux autres points du programme. Nous nous inquiétons des baisses importantes sur plusieurs actions essentielles : la baisse de crédits de 10 % en autorisations d’engagement et de 2, 1 % en crédits de paiement sur l’action n° 03, Patrimoine des musées de France, tout comme celle de l’action n° 08, Acquisition et enrichissement des collections publiques, dont les crédits de paiement enregistrent une baisse de 4, 5 %. Par ailleurs, le fonds du patrimoine, qui permet d’enrichir les collections des musées de France, passe de 3, 6 millions d'euros en 2017 à 1, 09 million d'euros en 2018.

Les petits musées nationaux de province seront les premières victimes de ces coupes, madame la ministre. Où est donc la cohérence ? Ces dispositions sont en contradiction avec votre volonté de recréer de l’attractivité dans les petites villes et les centres anciens.

Les crédits destinés à l’archéologie préventive, autre action majeure pour le patrimoine, enregistrent eux aussi une baisse, de l’ordre de 1, 5 million d'euros en crédits de paiement. Cette réduction de moyens concerne les projets de centre de conservation et d’étude, les CCE, cogérés par l’État et les collectivités territoriales, qui remplacent petit à petit les dépôts archéologiques. Les CCE ont un rôle majeur en matière de conservation du patrimoine archéologique, dans le double but de favoriser la recherche et la vulgarisation des activités scientifiques de l’archéologie. Outre la plus grande accessibilité des objets issus des fouilles, ces structures sont nécessaires dans les territoires, tant pour valoriser l’histoire locale, qui constitue une forme importante de lien social, que pour contribuer à l’acceptabilité des recherches archéologiques, en particulier de l’archéologie préventive. Il s’agit donc à nouveau d’une coupe dans les moyens à destination des territoires.

Je conclurai sur l’action n° 01, Patrimoine monumental. Madame la ministre, vous mettez en avant les 5 % d’augmentation concernant l’entretien et la restauration des monuments historiques hors grands projets, dont les crédits passent de 310, 5 millions d'euros en 2017 à 326, 2 millions d'euros en 2018 en autorisations d’engagement, ce que nous saluons. Toujours est-il que, lorsque l’on regarde les chiffres en crédits de paiement – c'est-à-dire l’argent dépensé sur une année –, ceux-ci passent de 334, 4 millions d'euros en 2017 à 332, 9 millions d'euros en 2018, soit une baisse de 0, 46 %. Or, plusieurs l’ont souligné avant moi, ce secteur connaît une situation très critique depuis quinze ans. Cette baisse des crédits est donc on ne peut plus inquiétante.

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