Intervention de Roger Karoutchi

Réunion du 4 décembre 2017 à 10h00
Loi de finances pour 2018 — Compte de concours financiers : avances à l'audiovisuel public

Photo de Roger KaroutchiRoger Karoutchi :

Monsieur le président, madame la ministre de la culture, mes chers collègues, le budget qui nous préoccupe se décompose en deux parties.

La première, sur laquelle je ne m’étendrai pas, concerne le livre, l’AFP, les industries culturelles. Globalement, les crédits restent stables, aux alentours de 550 millions d'euros. Quelques difficultés subsistent cependant. Que fait-on pour les aides à la presse ? Évidemment, les aides concernant le transport, les moyens postaux diminuent, dans la mesure où, malheureusement, la presse écrite édite et vend moins. En revanche, les aides à l’innovation augmentent, ce qui est légitime.

La dette considérable de l’AFP, madame la ministre, est problématique. Elle empêche l’AFP de se moderniser, quels que soient ses efforts en matière de vidéo, d’internationalisation. L’AFP, qui est soumise à une concurrence sévère, notamment de la part de nouvelles agences russes et chinoises, ne pouvant investir massivement, se trouve en difficulté. Or les crédits prévus ne lui permettent pas de rembourser sa dette.

Le principal objet du débat porte sur le compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel public », qui représente beaucoup d’argent, soit 3, 8 milliards d'euros, les deux tiers pour France Télévisions, le reste étant réparti entre Radio France et les différentes chaînes. Ce budget suscite un vrai débat, qui ne vient pas de nous, si je puis dire.

Madame la ministre, vous avez dit que vous porteriez plainte au sujet de fuites issues de votre ministère, mais j’ai vu des propos ou des éléments attribués au Président de la République, des réformes envisagées. On nous annonce un texte global en 2018, avec, d’après ce que j’ai compris de nos interlocuteurs, une vraie réforme. Une société holding sera-t-elle créée ? Couvrira-t-elle l’ensemble du secteur ? Quel est le périmètre le plus adapté à l’audiovisuel public ? Est-ce le périmètre actuel ? Faut-il autant, plus, ou moins de chaînes ? Les avis sont partagés, mais même l’État, aujourd'hui, se pose des questions sur le financement, le périmètre et peut-être même sur la définition des missions par rapport au public. L’audiovisuel public, c’est la République. Dès lors, il est normal d’en débattre au Parlement, au Gouvernement, avec les personnels de France Télévisions, naturellement, mais aussi avec l’ensemble des Français.

Or je dois dire que, pour un budget aussi élevé, on ne distingue guère de ligne directrice. Le budget pour 2018 de France Télévisions, à qui l’on demande de réaliser des économies de structures, baisse en gros de 30 millions d'euros. On ajoute ici ou là quelques euros, mais, dans le fond, on a l’impression que le budget pour 2018 est un budget d’attente : avant la réforme d’ampleur attendue, espérée ou crainte, on ne touche pas trop aux équilibres. Pourtant, il va bien falloir y toucher, madame la ministre, parce que nous ne pouvons pas attribuer des missions sans mettre en regard les budgets importants attendus.

Que faut-il faire ? J’entends un certain nombre de propositions auxquelles je ne suis pas opposé. Je l’ai d'ailleurs dit à la présidente de France Télévisions, je ne suis pas du tout opposé à la réflexion sur l’ouverture à la publicité entre vingt heures trente et vingt et une heures. Deux tranches de publicité rapporteraient à peu près 50 millions d'euros.

Dans le même temps, le problème n’est pas seulement financier. Avant de chercher à obtenir 20 millions, 50 millions d'euros supplémentaires, il faut d’abord se demander ce qu’est le service public. Combien de chaînes, quel objectif, quelle organisation ? Privilégie-t-on les programmes, les frais de structures, la production ?

On nous explique que le service public veut internaliser à nouveau une partie des productions, tout en reconnaissant que cela coûte beaucoup plus cher qu’en externe. Alors, comment fait-on ? Il y a la volonté, l’espoir, les souhaits des sociétés de télévision, mais aussi les réalités financières. Lorsque j’entends dire qu’il faudrait imaginer une redevance universelle et automatique sur tous les supports – y compris les tablettes, les portables, etc. -, je ne suis pas d’accord. Ce serait un signal plutôt désastreux à l’égard des jeunes, et quiconque achète un portable ou une tablette ne regarde pas forcément France Télévisions dessus. Il ne faut pas que cela devienne automatique.

Madame la ministre, pourriez-vous nous en dire plus sur les axes de réflexion du Gouvernement concernant la réforme envisagée en 2018 ? Quelles seront les conséquences à la fois sur le périmètre et sur les missions, qui sont devenues floues au fil du temps dans leur application réelle ? Qu’est-ce que le service public de l’audiovisuel ? Doit-on trouver d’autres moyens de financement ? Ouvre-t-on à la publicité entre 20 heures 30 et 21 heures ? Je vous le dis d’emblée, je m’opposerai à une redevance universelle. Peut-être convient-il de réorganiser le service public de l’audiovisuel pour permettre de satisfaire, dans le cadre financier actuel, les sociétés de télévision, tous ceux qui y travaillent et l’ensemble des Français.

Au-delà des problèmes de crédits, c’est surtout la question de la volonté politique du Gouvernement en matière d’audiovisuel public qui se pose aujourd'hui.

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