Intervention de Jean-Pierre Leleux

Réunion du 4 décembre 2017 à 10h00
Loi de finances pour 2018 — Compte de concours financiers : avances à l'audiovisuel public

Photo de Jean-Pierre LeleuxJean-Pierre Leleux :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, notre éminent collègue rapporteur spécial Roger Karoutchi a raison de souligner que l’audiovisuel public se situe dans une phase intermédiaire, entre une période où il s’est passé relativement peu de choses et une période où nous attendons de grands changements.

Sur les autres points, je me permettrai d’apporter quelques nuances, la position de la commission de la culture se distinguant de celle de la commission des finances sur l’analyse des crédits consacrés à l’audiovisuel dans ce projet de loi de finances.

Au chapitre des satisfactions, il y a l’ambition que vous portez, madame la ministre, avec le chef de l’État et le Premier ministre, de mettre à plat ce secteur de l’audiovisuel pour tenir compte de l’évolution des usages et de la nécessité de mieux veiller à l’utilisation de l’argent public. Les efforts demandés à France Télévisions en sont l’incarnation la plus frappante dans ce budget, mais nous nous félicitons, dans ce contexte, qu’ARTE et France Médias Monde voient leurs moyens préservés, de même que l’INA et TV5 Monde.

Au chapitre des déceptions, il y a sans doute Radio France : la situation du chantier reste très préoccupante, et nous attendons avec impatience le rapport de M. Weiss pour y voir plus clair. Était-il, dans ces conditions, justifié de préserver Radio France, qui bénéficie d’une hausse sensible de sa dotation de fonctionnement, alors même que les réformes se font attendre ?

Notre principal regret tient sans doute à l’absence de préavis qui a accompagné la remise en cause des moyens de l’audiovisuel public. Comme si les impératifs budgétaires avaient primé les considérations culturelles et sur la cohérence d’une politique de l’audiovisuel.

Ce regret ne remet pas en cause l’avis favorable que notre commission a donné aux crédits de l’audiovisuel, car il nous semblait essentiel de vous envoyer un message d’encouragement pour que la réforme de l’audiovisuel soit la plus ambitieuse possible.

Permettez-moi de rappeler les quatre conditions de succès de cette réforme.

Premièrement, l’urgence est de renforcer la légitimité du service public et, M. le rapporteur spécial l’a évoqué, l’attachement que doit porter la population à l’audiovisuel public, ce qui est loin d’être garanti aujourd'hui. Celle-ci passe par la spécificité de ses contenus et l’indépendance à l’égard des annonceurs.

Deuxièmement, les mutualisations doivent être plus radicales que les pistes énoncées par les chaînes : rapprochement des rédactions, fusion des services support, diminution des masses salariales, développement des plateformes numériques communes, remise en cause de certains services… Seul l’actionnaire a l’autorité de fixer une feuille de route claire à des entreprises qui ont pris goût à une certaine forme d’autogestion et à une hausse continue de leurs moyens.

Troisièmement, cette feuille de route doit être portée par un leadership fort. La nomination d’un patron commun à France Télévisions et à Radio France pourrait constituer une première étape.

Enfin, quatrièmement, s'agissant de la révolution numérique, nos sociétés publiques n’ont pas la taille critique ni l’expertise pour mener les investissements nécessaires. Avec le changement de modèle marqué par la délinéarisation, l’État sera bientôt propriétaire de quatre petites sociétés produisant des contenus audiovisuels diffusés d’abord sur internet. Le regroupement doit permettre de financer des contenus d’avenir au lieu d’entretenir des structures du passé.

Il y a urgence à changer de modèle.

Nous soutiendrons donc ce budget constituant la première étape d’une réforme systémique qui doit trouver son aboutissement dans une réforme de la CAP dans le projet de loi de finances pour 2019.

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