Intervention de David Assouline

Réunion du 4 décembre 2017 à 10h00
Loi de finances pour 2018 — Compte de concours financiers : avances à l'audiovisuel public

Photo de David AssoulineDavid Assouline :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le débat que nous avons dans cet hémicycle au sujet de ces crédits va, je l’espère, se prolonger amplement dans la société.

Les rapporteurs Roger Karoutchi et Jean-Pierre Leleux ont centré leurs propos sur l’état de l’audiovisuel public et les réformes qu’il faudrait engager.

Je le dis d’emblée, pour aborder ce débat, il ne faut pas refaire l’histoire, ni l’oublier. M. Leleux a affirmé que l’on passait d’une période où rien n’avait été fait à une période où les choses allaient bouger.

Je ne l’ai pas votée, mais je vous rappelle que vous avez engagé, il n’y a pas si longtemps, une très grande réforme de l’audiovisuel public avec Nicolas Sarkozy. Vous avez créé l’entreprise unique, ce qui n’était déjà pas rien, et vous avez bouleversé le financement de l’audiovisuel public en supprimant l’un de ses piliers, la publicité, qui y contribuait pour moitié.

Les espèces de montages que vous avez imaginés en compensation se sont révélés absolument pernicieux et n’ont pas rapporté les recettes escomptées, en particulier la taxe sur les fournisseurs d’accès, que vous critiquez à présent parce que son produit n’est pas affecté au budget de l’audiovisuel public.

Nous étions opposés à cette réforme qui déstabilisait l’équilibre du service public. Auparavant, avec 50 % de ses recettes provenant de l’État, je le répète, et 50 % de la publicité, le service public ne dépendait ni complètement du commerce ni complètement de l’État. Et c’est précisément cet équilibre qui garantissait son indépendance.

Ensuite, les réformes se sont poursuivies. Avez-vous oublié les plans sociaux à Radio France et les plus grandes grèves de son histoire ? Ou encore la fusion de France 24 et RFI, les déménagements de locaux, les grèves et la centaine de licenciements ?

Il est donc biaisé de dire que rien n’a bougé, que le secteur public ne fait pas d’efforts et qu’il ne cherche pas à réaliser d’économies. Les personnels ont déjà beaucoup donné.

Abordons maintenant le cœur du débat : faut-il une réforme de l’audiovisuel public ? Probablement, mais il faut surtout une loi sur l’audiovisuel en général, car les chaînes privées aussi sont percutées par la révolution technologique. Les usages ne sont plus les mêmes et la compétition change de visage avec le développement de plateformes internationales comme Netflix. Et même l’audiovisuel privé voit la ressource publicitaire, dont il vit, s’échapper sur internet. Il rencontre des difficultés et peut, demain, se faire laminer si l’on conserve les anciens schémas.

La chronologie des médias est également percutée et c’est donc l’ensemble de l’audiovisuel qui doit faire l’objet de nouvelles régulations.

Toutefois, il faut commencer par le secteur public, car c’est lui qui ordonne l’ensemble. On le sait, sans le service public de l’audiovisuel, l’investissement dans la création serait en danger. Qui veut tuer son chien l’accuse de la rage, monsieur Gattolin. Vous nous avez expliqué tout ce qui n’allait pas…

Mais Complément d’enquête est un programme très regardé, le journal télévisé de France 2 s’est nettement rapproché de celui de TF1, qui reste le premier en Europe, en termes d’audience – 22 % contre 24 % – et je pourrais vous citer les nombreuses émissions où le service public est passé en tête. Une série produite par France Télévisions a même reçu l’Oscar de la meilleure série internationale !

Oui, il faut réformer, mais réformer pour renforcer la qualité du service public. C’est absolument nécessaire. La culture, ce n’est pas un supplément d’âme, c’est notre âme ! Je l’avais déjà dit lors de l’examen de la loi relative à la création ; je le répète haut et fort aujourd’hui.

Dans une époque de désinformation généralisée, sur internet et ailleurs, l’information vérifiée et de qualité constitue une mission de service public.

Nous devons partir de cette ambition. Elle nous conduira peut-être à réaliser des économies ici ou là, bien entendu, mais elle va aussi nécessiter des investissements énormes, parce qu’il faut être prêt pour la révolution numérique, et parce que la qualité a un coût. Il faut des moyens pour envoyer un reporter suivre physiquement un événement, enquêter sur des terrains de guerre…

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