Intervention de Céline Boulay-Espéronnier

Réunion du 4 décembre 2017 à 10h00
Loi de finances pour 2018 — Compte de concours financiers : avances à l'audiovisuel public

Photo de Céline Boulay-EspéronnierCéline Boulay-Espéronnier :

Monsieur le président, madame la ministre, mesdames, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, les crédits de la mission « Médias, livre et industries cultuelles » s’inscrivent dans une certaine continuité.

La commission des finances et la commission de la culture, de l’éducation et de la communication ont constaté et approuvé une baisse de 1 % des avances pour l’audiovisuel public. Notre groupe suivra l’avis des rapporteurs de ces deux commissions.

L’effort général de réduction des dépenses demandé aux sociétés de l’audiovisuel public appelle une explication de notre part ; mon propos portera donc sur ce sujet.

Il y a un an, la commission de la culture de notre Haute Assemblée refusait d’approuver le contrat d’objectifs et de moyens de France Télévisions.

Quelques mois auparavant, le rapport des sénateurs Jean-Pierre Leleux et André Gattolin faisait le constat de la dégradation de la situation financière de l’audiovisuel public, notamment de France Télévisions. Dans ce contexte, il s’avérait indispensable de réduire les dépenses et de rationaliser les moyens.

Le précédent gouvernement, en signant le dernier COM de France Télévisions, n’a pas pris en compte les remarques de notre commission. Trois engagements majeurs n’y étaient pas inclus : les effectifs de France 3, la mobilisation de la filière interne de production et la réduction du coût des achats de programmes. Le présent budget est cohérent avec ces réserves.

Notre groupe souhaite toutefois préciser qu’il ne peut s’agir que d’une solution d’attente. Une réflexion globale sur la place de l’audiovisuel public dans notre pays doit être engagée.

En effet, les usages se sont modifiés avec l’arrivée des géants de l’internet. La diffusion de la création française est mise à mal et l’offre explose. Les supports de lecture se sont diversifiés, le poste de télévision n’étant plus l’écran principal où sont diffusés les contenus.

La question du modèle de financement de l’audiovisuel public se pose de façon accrue dans un contexte de dégradation des finances de l’État et alors que les autres ressources sont incertaines, avec, d’une part, le déclin du marché publicitaire et, d’autre part, un retour sur investissement insuffisant en matière de production.

Soit, les Français contribuent directement au financement de l’audiovisuel public par l’acquittement d’une redevance, mais ils ont maintenant accès à un large panel de chaînes privées et souhaitent donc que leur participation corresponde à une réelle valeur ajoutée.

Certains pays européens se distinguent par la qualité de leur audiovisuel public et la plupart ont déjà engagé des réformes structurelles. La BBC, en Grande-Bretagne, a su maîtriser ses dépenses, en constituant un groupe unique qui regroupe l’ensemble des radios et des télévisions nationales, locales et internationales. Cela lui permet de mutualiser ses moyens et de mobiliser davantage d’investissements.

Face aux évolutions technologiques et aux nouveaux usages, c’est le modèle historique de l’audiovisuel public à caractère national évoluant dans un univers peu concurrentiel qui doit être revu. En l’absence de réforme, les médias du service public risquent fort de décrocher.

Après un quinquennat de statu quo, le Gouvernement semble décidé à faire bouger les lignes, mais pour le moment, madame la ministre, nous n’en sommes qu’au stade des suppositions.

Le Parlement, en particulier le Sénat, a un rôle majeur à jouer dans cette réflexion et plusieurs pistes ont été avancées par le rapport d’information de Jean-Pierre Leleux et André Gattolin.

L’expérience des dernières années montre qu’il est plus facile de reconduire des crédits que de mener une réforme qui s’annonce d’ampleur.

J’approuve donc la demande formulée par notre commission, sur l’initiative de sa présidente Catherine Morin-Desailly, d’un débat qui pourrait être organisé courant janvier 2018 afin d’engager la réflexion et d’éclaircir les intentions du Gouvernement.

Mes chers collègues, les défis à relever sont nombreux. Quel modèle économique et financier définir ? Comment réformer la contribution à l’audiovisuel public ? Quid de la publicité – Roger Karoutchi a évoqué quelques pistes de réflexion à ce sujet – et de la prise en compte de l’audimat ? Enfin, peut-on conserver un modèle de gouvernance, dont l’indépendance est contestable ?

En 2018, notre groupe participera activement à cette réflexion, afin que notre audiovisuel puisse relever les défis de demain et remplir la mission éducative, culturelle et citoyenne qui lui revient.

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