Avant de commencer mon intervention, permettez-moi d'avoir une pensée pour Nicole Bricq, qui nous a quittés cet été.
Le budget que nous vous présentons aujourd'hui est marqué par deux éléments majeurs : la transformation et le pouvoir d'achat.
Je souhaite tout d'abord dire qu'un budget n'est qu'un outil : il met en oeuvre les politiques publiques, mais ce n'est pas lui qui les commande. Ce sont ces politiques qui permettent effectivement de transformer le pays et de redistribuer. Nous sommes donc à un moment important, mais ce n'est pas le plus important du quinquennat.
Le Président de la République et le Premier ministre ont engagé le pays sur la voie d'une société qui n'est pas celle qui encourage la rente statique, celle qui exclut nombre de nos compatriotes, en particulier ceux qui sont au chômage ou qui subissent les fractures territoriales. Au contraire, nous voulons une société qui encourage la mobilité et la réussite. C'est notamment pour cela que nous baissons la fiscalité de manière très importante.
Notre budget est celui de la fiche de paye et vous trouverez, dans le petit livret jaune que nous vous avons distribué, l'intégralité des mesures qui augmentent le pouvoir d'achat des Français. Il protège les plus faibles : doublement de l'enveloppe pour l'Anru et les quartiers en difficulté, augmentation de plusieurs allocations - allocation pour les adultes handicapés, minimum vieillesse... - et mesures en faveur des familles monoparentales.
C'est aussi un budget qui propose de privilégier l'investissement plutôt que le fonctionnement et qui accompagne les transitions.
Je pense tout d'abord au grand plan d'investissement évoqué par le Président de la République et le Premier ministre ; il trouve sa concrétisation dans les textes que nous vous présentons aujourd'hui, notamment dans une nouvelle ligne budgétaire de 700 millions d'euros destinée à la transformation numérique du pays. Un peu moins de 10 milliards d'euros sont prévus au titre de ce plan dans le budget 2018. Ces dépenses ne sont pas pérennes, puisqu'il s'agit d'investissements, mais elles ont vocation à changer durablement notre pays.
En matière de transition écologique, nous assumons une augmentation de la fiscalité, en particulier celle sur le diesel ou la part carbone des produits énergétiques, mais nous avons aussi prévu des compensations extrêmement importantes : généralisation du chèque énergie, primes pour changer de véhicule...
En ce qui concerne la transition économique, sujet extrêmement important, nous baissons les impôts de 10 milliards d'euros et prévoyons, pour 2019, l'allégement pérenne des charges, ce qui est demandé depuis tant d'années, notamment par les patrons des petites et moyennes entreprises.
Au titre de la transition sociale, nous estimons - je le disais à l'instant - que le travail doit payer. C'est pourquoi nous supprimerons, en 2018, deux cotisations et les basculerons sur la CSG, ce qui permettra une redistribution.
Autre transition, qui va évidemment intéresser votre Haute assemblée, celle des relations entre l'État et les collectivités locales. C'est la première fois depuis 2011, et particulièrement depuis 2014, qu'il n'y aura pas de baisse de dotations dans le projet de loi de finances que nous vous présentons. Je dois dire qu'il y a même une légère augmentation : 100 millions d'euros en plus pour la dotation globale de fonctionnement (DGF) et, au total, 400 millions sur la mission « Relations avec les collectivités territoriales ».
Nous avons en effet choisi de faire porter les économies à due proportion de la part des collectivités dans les dépenses publiques, alors que, sous le mandat précédent, elles ont contribué davantage. Et encore, entre les annonces du plan de 50 milliards d'économies et la réalité des économies réalisées, nous avons bien vu qu'il y avait une légère différence - c'est une litote...
Lorsque je présidais aux destinées d'une collectivité locale, j'étais le premier à dire qu'il ne fallait pas gérer les économies nécessaires par la baisse unilatérale et jacobine des dotations et qu'il ne fallait pas transférer des charges sans les ressources équivalentes. Je disais aussi que les collectivités devaient contribuer à ces économies, mais à proportion de leurs dépenses, soit 20 % de l'ensemble. C'est ce que nous faisons : nous ne baissons pas les dotations - je le répète, c'est la première fois depuis 2011 -, nous les augmentons même légèrement et nous faisons contribuer les collectivités locales, non pas de manière jacobine, mais en contractualisant avec les 319 plus grandes d'entre elles. Ainsi, la quasi-intégralité des collectivités locales, notamment le monde rural et les villes moyennes, n'est pas mise à contribution.
Nous considérons aussi qu'il ne faut pas transférer de charges aux collectivités locales sans ressources ; c'est le sens de la liberté qui leur est laissée en matière de rythmes scolaires et de la pérennisation du fonds de dotation correspondant. C'est aussi pour cela que nous avons décidé de doubler les crédits liés à la délivrance par les collectivités des titres d'identité numérisés dont, manifestement, le niveau était très largement sous-estimé.
Nous avons décidé de ne pas faire une politique de rabot, mais de procéder à des choix clairs. Évidemment, ceux-ci peuvent être discutés, mais on sait bien que l'ancienne politique du rabot n'a pas contribué à faire baisser durablement la dépense publique dans notre pays.
Le travail et le logement sont deux transformations portées par le Gouvernement, les crédits budgétaires sont en baisse, mais il faut appréhender ce choix dans une perspective plus globale : baisse de la fiscalité, plan de formation de 15 milliards d'euros, diminution substantielle des contrats aidés, libération du foncier, réduction des normes...
Parmi les crédits qui augmentent, les promesses du Président de la République et de la majorité de l'Assemblée nationale se concrétisent dans ce budget. Ce sont donc des promesses tenues.
Ainsi, les secteurs régaliens augmentent fortement : 1,7 milliard d'euros de hausse annuelle pour les armées, afin d'atteindre d'ici cinq ans le niveau annoncé par le Président de la République en pourcentage du PIB ; l'intérieur et la justice vont aussi connaître un renforcement extrêmement important, notamment en matière de numérisation.
Il en est de même pour l'éducation, qui bénéficie d'une hausse de plus d'un milliard d'euros, et pour l'université, qui pourra, grâce aux 700 millions d'euros supplémentaires prévus, faire face à l'afflux des 40 000 nouveaux étudiants.
Enfin, la transition écologique constituant l'un des grands défis du Gouvernement, les crédits qui lui sont dédiés augmentent également.
Je voudrais aussi souligner que certains ministres voient leur budget baisser et en sont pourtant heureux ! Tel est mon cas, puisque j'ai moi-même proposé de réduire les crédits de mon ministère qui emploie pourtant de nombreux agents publics. La priorité gouvernementale ne se mesure pas aux crédits budgétaires, mais bien à l'aune de l'efficacité politique.
Ce budget est celui du pouvoir d'achat. Rappelons-nous que, si nous comptons souvent en milliards, les Français de leur côté comptent en euros ! Je pense d'abord à la suppression de la taxe d'habitation qui fera évidemment l'objet d'un dégrèvement et je souhaite que votre commission puisse contribuer à la réflexion sur les évolutions de la fiscalité locale.