Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, Philippe Dallier vient de s’exprimer sur une partie importante de la mission « Cohésion des territoires », en particulier sur ce qui concerne le logement. Pour ma part, j’aborderai les programmes 112 et 162, spécifiquement dédiés à l’aménagement du territoire.
Je tiens à insister sur plusieurs dispositions qui me semblent manquer de cohérence ou ne pas répondre aux besoins des territoires, voire marquer un recul par rapport à 2017.
Premièrement, deux outils financiers, les contrats État-métropoles et les contrats de ruralité, ont été transférés vers la mission « Relations avec les collectivités territoriales ».
Alors que l’ancienne mission « Politique des territoires » rassemblait en 2017, dans une cohérence d’ensemble, les quatre outils financiers de contractualisation avec les territoires – les contrats de plan État-région à l’échelle régionale, les pactes État-métropoles, les contrats de ville et les contrats de ruralité –, à compter de 2018, deux seront inscrits sur la mission « Cohésion des territoires » et deux sur la mission « Relations avec les collectivités territoriales ».
D’un côté, on fusionne deux missions, ce qui est cohérent et que nous approuvons, de l’autre, on entache cette cohérence retrouvée en dispersant les outils de contractualisation sur deux missions. Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, pouvez-vous nous indiquer à quelle logique répond ce changement ?
Deuxièmement, les crédits consacrés aux contrats de ruralité diminuent et perdent en lisibilité.
Ces contrats, nous les réclamions depuis longtemps, et j’avais moi-même proposé en 2016 dans un rapport d’information sur le Fonds national d’aménagement et de développement du territoire, le FNADT, qu’ils puissent être créés pour accompagner les stratégies de développement local des territoires ruraux. Ils étaient donc attendus dans le monde rural et ont trouvé une traduction budgétaire dans la loi de finances pour 2017. Quatre cents contrats étaient déjà signés à la fin du mois de septembre dernier, ce qui montre bien l’intérêt de ce dispositif pour les élus locaux.
Le projet de loi de finances pour 2018 conserve le dispositif, ce dont nous sommes satisfaits. Toutefois, en dehors des 44 millions d’euros de crédits de paiement prévus sur le programme 112 pour honorer les engagements de la seule année 2017, aucun crédit n’est réellement dédié aux nouveaux contrats de ruralité.
Alors que, dans la loi de finances pour 2017, 216 millions d’euros en autorisations d’engagement étaient inscrits et vraiment fléchés vers les contrats de ruralité au programme 112, 62 millions d’euros ont été annulés dans le décret d’avance du mois de juillet. Pour 2018, seule figure une indication de 45 millions d’euros à prélever sur la dotation de soutien à l’investissement local, la DSIL, de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », alors même que 150 millions d’euros devraient être consommés en autorisations d’engagement d’ici à la fin 2017, pour la première année de mise en œuvre de ces contrats.
Cela signifie donc qu’il n’y aura pas réellement de crédits disponibles pour financer de nouveaux contrats en 2018, sauf à consommer les crédits de droit commun inscrits sur la DSIL au détriment d’autres projets. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous indiquer si de nouveaux contrats pourront être signés en 2018 et, si oui, avec quels crédits et pour quels montants ?
Troisièmement, la prime à l’aménagement du territoire est une aide directe aux petites et moyennes entreprises qui vise à soutenir l’emploi dans les territoires les plus fragiles.
En 2017, les crédits alloués à cette prime s’élevaient à 20 millions d’euros. Le projet de loi de finances initial pour 2018 ramenait cette somme à 10 millions d’euros, mais l’adoption d’un amendement par l’Assemblée nationale en a porté le montant à 15 millions d’euros. Or, nous le savons, 20 millions d’euros, c’est le minimum nécessaire pour accompagner les entreprises dans ces territoires, d’autant qu’une part importante de cette enveloppe sera consommée dans le cadre des engagements pris par l’État pour faciliter la reprise du site de Whirlpool à Amiens.
Nous présenterons par conséquent un amendement visant à rétablir l’enveloppe de 20 millions d’euros. Monsieur le ministre, accepterez-vous notre proposition en faveur des petites et moyennes entreprises des territoires fragiles ?
Quatrièmement, devant les maires de France, le Président de la République a indiqué que l’agence nationale de la cohésion des territoires devait jouer le rôle de facilitateur des projets des territoires. S’agira-t-il d’une structure pilotée par le Commissariat général à l’égalité des territoires, le CGET, ou d’un nouvel opérateur sur le modèle de l’ANRU ? Pour ma part, je considère que cette agence devrait s’appuyer sur le CGET, dont l’expertise n’est plus à démontrer dans l’accompagnement des territoires. Monsieur le ministre, pourrez-vous nous en dire davantage sur la forme que pourra prendre cette instance ?
Cinquièmement, pour la première fois, depuis 2009, au sein du programme « Interventions territoriales de l’État », est créée la nouvelle action Plan littoral 21 concernant la région Occitanie. Ce plan est doté de 1 million d’euros, mais devrait monter largement en puissance dans les prochaines années, au fur et à mesure qu’il se déploiera. Je suis heureux que l’on puisse faire évoluer le programme précité avec l’inscription d’une nouvelle action.
En revanche, concernant le plan sur le marais poitevin, le projet de loi de finances prévoit une réduction importante des crédits qui – je le sais pour avoir visité ce site – peut remettre en cause le programme engagé et fragiliser les équilibres trouvés pour ce site dont les enjeux dépassent largement le cadre régional. Je pense qu’il conviendrait, là aussi, de donner de la lisibilité aux nombreux acteurs locaux en les accompagnant mieux vers la sortie annoncée du dispositif.
Finalement, sur plusieurs points, ce projet de budget marque un recul par rapport à celui de 2017 ; je le regrette. Bien entendu, nous devons voter les crédits de la mission dans leur ensemble, mais, compte tenu des enjeux particuliers autour de la question du logement cette année, je me rallierai à la position de Philippe Dallier, rapporteur spécial de la commission des finances, à l’issue de ce débat.