… mais j’ai bien peur que, si le Gouvernement n’accepte pas l’ensemble des propositions qui sont faites par notre majorité et les compromis que nous ont expliqués M. Dallier et Mmes Estrosi Sassone et Létard, nous ne fassions un grand bond en arrière sur la politique du logement.
En septembre, le Gouvernement a annoncé un choc de l’offre de logements. Nous sommes évidemment prêts à soutenir cet objectif. Mais les mesures que vous nous présentez, si elles ne sont pas amendées dans la loi de finances, vont provoquer un contre-choc sur l’offre de logements. Oui, nous avons besoin de construire 450 000 logements environ par an pour répondre aux problématiques de la natalité, de la décohabitation des couples et de l’allongement de l’espérance de vie.
Contrairement à ce que j’ai entendu dans votre bouche et dans celle du Président de la République quand il est venu à Lille, nous avons déjà élaboré des projets qui marchent, comme dirait Mao Tsé-Toung, notamment du temps de Jean-Louis Borloo, en 2005. D’ailleurs, cette Haute Assemblée n’avait pas émis un seul vote défavorable sur le programme en question : tous les groupes politiques ont déposé des amendements qui ont été retenus.
Nous avons essayé de construire un programme avec les parlementaires et les représentants des collectivités locales. Cela a marché, avec le quadruplement de l’accession sociale à la propriété, le doublement du financement social du logement, l’augmentation de 50 % de l’offre de construction, avec, au final, 5 milliards d’euros de recettes fiscales supplémentaires par rapport aux dépenses, y compris les APL, et avec une martingale gagnante : la confiance, dans les acteurs du logement et dans les collectivités locales sans lesquelles on ne peut rien, la confiance pour bâtir ensemble et atteindre ces 450 000 logements par an dont nous avons besoin.
C’est la faille de votre programme, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, au-delà des réductions purement comptables sur lesquelles je ne reviens pas : vous ne faites pas confiance aux acteurs du logement, en particulier aux bailleurs sociaux.
À ce titre, j’évoquerai trois points.
Le premier point est la réforme et le recentrage du dispositif Pinel et du prêt à taux zéro, le PTZ.
Je l’ai déjà dit dans cet hémicycle : même si ces dispositifs sont prorogés dans les zones tendues, même si l’on ne fait qu’abaisser la quotité du PTZ, les choix opérés à cet égard aboutiront mécaniquement à la destruction de plusieurs milliers de logements dans les zones rurales et dans les villes moyennes.
Or ces territoires représentent quand même 12 millions d’habitants. J’ajoute que, pour accéder à la propriété ou pour se loger, les jeunes couples qui y vivent bénéficient uniquement de ces dispositifs fiscaux, que nous avons inventés au fil du temps et qui permettent la sécurisation de leur parcours d’accès au logement. Pour ces jeunes couples, de tels projets n’ont rien d’évident.
Selon moi, plus de 15 000 primo-accessions dans le logement neuf vont être perdues en 2018 au sein de ces territoires. Très certainement, plus de 20 000 emplois y seront détruits à l’horizon de 2019 et ce chiffre sera doublé à l’horizon de 2020.
Monsieur le ministre de la cohésion des territoires, je vous renouvelle ma proposition : plutôt que de conserver un prêt à taux zéro, pourquoi ne concevez-vous pas un prêt à taux réduit ?
Quand Pierre-André Périssol a créé le PTZ, les taux d’intérêt atteignaient 9 %. Quand j’ai instauré le PTZ +, ils s’élevaient à 4, 5 %. Aujourd’hui, ils sont à 1, 6 %. Si vous accordez un prêt à un taux de 1 %, vous pouvez obtenir 600 millions d’euros d’économies.
Monsieur Patriat, je suis d’accord avec vous, il faut baisser la dépense publique. Mais prenons garde : on risque d’empêcher l’acquisition de logements dans toutes les villes moyennes, dans tous les territoires ruraux de notre pays.