Mesdames, messieurs les sénateurs, avant tout, permettez-moi de vous remercier de vos interventions. Il ne me sera pas possible de répondre à l’ensemble de vos prises de parole, à ce stade du moins : je vous prie de m’en excuser à l’avance. J’essayerai de me concentrer sur ce qui relève de l’ordre du jour du Conseil des 14 et 15 décembre prochains.
Vous avez été très nombreux, et j’hésite même à vous citer tous – M. del Picchia, M. Menonville, M. Marie, Mme Keller, M. Gattolin, M. Kern, M. Pellevat, Mme Mélot –, à saluer la perspective de la conclusion de la première phase des négociations relatives au Brexit et à vous interroger sur les différents aspects de l’accord trouvé entre les négociateurs.
Pour ce qui est des droits des citoyens, j’ai indiqué dans mon propos liminaire la façon dont seraient considérés les Européens au Royaume-Uni.
Monsieur Gattolin, madame Mélot, vous avez parfaitement raison de le souligner : si plusieurs points de vigilance demeurent, le résultat d’ensemble se révèle protecteur pour les citoyens européens vivant au Royaume-Uni. Ces derniers pourront continuer à y résider, à y étudier et à y travailler comme ils le font aujourd’hui. Il en va de même pour les ressortissants britanniques installés chez nous, notamment les retraités.
Certes, monsieur le vice-président Pellevat, nous aurions souhaité que la Cour de justice de l’Union européenne soit mobilisée systématiquement, et non de manière facultative. Nous aurions aussi souhaité qu’elle puisse agir sans contrainte de temps, et non seulement pendant huit ans. Toutefois, il ne faut pas sous-estimer la protection qu’apportera le juge britannique.
Nous avons insisté pour que les lignes directrices que le Conseil européen adoptera rappellent bien le rôle de la Cour et son importance transversale.
La solution trouvée pour ce qui concerne les citoyens européens résidant au Royaume-Uni doit être clairement circonscrite à ce cas particulier, dont les implications ne sont pas les mêmes, par exemple, que pour le marché intérieur. Nous veillerons donc à ce que cette solution ne crée pas de précédents dans les autres domaines de la négociation à venir. C’est là un point clef pour éviter d’affaiblir le marché intérieur.
Pour ce qui concerne l’Irlande, M. del Picchia, Mme Keller et M. Pellevat ont souligné que, si la déclaration d’intention va dans le bon sens, les principes retenus semblent s’exclure mutuellement.
Cette ambiguïté devra être levée au cours de la deuxième phase de négociation. Le point important est qu’un éventuel alignement réglementaire entre le Royaume-Uni et l’Union européenne dans les domaines nécessaires à la mise en œuvre des coopérations entre le nord et le sud de l’Irlande ne peut avoir pour conséquence un marché intérieur à la carte : une telle situation serait inacceptable pour nous. J’insiste sur ce point : nous serons très attentifs à un total respect de l’intégrité du marché intérieur.
Pour ce qui concerne le règlement financier, je tiens à rassurer MM. Pellevat, Marie et Menonville : le Royaume-Uni accède bien à la quasi-totalité des demandes européennes. Nous pouvons nous en réjouir. J’ai cité tout à l’heure les grandes masses ; s’y ajoute, par exemple, la participation du Royaume-Uni à la facilité en faveur des réfugiés en Turquie ou au Fonds européen de développement.
Certes, tant que l’accord de retrait n’est pas finalisé, le Royaume-Uni n’est pas engagé juridiquement ; mais il l’est politiquement, comme le sera l’Union européenne si le Conseil européen estime que les progrès sont suffisants.
Madame Keller, la période de transition devra être limitée dans le temps, et elle ne pourra pas être renouvelée.
Monsieur le rapporteur général de la commission des finances, monsieur Gattolin, Michel Barnier l’a dit, nous sommes parvenus à un accord quant aux principes et aux paramètres du règlement financier. Les hypothèses macroéconomiques peuvent fluctuer, et les chiffres avec elles. Je relève tout au plus que le chiffre de 40 à 45 milliards d’euros, avancé par diverses sources britanniques, est un montant net, défalquant les sommes que le Royaume-Uni va continuer à percevoir de la part de l’Union européenne.
Quant au calendrier de versement des sommes que le Royaume-Uni doit à l’Union, il sera similaire à celui que suivent les autres États membres, ni plus rapide, ni plus lent.
Monsieur Kern, monsieur del Picchia, monsieur Pellevat, vous avez mentionné l’association des parlements nationaux à la négociation du Brexit. Il est clair que l’accord sur la relation future sera soumis à la ratification de ces diverses assemblées.
Madame Keller, monsieur del Picchia, vous m’avez interrogée quant à l’avenir des relations dans le domaine de la défense entre la France et le Royaume-Uni. Nous sommes déterminés à poursuivre et à approfondir cette coopération, à la fois à titre bilatéral et avec d’autres partenaires. C’est l’un des aspects qui doivent figurer dans la deuxième phase des négociations.
Monsieur del Picchia, monsieur Kern, monsieur Pellevat, madame Keller, madame Mélot, la coopération structurée permanente, que vous avez analysée, a été lancée lundi dernier à vingt-cinq États membres. Au total, dix-sept projets ont été présentés dans ce cadre.
Nous devrons démontrer que les engagements que nous avons pris seront bien mis en œuvre, et les décisions de lancement des premiers projets seront prises rapidement. Les chantiers les plus urgents seront financés de façon intergouvernementale, directement ou via le fonds européen de défense lorsque ce dernier sera opérationnel. Certains pourraient bénéficier du programme de développement de l’industrie de défense, qui prévoit de premiers financements communautaires dès 2019, pour 500 millions d’euros au titre des années 2019 et 2020.
Madame Keller, vous m’avez posé une question précise au sujet de l’Eurocorps. L’engagement n° 13 de la coopération structurée permanente, la CSP, contient un tiret qui incite les membres de la CSP à rejoindre les structures multinationales, dont l’Eurocorps.
Je rappelle que l’Eurocorps est un projet séparé de la construction européenne, qui peut être utilisé par des coalitions internationales, par l’Union européenne – tel a été le cas au Mali en 2015 ou en Centrafrique en 2016 –, ou encore par l’OTAN – il en fut ainsi en 2000 au Kosovo et en 2012 en Afghanistan.
Monsieur Marie, vous vous êtes inquiété du débat relatif aux migrations prévu à l’agenda des leaders. Laissez-moi vous rassurer : c’est précisément pour réfléchir ensemble à l’avenir de l’Europe, et sans se substituer aux colégislateurs, que les chefs d’État et de gouvernement ont choisi cette forme de débat, durant le dîner, qui ne donnera pas lieu à des conclusions écrites.
Nous sommes nombreux à craindre que l’Europe n’avance à trop petits pas, voire que, parfois, elle ne fasse du sur-place. Il est utile que les chefs d’État et de gouvernement puissent, à chacune de leurs rencontres, parler librement et échanger sur les sujets majeurs qui mettent en jeu l’avenir de l’Union européenne.
Mesdames, messieurs les sénateurs, plusieurs d’entre vous, notamment M. Marie, Mme Keller, M. Gattolin et M. de Montgolfier, m’ont interrogée au sujet de la zone euro.
Comme je l’évoquais dans mon propos introductif, les propositions présentées par la Commission européenne le 6 décembre dernier permettent de lancer le débat. Mais il est clair, monsieur Gattolin, monsieur Marie, que nous souhaitons être plus ambitieux.
J’ai évoqué tout à l’heure notre vision d’une capacité budgétaire de la zone euro. À court terme, nous devons cependant commencer par compléter l’union bancaire, par déployer un filet de sécurité pour le fonds de résolution unique. Vous le savez, la France est favorable à une telle action.
Nous soutenons l’idée de doter, à terme, la zone euro d’un ministre des finances, qui pourra contribuer à une meilleure coordination des politiques économiques et à une amélioration du contrôle démocratique de la zone euro. Toutefois, une telle réforme suppose de renforcer la zone euro par des compétences nouvelles, notamment par une capacité budgétaire propre.
Madame Keller, monsieur Menonville, puisque vous mentionnez l’harmonisation de la fiscalité des entreprises, …