Intervention de Simon Chignard

Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques — Réunion du 16 novembre 2017 à 9h30
Audition ouverte à la presse sur « les algorithmes au service de l'action publique : le cas du portail admission post-bac apb »

Simon Chignard, conseiller en stratégie pour la mission Etalab, Direction interministérielle du numérique et du système d'information et de communication de l'État (DINSIC) :

De mémoire, ce nombre est de l'ordre de 3 000 à 6 000 personnes, sur 850 000 candidats.

Le code source d'APB pallie en outre l'absence de réglementation, et le manque d'évolution de la loi. C'est aussi un enjeu pour le futur, que de mieux faire converger la loi et les traitements informatiques.

Cet aspect me permet de souligner qu'il existe une différence fondamentale entre le fait d'écrire une loi et celui de créer un logiciel. Le législateur, le juriste, et l'administration, adorent et appellent cela l'interprétation. On apprécie que le texte ne soit pas très précis, puisque cela permet ainsi de traiter une multitude de cas concrets. Prenons un exemple simple dans APB, en l'occurrence la question du « domicile du candidat ». Comment interpréter cette expression ? Cela renvoie-t-il à son académie, à sa commune de résidence, à son département, à sa région, au nombre de kilomètres qui le séparent de l'université la plus proche, voire pourquoi pas au temps de transport, en mode individuel ou collectif ? Vous constatez, à partir de cet exemple a priori simple, le nombre de questions que cela soulevées.

À la différence du législateur ou du juriste, le codeur informatique n'apprécie pas l'interprétation. La machine n'aime pas le flou. Tout ceci est évidemment à relativiser dans le cadre de dispositifs apprenants, et d'intelligence artificielle, qui constituent un tout autre sujet.

Très clairement, ceci pose une difficulté fondamentale : on n'écrit pas un code source comme on écrit le code dans la loi. Si le code fait loi - je fais ici allusion à la déclaration, voici dix-sept ans, de Lawrence Lessig, professeur de droit à Harvard : « code is law » -, alors il faut qu'il soit rendu public. Ceci semble évident. Personne n'imagine, dans un pays jouissant d'une tradition démocratique comme la France, que l'on puisse vous arrêter dans la rue en vous accusant d'avoir enfreint la loi, sans vous indiquer à quelle loi il est fait référence. De la même manière, on ne peut concevoir qu'un système algorithmique prenne une décision sans qu'il soit possible d'en connaître les modalités d'élaboration.

Il n'existe pas de bonne solution dans ce domaine. En revanche, il y aura un équilibre à trouver et un choix à faire entre, d'une part, disposer d'un système efficace et explicable, et, d'autre part, le degré de convergence souhaité entre droit écrit, droit public, et code informatique. Je laisserai la direction générale des finances publiques nous parler d'un autre retour d'expérience, dans un contexte très différent, qui montre qu'il est tout à fait possible de faire converger droit et informatique, notamment via l'usage de la doctrine. Mais il s'agit d'un autre sujet.

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