Une délégation de la commission s'est rendue à Bruxelles, vendredi 8 décembre, pour des rencontres sur le thème des transports et de l'environnement. J'étais accompagné, pour ce déplacement, de Joël Bigot, Jean-Pierre Corbisez, Guillaume Gontard et Frédéric Marchand.
Ce déplacement a été très utile pour faire le point sur les nombreux sujets d'actualité européens dans le domaine des transports. Nous avons rencontré le conseiller de la représentation permanente de la France à Bruxelles en charge des transports, le directeur de cabinet du Commissaire en charge de l'environnement, des affaires maritimes et de la pêche, M. Karmenu Vella, le directeur-adjoint de cabinet de la Commissaire en charge de la mobilité et des transports, Mme Violeta Bulc, une conseillère du cabinet du Commissaire à l'énergie et au climat, M. Arias Cañete, enfin des représentants de la Communauté européenne du rail, qui regroupe des entreprises du secteur ferroviaire.
Je voudrais d'abord évoquer le quatrième paquet ferroviaire, qui a été adopté définitivement à la fin de l'année 2016 et prévoit la libéralisation du transport ferroviaire de voyageurs. Il y a eu, en France, des divergences d'appréciation sur les échéances de cette libéralisation pour les services conventionnés (en France, les TER et les TET), qui font l'objet d'un financement public. Les services de la Commission européenne nous ont confirmé - et c'est important - que les autorités compétentes en matière de transport devraient au moins avoir la possibilité d'ouvrir leurs services ferroviaires à la concurrence à partir du 3 décembre 2019 - ce qui nécessite une modification de notre droit national, puisque SNCF Mobilités est pour l'instant en situation de monopole.
Jusqu'en 2023, les autorités compétentes pourront néanmoins continuer à attribuer directement leurs contrats de service public - dans les États membres qui l'autoriseront dans leur législation. Après cette date, il ne leur sera plus possible d'y déroger, sauf dans les différents cas énumérés par le règlement européen, et sous réserve, encore une fois, que les États membres l'inscrivent dans leur droit national.
Dans la proposition de loi que Louis Nègre et moi avons déposée à ce sujet, nous n'avons repris aucune de ces dérogations, car je défends le principe d'une ouverture à la concurrence la plus complète possible. Elle me semble en effet nécessaire pour faire baisser les coûts du transport ferroviaire et améliorer la qualité du service rendu, au profit des usagers.
En ce qui concerne les services commerciaux - les TGV -, cette libéralisation devra être prévue par la loi à partir du 1er janvier 2019, pour une application effective à partir du 14 décembre 2020, soit au début de l'horaire de service 2021.
À l'heure actuelle, des débats ont lieu sur les actes d'exécution de cette réforme, en particulier sur la notion d'atteinte à l'équilibre économique du contrat de service public permettant à une autorité organisatrice d'obtenir l'interdiction d'un service effectué en open access, c'est-à-dire librement et sans financement public : je rappelle que le principe fixé par le droit européen est d'autoriser tous les services ferroviaires, tant qu'ils ne remettent pas en cause l'équilibre d'un contrat de service public existant.
D'autres sujets propres au système ferroviaire français sont suivis de près par la Commission européenne : l'architecture du groupe public ferroviaire, qui réunit le gestionnaire d'infrastructure et l'exploitant historique des services de transport ; le statut d'établissement public industriel et commercial (Epic) ; et la question de la dette.
Dans le domaine du transport routier, et, de façon plus générale, des mobilités, la Commission a présenté cette année deux initiatives : le paquet « routier », publié le 31 mai 2017 et le paquet « mobilité propre », datant du 8 novembre 2017, qui est donc extrêmement récent.
Le paquet routier comporte plusieurs éléments : une révision des règles d'accès au marché du transport international de marchandises, dont les règles sur le détachement ; une révision de la directive « Eurovignette », qui fixe les règles applicables en matière de tarification des infrastructures routières et une proposition de règlement sur les émissions de CO2 et la consommation de carburant des véhicules utilitaires lourds.
Nous nous sommes en particulier penchés sur la directive « Eurovignette », dans la mesure où les sujets qu'elle soulève font directement écho aux débats que nous avons en ce moment dans le cadre des Assises de la mobilité et du Conseil d'orientation des infrastructures dans lequel nous sommes plusieurs à siéger : faut-il avoir recours à un système de vignette ou à une redevance kilométrique comme l'écotaxe ? Comment internaliser les externalités négatives du transport routier ? La Commission européenne avait le projet d'interdire, à terme, le recours aux vignettes, mais plusieurs États membres, dont la France, souhaitent garder la possibilité de choisir entre les deux systèmes.
L'ensemble des questions posées par cette réforme est passionnant. Mais nous avons compris qu'elle ne serait pas à l'ordre du jour de la présidence bulgare du Conseil de l'Union européenne, qui sera effective au premier semestre de l'année 2018. En revanche, elle pourrait être abordée lors de la deuxième partie de l'année 2018, lors de la présidence autrichienne. Nous nous sommes aussi rendu compte que l'échéance de 2019, avec les élections européennes et le renouvellement de la Commission, était déjà très présente.
Le paquet « mobilité propre » a, quant à lui, pour objet la décarbonation des transports. Il comporte une proposition de révision de la directive sur les véhicules propres, qui précise cette notion et les mesures d'incitation à prévoir dans les marchés publics ; une proposition de révision de la directive sur le transport combiné de marchandises ; une proposition de révision de la directive sur le transport par autobus et autocar ; un plan d'action pour le déploiement d'infrastructures pour les carburants alternatifs et une proposition législative sur les émissions de CO2 des véhicules légers et des camionnettes. Dans la mesure où ce paquet a été présenté très récemment, l'agenda des négociations est encore très incertain, mais la France s'implique dans ce domaine, notamment sur les véhicules propres. Un sujet a néanmoins suscité une levée de boucliers de la part des États membres : la libéralisation du transport par autocar. La Commission européenne souhaitait aller très loin, en envisageant d'autoriser toute entreprise à proposer des services de transport par autocar, sans condition d'établissement dans le pays concerné.
Dernière question dans le domaine des transports : les émissions de polluants atmosphériques des véhicules, qui sont un enjeu pour la qualité de l'air. Les plus anciens d'entre nous se souviennent de la communication qu'avait fait notre collègue Louis Nègre à ce sujet, à la suite de l'« affaire Volkswagen ». Il avait notamment évoqué la présentation, par la Commission européenne, d'un nouveau règlement censé en tirer les conséquences. Nous avons appris lors du déplacement qu'un accord final sur ce règlement avait été trouvé la veille, le 7 décembre, en trilogue, après deux ans de négociations. Il n'y aura pas, comme cela avait été évoqué, d'agence européenne de surveillance du marché automobile, mais les contrôles seront bien renforcés. Par exemple, des contrôles réguliers seront effectués sur les véhicules déjà commercialisés. La Commission pourra en outre infliger des amendes en cas d'infractions.
Enfin, nous avons fait le point, avec le directeur de cabinet du Commissaire à l'environnement, sur la finalisation imminente d'un accord sur le paquet « déchets - économie circulaire » présenté par la Commission en décembre 2015. Les services nous ont annoncé que la Commission européenne lancerait prochainement une initiative sur les plastiques pour accompagner cette réforme.
Vous l'aurez compris, l'actualité est riche à Bruxelles sur les sujets suivis par notre commission et je me réjouis que nous ayons pu échanger sur place avec les différents acteurs concernés. J'ai bien l'intention de poursuivre ce travail de veille et d'aller plus loin dans nos échanges avec les institutions européennes.