Intervention de Dominique Gillot

Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques — Réunion du 7 décembre 2017 à 9h00
Échange de vues avec m. rémi quirion scientifique en chef du québec

Photo de Dominique GillotDominique Gillot, ancienne sénatrice et co-rapporteure de l'Office sur l'intelligence artificielle :

J'ai été très intéressée par votre exposé et la confiance, l'autorité que vous représentez dans une organisation politique où l'interface entre la science et la société est vécue comme un élément essentiel. En France, nous n'en sommes pas encore là. J'ai été rapporteure pour avis du budget de la recherche pendant plusieurs années et je faisais état chaque année dans mon rapport de mon constat de l'insuffisante présence du Conseil stratégique de la recherche, qui se réunissait de façon institutionnelle, chacun défendant sa filière, son domaine, avec me semble-t-il une certaine difficulté à travailler ensemble pour l'intérêt commun. De plus, ce Conseil n'était pas présidé par le Premier ministre mais par un scientifique qui avait été nommé là en remplacement de la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche. L'autorité politique n'était ainsi présente qu'à l'ouverture et à la clôture et ne participait ni n'assistait aux débats.

J'ai rencontré de nombreux scientifiques qui étaient admiratifs du rôle que jouait le conseiller scientifique auprès du président Obama, par exemple. Mais j'ai également constaté une certaine réticence, de la part des scientifiques en France, à s'engager politiquement. J'étais, je dois l'avouer, un peu dubitative face à la démarche de Cédric Villani pour devenir député, mais je trouve cela extraordinaire. Je pense que si l'on veut s'inspirer de votre expérience, qui est de bonne pratique, il faut que nous fassions évoluer nos mentalités et que le rapprochement entre les scientifiques, la société et la politique ne soit pas suspect. Cela doit se faire dans la transparence, avec des arguments vérifiables de manière citoyenne et n'est absolument pas condamnable. Très souvent, en France, on reproche à des scientifiques de travailler avec l'industrie pharmaceutique, par exemple ; or comment contrôler ou obtenir la fabrication de médicaments utiles à l'épanouissement d'une recherche scientifique sans ce contact avec l'industrie ?

Je pense qu'il faut que nous étudiions avec attention la manière dont vous agissez, que nous nous en inspirions pour lutter contre cette idée reçue selon laquelle un scientifique devrait être indépendant à tout crin et ne pas conseiller le politique au risque de devenir suspect. Il y a là un travail à mener, dans la transparence, avec la définition d'une éthique. Cela permettrait, me semble-t-il, de gagner en efficacité et de permettre une meilleure connaissance de la population, de développer cette culture commune de confiance dans la science et dans le progrès technologique.

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