Intervention de Sophie Cluzel

Réunion du 30 novembre 2017 à 14h30
Loi de finances pour 2018 — Solidarité insertion et égalité des chances

Sophie Cluzel, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées :

Monsieur le Président, mesdames, messieurs les sénateurs, messieurs les rapporteurs, je vous prie tout d’abord d’excuser l’absence d’Agnès Buzyn et de Marlène Schiappa, qui sont retenues loin de cet hémicycle.

Je vous remercie de l’ensemble de vos interventions relatives au budget de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » du projet de loi de finances pour 2018, que j’ai l’honneur de vous présenter aujourd’hui.

Ce budget est le reflet d’un parti pris et d’une priorité. Le parti pris, c’est celui de la sincérité budgétaire, qui est le préalable indispensable à une action publique efficace et à des choix politiques clairement assumés ; la priorité, c’est celle qui va à nos concitoyens les plus fragiles et qui exprime la solidarité nationale.

Les crédits de cette mission sont essentiellement consacrés au financement de dispositifs d’aide aux populations les plus défavorisées au travers des programmes 304, « Inclusion sociale et protection des personnes », et 157, « Handicap et dépendance », ainsi qu’au soutien de l’égalité entre les femmes et les hommes. Les moyens de fonctionnement du ministère représentent moins de 8 % du total des crédits.

Le budget de la mission augmentera en 2018 de 1, 5 milliard d’euros, soit 8, 7 %, par rapport à 2017. C’est un effort considérable, destiné pour l’essentiel aux bénéficiaires de la prime d’activité et de l’allocation aux adultes handicapés, l’AAH. Il s’ajoute, je veux le rappeler, à la revalorisation du minimum vieillesse – prévue dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale –, laquelle atteindra 100 euros par mois au 1er janvier 2020.

Le programme 157, « Handicap et dépendance », est porté à 11, 34 milliards d’euros, soit une progression de 6, 9 % entre 2017 et 2018. Cette augmentation massive traduit la priorité que constitue le handicap pour le quinquennat. Elle permet de concrétiser l’engagement du Président de la République en faveur de la revalorisation de l’allocation pour adulte handicapé, afin de donner à chacun sa juste place dans le projet national et de lutter contre la pauvreté subie des personnes auxquelles leur handicap interdit, ou limite fortement, l’accès au travail.

La revalorisation de l’AAH permettra de porter en deux temps, vous l’avez rappelé, le montant de l’allocation à 900 euros par mois à la fin de 2019. Il s’agit d’un investissement de plus de 2, 5 milliards d’euros sur le quinquennat que fait la Nation au profit de la participation des personnes et de leur inclusion, pour offrir à chacun une vie plus libre et digne. Cette revalorisation de 11 % en deux ans est sans précédent et contraste avec l’augmentation de moins de 2, 5 % par an durant les sept années précédentes.

Vous m’avez alertée sur les deux mesures accompagnant cette revalorisation, en particulier celle qui consiste à rapprocher – non à aligner ! – les règles de calcul de l’allocation pour les couples, trop différentes de celle des autres minima. J’entends dire que, de ce fait, les couples seraient exclus de la réforme ; c’est faux ! Messieurs Bocquet et Forissier, je tiens donc à vous rassurer sur ce point.

Plus de 155 000 bénéficiaires en couple vont profiter pleinement de la revalorisation, avec une augmentation de 180 euros par mois. Le niveau de revenu garanti à un couple sera ainsi strictement préservé et stable, à hauteur de 1 620 euros, soit un montant supérieur au seuil de pauvreté. La solidarité nationale sera la plus forte pour ceux qui en ont le plus besoin. Cette mesure préserve bon nombre de spécificités, légitimes – vous avez tout à fait raison à ce sujet, monsieur Mouiller –, de l’AAH pour les couples, en particulier l’abattement de 20 % sur les revenus du conjoint.

S’agissant de la simplification annoncée des deux compléments de ressources, elle ne sera effective qu’en 2019. Nous aurons l’occasion d’y revenir dans le prochain débat budgétaire.

Mme Nassimah Dindar, je souhaite vous rassurer sur les deux objectifs qui nous guideront : supprimer toute double évaluation et flécher les financements vers ceux pour lesquels la charge de logement est la plus élevée. Simplifier et ne plus surévaluer.

Concernant le programme 304, je veux en premier lieu évoquer l’augmentation de la prime d’activité. Vous le savez, celle-ci représente, pour plus de 2, 5 millions de foyers aux ressources modestes, un complément de revenu important de près de 160 euros par mois en moyenne, alors que le montant moyen des ressources des foyers bénéficiaires est de l’ordre de 1 050 euros. Il s’agit également d’un dispositif important pour faire en sorte, comme il est dit parfois de façon raccourcie, que « le travail paie ».

Conformément aux engagements du Président de la République, la prime d’activité augmentera de 20 euros à partir du premier octobre 2018, complétant ainsi une deuxième disposition favorable au pouvoir d’achat : la suppression des cotisations salariales chômage et maladie en contrepartie de la hausse de la CSG, ce qui va se traduire, par exemple pour une personne au SMIC, par un gain de pouvoir d’achat de 263 euros par an lorsque la mesure sera pleinement montée en charge.

Cette augmentation de la prime d’activité n’est d’ailleurs que la première étape d’une hausse qui se poursuivra au cours des années suivantes, pour porter sa revalorisation à 80 euros au niveau du SMIC.

En 2018, quelque 5, 1 milliards d’euros seront donc consacrés à la prime d’activité, ce qui représente une augmentation de 16 % par rapport à l’année 2017. Celle-ci prend en compte l’évolution tendancielle de la prime en opérant pleinement l’effort de sincérité demandé par la Cour des comptes.

La très forte progression des crédits s’accompagne de mesures destinées à modérer l’impact budgétaire, vous les avez relevées. Celles-ci ne remettent pas en cause, je le dis clairement, l’économie globale de la prime et l’impact favorable des mesures adoptées pour les bénéficiaires.

Toujours au titre du programme 304, le parti pris de la sincérité porte également le Gouvernement à proposer d’augmenter de façon très appréciable les crédits consacrés aux mineurs non accompagnés. Dans ce dossier important et sensible, les engagements du Président de la République et du Premier ministre sont très clairs : l’État doit faire plus et mieux pour accueillir les mineurs étrangers isolés et aider les départements dans cette mission.

Le nombre de mineurs pris en charge par les conseils départementaux a augmenté de façon très importante, entraînant la saturation des dispositifs et un coût croissant pour les départements. Or, même si la protection de l’enfance est de leur compétence, l’État a une responsabilité forte, au travers de sa double compétence de conduite de la politique migratoire et de protection de l’enfance, exercée par l’autorité judiciaire.

Les difficultés actuelles révèlent aussi la nécessité d’une harmonisation nationale des conditions d’évaluation de la situation des demandeurs, compte tenu des disparités constatées entre les départements.

C’est pourquoi le Premier ministre a lancé, conjointement avec le président de l’Association des départements de France, Dominique Bussereau, une mission d’expertise, afin d’identifier des solutions opérationnelles permettant d’améliorer l’efficacité, la cohérence et la soutenabilité budgétaire de la phase d’évaluation et de mise à l’abri des mineurs non accompagnés.

Dès 2018, l’engagement de l’État se traduira par un renforcement très important des moyens, qui passent de 15 millions d’euros en loi de finances initiale pour 2017 à 132 millions d’euros dans le projet de loi de finances pour 2018. Je tiens également à rassurer Mme Schillinger et M. Bazin : les crédits affectés à l’aide alimentaire augmentent de 7, 7 millions d’euros.

Je souhaite à présent évoquer le programme 137, dont Marlène Schiappa porte la responsabilité.

Par ses enjeux et ses objectifs, la politique des droits des femmes et de l’égalité entre les femmes et les hommes participe à la politique d’inclusion sociale, pour permettre à chaque citoyenne et à chaque citoyen de participer pleinement à la vie de la société, notamment en exerçant un emploi. L’égalité entre les femmes et les hommes a été déclarée grande cause nationale pour tout le quinquennat.

Elle porte un engagement fort, sur tout le territoire, en mobilisant l’ensemble du Gouvernement, dans une approche résolument interministérielle, sur les trois champs prioritaires que sont la promotion de l’égalité professionnelle et la conciliation des temps de vie ; la lutte contre toutes les formes d’agissements et de violences sexistes et sexuelles ; un État exemplaire grâce à l’efficacité des politiques ministérielles et interministérielles en faveur de l’égalité.

Les actions réunies par le document de politique transversale totalisent près de 420 millions d’euros, en progression par rapport à 2017. À l’issue du Tour de France de l’égalité, en mars prochain, le Président de la République réunira un comité interministériel et validera un programme gouvernemental qui sera mis en œuvre jusqu’à la fin du quinquennat.

D’ores et déjà, les crédits du programme 137 « Égalité entre les femmes et les hommes » sont en hausse de 8 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2017.

J’insiste sur la sincérité de ce budget, qui présente, de surcroît, un taux de réserve de précaution de 3 %, contre 8 % en 2017, ce qui donnera plus de marge de manœuvre, dès le début d’année, pour garantir la bonne consommation des crédits du programme.

Je souligne aussi que le niveau global de subventions aux associations, dont le rôle est essentiel sur l’ensemble des territoires, est totalement préservé. C’est pourquoi le Gouvernement s’engage aussi à pérenniser ce niveau de crédits sur le tendanciel 2018-2022.

Je n’oublie pas, enfin, que le projet de budget défendu devant la représentation nationale porte les supports budgétaires des femmes et des hommes qui travaillent dans nos ministères, avec le programme budgétaire 124, « Soutien aux politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative ». Ce sont 18 276 emplois de l’administration centrale, des services déconcentrés du ministère et des agences régionales de santé, ainsi que la masse salariale correspondante, qui sont concernés.

Le projet de budget 2018 s’inscrit dans la perspective, fixée par le Président de la République, de réduction du nombre d’emplois publics en dehors des départements ministériels prioritaires. Ce contexte exigeant va donc requérir davantage d’efficience ; nous y travaillerons ensemble.

Pour conclure, mesdames, messieurs les sénateurs, le budget que nous vous présentons est un budget rigoureux dans son élaboration et sincère.

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