Intervention de Florence Parly

Réunion du 30 novembre 2017 à 14h30
Loi de finances pour 2018 — Défense

Florence Parly, ministre :

Mesdames, messieurs les sénateurs, la question de l’annulation des 850 millions d’euros de crédits intervenue au mois de juillet 2017 est revenue à maintes reprises dans vos interventions. Je n’y reviens pas, tout a été dit sur notre détermination à faire en sorte que ces annulations ne portent pas sur la substance même de ce budget.

Je répondrai maintenant plus précisément à certains d’entre vous.

Monsieur Guerriau, vous avez exprimé vos attentes en faveur des conditions de vie des militaires. Les femmes et les hommes de la défense, ainsi que leurs familles, font preuve d’un courage et d’un engagement exemplaires. Ils sont au cœur de mon action, et j’ai déjà détaillé quelques-unes des mesures du plan Famille.

Vous m’avez interrogée en particulier sur la directive européenne sur le temps de travail. La transposition de cette directive fragiliserait le statut militaire et l’obligation de disponibilité qui en découle. Le temps d’activité des militaires ne saurait en effet reposer sur une logique purement comptable. On n’est pas militaire quelques heures par jour, on l’est vingt-quatre heures sur vingt-quatre. La gestion de ce temps d’activité doit donc laisser, dans un cadre réglementaire adapté, une marge d’appréciation au commandement, responsable à la fois de la condition du personnel et de la bonne exécution des missions.

J’ai par conséquent demandé à mes services d’expertiser les options possibles et de me fournir une étude approfondie, afin de mesurer les impacts de cette directive européenne, en tenant compte du retour d’expérience des pays européens qui l’ont mise en œuvre, notamment l’Allemagne.

Madame Prunaud, vous avez vous aussi exprimé votre préoccupation à l’endroit des conditions de vie de nos militaires et vous êtes interrogée sur le bien-fondé de notre dissuasion.

Pour ma part, je souhaite réaffirmer mon plein soutien, conformément au souhait du Président de la République, au budget qui sera consacré dans les prochaines années au renouvellement des deux composantes de notre dissuasion nucléaire.

En effet, c’est notre dissuasion qui permet de préserver notre liberté d’action et de décision en toutes circonstances. C’est aussi elle qui permet au Président de la République d’écarter toute forme de menace ou de chantage qui viserait à nous paralyser. C’est donc une dissuasion défensive, qui a pour finalité de préserver la capacité de notre nation à vivre, c’est-à-dire de protéger notre pays de toute agression d’origine étatique contre ses intérêts vitaux. Nous aurons l’occasion d’y revenir dans le cadre du débat sur le prochain projet de loi de programmation militaire.

Madame la sénatrice, vous m’avez également interrogée sur la réforme du service de santé des armées, le SSA.

Le SSA s’est engagé dans une démarche de transformation, qui prévoit notamment une meilleure insertion de ses établissements dans les territoires de santé et garantit un niveau d’activité permettant à son personnel d’atteindre un niveau de performance technique optimal.

De nombreuses mesures ont été prises pour 2018, à commencer par la fin du déploiement des seize centres médicaux des armées nouvelle génération, l’amélioration de la performance et la consolidation des partenariats des hôpitaux d’instruction des armées, les HIA. L’Institut de recherche biomédicale des armées aura pour objectif d’achever la mise en service de ses laboratoires confinés NRBC ; l’école du personnel paramédical des armées de Toulon et l’école de santé des armées du Lyon seront regroupées sur le site de Lyon. Enfin, nous allons mettre en place une nouvelle gouvernance du SSA pour assurer une plus grande cohérence à sa tête.

Tous ces éléments ne remettent évidemment pas en cause les remarques que vous avez pu formuler sur les difficultés que le service de santé des armées a pu éprouver face à l’évolution rapide, voire très rapide, qui lui a été demandée. Je partage tout à fait votre préoccupation, car il s’agit là d’un service absolument essentiel au bon fonctionnement des armées.

Monsieur Allizard, je vous remercie d’avoir insisté sur l’importance de l’innovation, de la recherche et des moyens qui y seront consacrés. Je suis très heureuse de vous avoir entendu en parler, car c’est un sujet auquel j’attache une importance toute particulière.

Aujourd'hui, le ministère des armées s’engage pleinement pour l’innovation et chacun a maintenant pris la mesure des enjeux que cela implique.

Vous avez particulièrement appelé mon attention sur l’Office national d’études et de recherches aérospatiales, l’ONERA. Vous l’avez souligné, l’ONERA est dans une situation financière fragile. Il doit donc se réformer pour dégager les ressources nécessaires afin de mener ses activités d’établissement de recherche et d’opérateur de grands moyens techniques dans une logique de complémentarité avec les industriels du secteur, conformément au contrat d’objectifs et de performance 2017-2021, signé à la fin de l’année dernière.

Je suis ce dossier avec attention, et plusieurs orientations doivent être prises, conformément au contrat d’objectifs et de performance. Je pense notamment à une réorganisation des implantations de l’ONERA, en particulier en Île-de-France, avec le passage de trois sites à un site centré sur Palaiseau à l’horizon de 2022 ou à une meilleure valorisation des résultats de la recherche de l’Office, avec pour but une augmentation significative de ses recettes contractuelles.

Vous avez également appelé mon attention sur l’importance stratégique de la base de Djibouti. Il s’agit en effet d’une base majeure dans une zone marquée par les conflits – au Yémen ou en Somalie –, où la France et ses armées comptent bien rester implantées dans la durée. Nous y disposons de plus de 1 450 personnes, d’une base aérienne, d’un régiment, d’une base navale. Nous garderons nos positons sur place en étroite coopération avec le gouvernement djiboutien.

De là, nous continuerons à former les armées africaines qui sont impliquées dans la sécurité de la zone somalienne. Nous continuerons à contribuer, avec nos partenaires européens, à la sécurité des détroits, tout en restant vigilants face à l’implantation récente et très importante, que vous avez rappelée, de l’armée chinoise sur place.

Djibouti continuera donc, et j’y veillerai dans le cadre du prochain projet de loi de programmation militaire, d’être une base essentielle dans notre dispositif des forces de présence.

Monsieur Boutant, je vous remercie d’avoir salué l’effort de renforcement des effectifs entamé dans le cadre de la loi de programmation actualisée en faveur des services de renseignement.

Vous avez attiré mon attention sur la DRSD, dont les missions ont été fortement accrues au cours des années précédentes – l’exercice de ces missions a parfois été rendu difficile, notamment lors d’un certain nombre de contrôles –, ainsi que sur la situation de ses infrastructures.

J’ai pu moi-même prendre la mesure de la situation et me rendre compte de la transformation profonde à laquelle cette direction s’est pliée. Cette transformation mérite d’être pleinement soutenue par une remontée en puissance des effectifs. C’est prévu, notamment dans le cadre du présent projet de loi de finances.

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, j’espère avoir répondu non pas à toutes vos interrogations, mais à un certain nombre d’entre elles. Je crois très sincèrement que le budget pour l’année 2018 est une opportunité rare pour nos armées, pour notre défense et pour notre sécurité.

L’augmentation de 1, 8 milliard d’euros est la réponse aux besoins de nos armées, mais également la réponse attendue par nos concitoyens face aux menaces qui pèsent sur la France et qui ont été parfaitement identifiées dans la revue stratégique de défense et de sécurité nationale.

Enfin, ce projet de loi de finances constitue une base saine pour le prochain grand exercice que nous effectuerons ensemble, c'est-à-dire la construction de la loi de programmation militaire. Ce texte sera l’occasion de dessiner la défense de demain, une défense que je veux plus forte, plus innovante, plus européenne. Je sais, mesdames, messieurs les sénateurs, que je pourrai compter sur vous, sur votre bonne volonté et sur votre détermination.

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