Nous n'avons pas d'opposition de principe aux mesures annoncées. Toutefois, nous avons besoin d'éléments supplémentaires permettant d'apprécier l'utilité et la légitimité de ces mesures. Comme la baisse de la limitation de la vitesse sur le réseau secondaire à 80 km/h est une mesure contraignante, nous devons avoir la certitude qu'elle est justifiée parce que des études scientifiques ont prouvé son impact positif. Or, nous avons des raisons d'en douter.
Tout d'abord, on ne nous donne pas les informations permettant d'étayer cette décision. Nous avons ensuite pu observer des éléments curieux dans le dossier de presse, qui mentionne que cette mesure va permettre une baisse d'émissions de polluants atmosphériques « allant jusqu'à 30 % ». Mais ce dossier de presse cite comme source le site Internet d'un particulier, qui n'a pas été mis à jour depuis 2009 ! On peut s'étonner que la délégation à la sécurité routière ne s'appuie pas davantage sur le travail de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe), qui est largement reconnu. Dans son étude, l'Ademe considère en premier lieu qu'il est difficile de quantifier les effets d'une telle mesure, et que la baisse des émissions pourrait atteindre 20 % pour les oxydes d'azote et les particules fines (PM10) et 8 % pour les concentrations de polluants dans l'air ambiant. Nous sommes donc loin des chiffres annoncés dans le dossier de presse.
En outre, à aucun moment le Gouvernement n'a évoqué la qualité des infrastructures routières, qui joue pourtant un rôle fondamental pour la sécurité routière. Notre commission avait donné l'alerte à ce sujet en mars 2017, en soulignant la tendance à la dégradation du réseau routier national observée depuis quelques années. Il est indispensable d'y mettre un terme, pour éviter de reproduire ce qui s'est produit sur le réseau ferroviaire. Il ne faudrait pas non plus qu'une réduction de la limitation de vitesse soit une des solutions trouvées pour compenser le mauvais état de nos routes, comme on l'observe sur le réseau ferroviaire, ou pour réduire la vitesse d'usure de nos routes.
Une dernière remarque enfin, et non des moindres, car elle concerne l'aménagement du territoire, un sujet qui est au coeur des compétences de notre commission. Cette mesure aura un impact sur les territoires ruraux, qui ne sont malheureusement desservis que par la route, et dont les temps de trajet vont être allongés.