Ce projet de loi est examiné après engagement de la procédure accélérée par le Gouvernement le 15 novembre 2017. À l'issue de son examen par les députés, il comporte 29 articles, contre 18 à l'origine, et porte sur des sujets divers comme l'aménagement du territoire, l'urbanisme, l'environnement, le sport, la sécurité et les transports.
Notre commission a reçu une délégation au fond de la commission des lois pour traiter spécifiquement quatre articles relatifs aux transports, de 13 bis A à 13 bis D, qui ont été ajoutés, pour trois d'entre eux, à l'initiative du Gouvernement en séance publique à l'Assemblée nationale. En outre, notre commission s'est saisie pour avis de l'article 6 relatif à l'aménagement des procédures de participation du public.
Les deux articles les plus importants du volet transports concernent la finalisation et la sécurisation du projet CDG Express, liaison prévue pour relier la capitale à l'aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle en 20 minutes à compter de 2023, dont notre commission a déjà eu à connaitre précédemment.
Un article sur le Grand Paris Express permettra de valider des déclarations d'utilité publique nécessaires à la réalisation de certaines lignes, afin d'intégrer une modification de la taille des quais de gare par rapport à ce qui était prévu dans le schéma d'ensemble du Grand Paris. Cette modification intervient dans un contexte politique incertain : alors que le Premier ministre doit annoncer un rephasage du projet, on peut s'inquiéter que, comme le relève la Cour des comptes, « les calendriers de réalisation ne laissent aucune marge pour la survenance d'incidents et donc sont de moins en moins réalistes ».
Le rapport de la Cour des comptes, rendu public la semaine dernière, a permis à chacun de mieux comprendre les enjeux tant financiers que calendaires. En tant que parlementaires, nous avons l'opportunité d'exprimer nos attentes via l'examen de ce texte et d'interroger le ministre en séance. Selon ce rapport, le pilotage des coûts prévisionnels du Grand Paris Express a été insuffisant, conduisant à une augmentation du coût global du futur réseau de transport public de plus de 12 milliards entre mars 2013 et juillet 2017. Désormais, le coût total dépasserait les 38 milliards. La trajectoire financière de la Société du Grand Paris apparaît non maîtrisée voire non soutenable, avec un risque de voir s'installer un « système de dette perpétuelle » qui grèverait significativement les comptes publics : en cause, une forte élévation possible des frais financiers, de 32 à 134 milliards et un recul de l'échéance de remboursement de 2059 à 2084. Cet alourdissement de la charge des prêts du Grand Paris Express pourrait représenter plus d'un point de PIB de dette publique supplémentaire en 2025 et 0,69 point de PIB de dette publique supplémentaire en 2050. Enfin, la Cour pointe une gouvernance inadaptée aux enjeux opérationnels et financiers et l'insuffisance des contrôles des tutelles et du conseil de surveillance sur le directoire de la Société du Grand Paris.
L'abandon des engagements du Grand Paris Express à horizon 2024 serait dommageable, tant sur le plan opérationnel de l'accueil des Jeux Olympiques et Paralympiques, que pour l'image de notre pays, au regard des engagements qu'il a souscrits auprès du Comité international olympique. Le monde attend que la France soit à la hauteur de sa réputation et de ses ambitions en 2024 et ces décisions ne sauraient être prises à la légère.
L'article 13 bis D concerne la question de l'accessibilité universelle des transports de la métropole parisienne et de celle d'Aix-Marseille-Provence.
L'article 6 prévoit une procédure simplifiée de consultation du public préalable à l'autorisation des projets d'infrastructures olympiques.
Les articles 13 bis A et 13 bis B sécurisent les deux volets du montage retenu en 2013 pour la liaison du CDG Express, nouvelle ligne ferroviaire directe de 32 kilomètres entre la gare de l'Est à Paris et le terminal 2 de l'aéroport Paris-Charles-de-Gaulle, spécifiquement adaptée aux besoins des passagers aériens et présentant un haut niveau de service. CDG Express circulera sur 24 kilomètres de voies existantes entre la gare de l'Est et Mitry-Mory et sur 8 kilomètres de voies nouvelles, entre Mitry-Mory et l'aéroport.
Après l'échec d'un projet de concession globale incluant les travaux de la ligne et son exploitation en 2006, le montage retenu par l'accord interministériel de 2013 présente une double dimension : d'un côté, les travaux de réalisation des 8 kilomètres de voies nouvelles et des ouvrages nécessaires à l'infrastructure sont confiés sous la forme d'un contrat de concession, sans mise en concurrence, à une société dédiée, formée par ADP et SNCF Réseau. De l'autre côté, l'exploitation du service de transport de voyageurs de CDG Express - achat de rames, entretien du matériel roulant, relations commerciales... - doit être confiée à un prestataire choisi par l'État, après une procédure de sélection transparente et respectant les principes d'égalité de traitement de la commande publique. Ce montage d'ensemble s'inscrit donc dans un cadre juridique dérogatoire et exceptionnel, au service d'un projet lui-même exceptionnel dans ses caractéristiques et ses objectifs.
L'article 13 bis A renforce la sécurité juridique autour du contrat de concession de travaux. Son deuxième alinéa précise que les redevances que l'exploitant du service de transport devra payer au concessionnaire des travaux pour l'utilisation des 8 kilomètres de voies nouvelles dérogent au droit commun des concessions. Dans un contrat de concession classique, conformément à l'article 32 de l'ordonnance du 29 janvier 2016, les tarifs à la charge des usagers sont précisés. Or, dans la concession de travaux CDG Express, le concessionnaire des travaux sera en relation avec un usager unique - l'exploitant du service de transport. Cet article n'a donc pas vocation à s'appliquer.
En outre, le mode de rémunération du concessionnaire des travaux est d'ores et déjà fixé dans ses principes. Les 24 kilomètres de voies existantes empruntées par CDG Express feront l'objet d'une tarification de droit commun, versée à SNCF Réseau par l'exploitant sous réserve d'une répartition spécifique avec le concessionnaire des travaux, tandis que le nouveau tronçon de 8 kilomètres se verra appliquer une tarification spécifique.
Le troisième alinéa de cet article tire les conséquences de cette tarification spécifique appliquée au nouveau tronçon. Depuis 2009, l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (Arafer) émet des avis conformes sur la fixation des redevances d'infrastructure liées à l'utilisation du réseau ferré national. Elle vérifie le respect de certains critères de soutenabilité, de cohérence par rapport au coût global de l'infrastructure et de situation concurrentielle sur le marché.
Le troisième alinéa de l'article 13 bis A prévoit de déroger à la compétence de l'Arafer pour la fixation du péage payé par l'exploitant au concessionnaire des travaux. Cette solution, qui garantit la sécurité juridique du montage financier retenu, peut se justifier par trois raisons : en premier lieu, dans le cas où l'Arafer devrait se prononcer sur cette tarification, elle ne pourrait pas rendre d'avis conforme car la tarification ne permet pas de couvrir les coûts d'infrastructure supportée par le concessionnaire. C'est pourquoi une taxe sur les billets d'avion a été introduite en loi de finances rectificative pour 2016, afin de compléter les ressources du concessionnaire des travaux. En second lieu, ce péage n'est pas conforme aux principes de soutenabilité puisqu'il est calculé par rapport aux recettes globales de l'exploitant et vise à capter une part importante de l'excédent résultant de l'exploitation du service de transport de personnes. Enfin, compte tenu du caractère exceptionnel et urbain du projet CDG Express, la dérogation aux principes généraux des redevances et au contrôle de l'Arafer est possible et même prévue par les textes européens.
L'article 13 bis B consolide le cadre juridique applicable au second contrat nécessaire à la mise en service de la liaison CDG Express. Il rend applicable au contrat d'exploitation, qui doit être conclu prochainement entre l'État et un prestataire sélectionné après procédure de mise en concurrence, deux dispositions de l'ordonnance du 29 janvier 2016. Cette ordonnance ne saurait s'appliquer d'office puisque le contrat d'exploitation n'a pas la caractéristique première d'une concession, à savoir le partage de risques entre concédant et exploitant, au regard des charges supportées par l'exploitant et des recettes envisagées.
En conséquence et pour sécuriser la vie de ce contrat, l'article 13 bis B rend explicitement applicables les articles 55 et 56 de l'ordonnance de 2016 relatifs aux modifications par avenant du contrat et aux modalités d'indemnisation du cocontractant en cas de résiliation, résolution ou d'annulation du contrat par le juge. Cette disposition renforce ainsi la sécurité juridique du contrat de service dont bénéficiera l'exploitant.
L'article 13 bis C valide une modification de la longueur des quais prévue pour certaines lignes du Grand Paris Express, ce qui sécurisera les déclarations d'utilité publique relatives à ces lignes, en particulier la ligne 17. Il modifie l'article 57 de la loi du 28 février 2017 relative au statut de Paris. La Société du Grand Paris réalisera ainsi des économies, à condition qu'elles ne soient pas intégralement englouties par les moyens supplémentaires mobilisées, notamment les tunneliers, pour tenir le délai de 2024 pour la ligne 17.
L'article 13 bis D conclut le volet transports du projet de loi Jeux Olympiques et Paralympiques sur l'accessibilité universelle. Introduit à l'initiative de la rapporteure Aude Amadou au nom de la commission de la commission des affaires culturelles et de l'éducation, il vise à inciter les autorités organisatrices de transports de la métropole du Grand Paris et de la métropole d'Aix-Marseille-Provence à améliorer l'accessibilité universelle des transports nécessaires aux sites olympiques, via la remise d'un rapport dans un délai de dix-huit mois à compter de la promulgation de la présente loi.
Je ne vous proposerai pas de modification sur le volet transports : ces dispositions, avant tout techniques, n'ont pas de conséquences de fond sur le projet CDG Express ni sur le Grand Paris Express.
Notre commission s'est saisie pour avis de l'article 6, qui porte sur les modalités de participation du public préalablement à l'autorisation des projets d'infrastructures. Afin de simplifier les démarches et de réduire les délais, l'article prévoit de substituer à l'enquête publique une procédure de consultation du public par voie électronique. Cette procédure, normalement prévue pour des projets de moindre ampleur, permet au public de transmettre ses observations sur une plateforme électronique, sur la base d'un dossier préparé par le maître d'ouvrage présentant les caractéristiques techniques du projet. Il s'agit d'une procédure allégée par rapport à l'enquête publique. Outre quelques modifications de forme, il n'y a pas de commissaire enquêteur. Dans le cadre d'une enquête publique, le commissaire enquêteur réunit les observations du public. À la fin de la consultation, il se prononce sur l'opportunité du projet par un avis motivé. En cas d'avis réservé ou défavorable, l'autorité administrative peut tenir une réunion publique pour que le maître d'ouvrage réponde aux remarques formulées. Surtout, si le projet est autorisé malgré un tel avis, un référé peut être déposé devant le juge administratif afin de suspendre cette décision, dans l'attente que sa légalité soit appréciée par le juge. Ces procédures rallongent d'autant le délai d'autorisation du projet.
Afin de s'assurer que la consultation du public par voie électronique se déroule en toute indépendance, l'article 6 prévoit que la synthèse des observations et propositions du public est réalisée par un ou plusieurs garants nommés par la Commission nationale du débat public, et non par l'autorité administrative compétente comme le prévoit le code de l'environnement. Il prévoit également que cette procédure allégée ne s'appliquer pas aux enquêtes préalables réalisées dans le cadre d'une déclaration d'utilité publique, c'est-à-dire lorsqu'un projet d'infrastructure requiert une procédure d'expropriation.
Pour réaliser à temps les infrastructures indispensables à la tenue des Jeux Olympiques et Paralympiques, il ne me paraît pas déraisonnable de prévoir des modalités simplifiées de consultation du public. Néanmoins, dans sa rédaction actuelle, l'article prévoit que la réponse du maître d'ouvrage aux observations du public est facultative. Compte tenu de l'importance des projets, je vous proposerai un amendement pour rendre cette réponse obligatoire, sans pour autant modifier les délais prévus par le texte. Cela éviterait que les observations du public ne fassent l'objet d'aucun retour par le porteur de projet, ce qui amoindrirait la portée de la consultation.
Ce texte doit permettre de prendre la mesure des engagements souscrits par la France pour l'organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques. Il est nécessaire d'avancer rapidement sur ces sujets car 2024, c'est demain.