Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, c’est un rapport lucide que Mme la rapporteur nous a présenté aujourd’hui, un rapport généreux aussi en ce qu’il encourage le don de jours de congé à un proche aidant par d’autres salariés. Cette pratique est née avant que la loi ne la prévoie. Ainsi, dans la branche de la plasturgie, un accord la permettant à compter du 1er janvier 2018 a été signé entre les syndicats et les organisations professionnelles. Demain, après l’adoption de cette proposition de loi, elle sera étendue à toutes les branches.
C’est un rapport lucide, madame la rapporteur, car vous soulignez les limites de cette proposition de loi au regard de l’ampleur des besoins en matière de soutien aux aidants.
Le nombre de ces derniers est estimé entre 8, 3 millions et 11 millions : ce flou dans les chiffres tient au fait que l’on devient souvent aidant progressivement, en ce qui concerne l’accompagnement des personnes âgées, et non du jour au lendemain.
En outre, beaucoup d’aidants ne se reconnaissent pas comme tels, estimant ne faire que leur devoir. L’une des grandes avancées permises par la loi relative à l’adaptation de la société au vieillissement a été l’établissement d’un statut des aidants, dont le premier bénéfice, sur le plan psychologique, a été d’amener les aidants à s’identifier et à se reconnaître comme tels, et de fait à prendre soin d’eux-mêmes.
Monsieur Watrin, vous évoquiez voilà un instant l’accès aux soins pour les aidants. À mon sens, le problème tient moins à l’aspect financier qu’à un manque de prise en compte de soi-même. Je demande souvent aux médecins s’ils ont le réflexe de s’enquérir aussi de la santé des aidants des personnes âgées en perte d’autonomie qu’ils rencontrent.
Il importe en effet de prendre en compte la fatigue spécifique des aidants, dont 54 % sont des femmes. Ce taux croît d’ailleurs avec la gravité de l’état de la personne aidée, les trois quarts des aidants des personnes en grande perte d’autonomie étant des femmes. Cela fait partie du travail invisible et non rémunéré des femmes, qui commence à la naissance des enfants pour s’achever au décès des parents ou des grands-parents, un travail ô combien précieux pour nos finances publiques et sociales…
La reconnaissance des aidants a progressé, mais nous avons besoin de savoir pourquoi les conseils départementaux ne font pas mieux connaître le droit au répit aujourd’hui ouvert aux aidants.
Vous nous aviez donné comme consigne, madame la rapporteur, de ne pas déposer d’amendements, afin que le texte puisse être adopté dans les mêmes termes par l’Assemblée nationale et le Sénat. Nous nous y sommes conformés. Pour autant, il conviendrait de prendre certaines mesures. En particulier, il faudrait instaurer un droit au congé pour les aidants de parents âgés et dépendants, à l’instar du droit au congé pour les parents d’enfant malade.
Les aidants ont certes besoin de périodes de répit, mais ils ont aussi besoin de demi-journées ou de journées de congé, par exemple pour effectuer des démarches administratives souvent très lourdes et accaparantes.
Je vous propose donc, madame la secrétaire d’État, de réfléchir à la création d’un droit au congé pour les aidants de personnes âgées en perte d’autonomie.