Intervention de Nassimah Dindar

Réunion du 31 janvier 2018 à 14h30
Don de jours de repos pour les proches aidants — Adoption définitive d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Nassimah DindarNassimah Dindar :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, madame la rapporteur, mes chers collègues, en présentant ce texte, Paul Christophe, député, du groupe UDI, Agir et Indépendants, a pris une belle initiative. Qu’il en soit remercié.

Au travers de cette proposition de loi relative au don de jours de repos non pris au bénéfice des proches aidants, il s’agit de faire face à des situations de crise conjoncturelles pour les aidants, dont l’implication psychologique est déjà très forte tout au long de l’année. Il s’agit aussi, on l’a rappelé, de donner du répit aux aidants en actionnant le levier de la solidarité citoyenne.

« Aidant naturel » : une bien belle expression, qui recouvre souvent une réalité de souffrance. Je parle ici de la réalité humaine, non pas des réalités administratives ou juridiques, avec les aidants familiaux relevant des caisses d’allocations familiales, des maisons départementales des personnes handicapées ou de dispositifs tels que la prestation de compensation du handicap, la PCH, ou l’allocation personnalisée d’autonomie, l’APA.

On parle aussi souvent d’aidant informel, c’est-à-dire non professionnel, venant en aide à titre principal, pour partie ou totalement, à une personne dépendante de son entourage pour les activités de la vie.

En effet, parler d’aidants, c’est bien parler de la vie de tous les jours : une fin de vie, une maladie, un cas d’Alzheimer identifié, une tumeur suspectée, la naissance d’un enfant différent, et nous devenons tous des aidants naturels. Aussi l’examen du présent texte requiert-il, de notre part, pragmatisme et humanité.

Chers collègues, l’humanité, je l’ai perçue dans tous les discours que vous avez prononcés. Aujourd’hui, comme nous l’a demandé notre rapporteur, Mme Guidez, nous devons également faire preuve de pragmatisme. Nous devons nous inspirer du travail qu’elle a accompli, dont les précédents orateurs ont souligné la qualité.

Ma chère collègue, votre rapport est remarquable à un double titre.

Tout d’abord, vous avez su présenter la diversité des situations que recouvre la problématique des proches aidants. Il est essentiel de se fonder sur ce constat si l’on veut apporter des solutions adaptées.

Ensuite, vous avez fait preuve d’un certain courage en préconisant l’adoption conforme de cette proposition de loi, afin d’en assurer la promulgation rapide.

Je parle de courage et de responsabilité, car il y aurait tant à faire ! Mes collègues ont déjà donné quelques pistes.

Vous avez raison d’appeler à une réflexion d’ensemble sur la question des proches aidants, qui ne fait l’objet que de mesures parcellaires disséminées dans plusieurs textes de loi.

La première véritable prise en charge de la problématique des proches aidants, via la création du congé d’accompagnement d’une personne en fin de vie, date de 1999. Ce dispositif est devenu quelques années plus tard le congé de solidarité familiale, modifié ensuite par la loi ASV ou par la loi El Khomri.

D’autres mesures existent également, comme le droit au répit prévu pour les personnes aidant des personnes âgées bénéficiant de l’APA. Toutefois, le droit au répit n’est pas mis en application de façon uniforme sur l’ensemble du territoire, que ce soit par les conseils départementaux ou par les services de l’État. À La Réunion, nous avons mis en place des bourses d’heures. À cette fin, nous avons créé un groupement d’intérêt public, un GIP, associant l’État et le conseil départemental. Ce dispositif permet de proposer aux familles des week-ends de répit. Madame la secrétaire d’État, je vous invite à venir vous rendre compte sur place de son fonctionnement.

En la matière, il existe également des accords d’entreprise. Quelle est la plus-value du texte que nous examinons aujourd’hui ? Il complète la loi du 9 mai 2014 permettant le don de jours de repos à un parent d’enfant gravement malade. Le cadre juridique est strictement repris et élargi aux personnes prenant en charge une personne atteinte d’une perte d’autonomie d’une particulière gravité ou présentant un handicap.

Oui, cette proposition de loi apporte bien une plus-value, même si nous reconnaissons tous ses limites. Ces dernières ont été bien explicitées par notre rapporteur, qui souligne la diversité des situations auxquelles les aidants familiaux doivent faire face.

Dans le même esprit, je tiens à insister sur le fait que cette mesure de solidarité citoyenne ne doit pas se substituer au nécessaire accompagnement de la solidarité nationale. À cet égard, madame la secrétaire d’État, nous vous avons entendu exprimer l’engagement et la volonté du Gouvernement dans votre propos liminaire.

En effet, si le dispositif proposé peut permettre, dans des situations exceptionnelles, à des élans de générosité de s’exprimer librement, il n’assure pas la reconnaissance du statut juridique du proche aidant. Il n’apporte pas de garanties suffisantes en termes de droits ou de couverture des dépenses de santé de ces publics déjà fragiles.

Les membres du groupe Union Centriste pensent qu’il est nécessaire de travailler à une approche plus globale. Les proches aidants ont besoin de moyens, de temps, de compensations et de reconnaissance.

En ce qui concerne les moyens, on pourrait envisager de mettre en place une allocation dédiée, à l’image de ce qui se pratique déjà dans le cadre de l’APA. À ce titre, l’amendement proposé par nos collègues du groupe CRCE tend à ouvrir des pistes de réflexion. La mise en œuvre de ce dispositif, qui n’est pas encore garantie aujourd’hui, pourrait se concevoir sur la base de l’article 1er bis de cette proposition de loi. Dans cette perspective, j’appelle à mon tour nos collègues à une adoption unanime de cette proposition de loi dans le texte de la commission.

L’attribution de moyens aux aidants pourrait également prendre la forme d’une formation spécifique, afin qu’ils puissent mieux assumer leur rôle et faire face à la maladie, au handicap et à la dépendance.

De nombreux aidants renoncent à leur carrière, provisoirement ou définitivement. Notre système de retraites doit en tenir compte pour le calcul de leurs pensions. Pourquoi ne pas envisager, par exemple, une répartition de trimestres supplémentaires entre les conjoints ou, plus largement, les membres de la famille de la personne handicapée ou très dépendante ? Les pistes sont nombreuses.

Je terminerai en évoquant l’offre d’accueil temporaire dans les établissements, qui n’est pas encore suffisamment large. Les représentants des MDPH nous le disent, son développement s’impose sur tout le territoire. Saisissons-nous de cette problématique, car des milliers de personnes se sentent aujourd’hui bien démunies. Pour l’heure, chers collègues, votons cette proposition de loi conforme !

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