Intervention de Bruno Retailleau

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 7 février 2018 à 9h00
Proposition de loi visant à simplifier et mieux encadrer le régime d'ouverture des établissements privés hors contrat — Examen du rapport et du texte de la commission

Photo de Bruno RetailleauBruno Retailleau :

Les établissements scolaires se partagent, en France, en trois ordres : l'école publique, l'école privée sous contrat et l'école privée hors contrat. Les deux premières ont réussi la massification de l'éducation, au prix, logique, de l'abandon de la prise en charge de besoins très spécifiques à certains élèves. Les écoles hors contrat interviennent dans ce cadre et leur action, complémentaire, m'apparaît nécessaire à bien des endroits. Je pense notamment aux établissements Espérance banlieue dans nos quartiers défavorisés. L'enjeu est donc de préserver leur liberté et de lutter contre les dérives sectaires.

La liberté de l'enseignement est une liberté constitutionnelle, indissociable de la liberté, elle-même constitutionnelle, d'association. Il convient, en conséquence, de proportionner les mesures d'encadrement prévues par la proposition de loi pour ménager un équilibre entre l'impératif d'ordre public et la préservation de ces libertés. Les amendements que nous nous présenterons n'ont pas d'autre objectif. Fidèles à notre position lors du débat sur l'article 39 de la loi relative à l'égalité et à la citoyenneté, nous demeurons très défavorables au régime d'autorisation, qui nous semble par trop peser sur la liberté de l'enseignement. Nous ne nous sentons pas liés par la rédaction de compromis proposée par Mme Gatel et adoptée par le Sénat à l'époque : il s'agissait de contourner agilement la proposition du gouvernement d'alors, non de fonder solidement une doctrine sénatoriale sur le sujet. Nous savions, du reste, que l'Assemblée nationale rétablirait sa rédaction initiale, censurée finalement par le juge constitutionnel. Le Conseil constitutionnel ne s'est pas contenté d'une censure formelle : il a estimé que le législateur ne pouvait se délester de sa compétence s'agissant d'une liberté fondamentale. Prenons garde à une nouvelle censure en confiant à un décret en Conseil d'État le soin de préciser des dispositions qui relèvent du législateur. Nous présenterons un amendement sur ce point. Soyons également attentifs au message que nous envoyons quand, pour la première fois depuis la signature des accords Lang-Cloupet en 1992, la loi de finances a acté un gel budgétaire des postes d'enseignants dans les écoles privées sous contrat.

Je partage, madame la rapporteure, votre position s'agissant des contrôles a posteriori dans les établissements : il faut évidemment les réaliser au cours de la première année suivant l'ouverture. Je suis également favorable à votre proposition s'agissant de l'allongement des délais et de l'harmonisation des régimes de déclaration. Votre texte répond-il pour autant efficacement aux enjeux de la radicalisation ? Quid des madrassa, des écoles non déclarées ? Nous le soutiendrons néanmoins, si une suite favorable était donnée à nos amendements, visant à conserver au législateur sa compétence relative à une liberté fondamentale. Ne privons pas le Gouvernement d'une réforme qu'il appelle de ses voeux sans avoir eu le courage de la présenter en son nom !

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