Pour nuancer les propos de Laurence Rossignol, je dirais qu'en règle générale, la famille est aussi un socle protecteur. Il y a des choses à faire pour aider les parents, dans certains cas. Il y a sept ans, j'avais proposé la création au Sénat d'une délégation aux droits des enfants, mais ma proposition n'avait pas été retenue. Je pense que c'est aujourd'hui devenu une exigence.
Docteur Emmanuelle Piet. - Sur l'intérêt de la protection des enfants, je me suis occupée de ce sujet pendant toute ma carrière, en PMI. En France, une femme sur dix est victime de son compagnon. Le chiffre est multiplié par trois lorsqu'elle a été battue dans l'enfance, et par cinq lorsqu'elle a été agressée. Il serait donc intéressant de soigner les enfants victimes, pour leur éviter d'être à nouveau victimes à l'âge adulte, et de passer éventuellement dans le camp des agresseurs. D'une façon plus générale, la prévention de toute violence passe par la protection des enfants.
En tout état de cause, il faut faire la différence entre l'erreur éducative et la maltraitance grave. La mode actuelle du placement à domicile est une erreur totale. 90 % des violeurs de femmes et d'enfants sont des proches, et beaucoup plus rarement des inconnus. Pour moi, c'est la priorité : si on veut arrêter la violence, il faut prévoir des moyens pour garantir une vraie prise en charge de ces enfants, notamment psychologique.
En matière de preuve, il faut dire qu'il y en a rarement dans les viols. C'est souvent l'accumulation qui fait la preuve. Un gynécologue a pu violer des femmes pendant trente ans, et seuls les derniers témoignages ont permis de l'établir.
Enfin, je regrette de ne pas avoir eu le temps de m'exprimer sur les mutilations génitales féminines, mais je reste à votre disposition pour évoquer ce sujet.