Intervention de Jean-Yves Mano

Commission des affaires sociales — Réunion du 21 février 2018 à 9h05
Table ronde rassemblant des représentants de consommateurs

Photo de Jean-Yves ManoJean-Yves Mano, président de l'Association Consommation, logement et cadre de vie (CLCV) :

Merci de nous recevoir. Les événements que nous vivons depuis deux mois conduisent à une rupture de confiance du consommateur dans la qualité alimentaire. Les derniers éléments en notre possession ne font qu'aggraver ce sentiment.

Nous nous sommes focalisés sur la production de lait infantile, mais cette usine fabriquait-elle d'autres produits ? À ma connaissance, tel est le cas : l'usine fabrique également de la poudre de lait. Or, personne ne s'est interrogé sur la traçabilité de ces produits distribués au secteur industriel et de leurs conséquences potentielles.

Il y a deux jours, un laboratoire nantais a constaté la présence de substances allergènes dans des produits fabriqués par Lactalis. Or, on nous dit que les tests devraient être répétés jusqu'à une dizaine de fois pour que les résultats soient confirmés. Il existe donc des pressions internes pour que le laboratoire qui dépend financièrement du donneur d'ordre ne puisse publier librement le résultat de ses contrôles. Ces révélations mettent en doute la véracité de tous les autocontrôles effectués par les laboratoires sur ordre de Lactalis. Je comprends mieux la réaction de M. Besnier qui rappelle qu'il a fait effectuer 17 000 tests. Mais les laboratoires ne sont-ils pas incités à présenter des tests le plus proche possible des normes en vigueur ? Ce n'est pas rassurant.

Nous nous réjouissions de disposer d'un système de contrôle de la qualité alimentaire performant. Mais nous constatons une certaine confusion entre les interventions des services vétérinaires, du ministère de l'agriculture et de la DGCCRF. S'est-on interrogé sur les rythmes des contrôles ? Compte tenu de ses effectifs, les contrôles de la DGCCRF sur des entreprises comparables à Lactalis sont effectués tous les trois ans. La direction générale préfère cibler ses interventions sur des entreprises de plus petite taille, jugées plus faillibles. En outre, il s'agit de contrôles le plus souvent sur documents. Ne faut-il pas repenser les tests des administrations ?

Les autocontrôles sont sans aucun doute indispensables, mais on ne peut s'en contenter. Une autorité, financièrement indépendante du donneur d'ordre, doit réaliser des contrôles. Le cas du laboratoire nantais illustre mon propos.

L'affaire du lait contaminé révèle des défaillances en chaîne, à commencer par Lactalis, mais aussi de la grande distribution, des pharmaciens, des crèches, des hôpitaux. Alors qu'il s'agissait d'un problème de santé publique, des produits dont le retrait avait été publié, ont continué à être distribués. Heureusement, Bruno Le Maire a imposé par arrêté la fermeture de l'usine et le retrait total des boites de lait. Un nouveau protocole est indispensable.

Lorsque nous avons rencontré Bruno Le Maire, début janvier, nous avons suggéré qu'un site unique centralise la totalité des retraits alimentaires, alors qu'aujourd'hui, tel n'est pas le cas, d'où une confusion et une dilution de l'information des consommateurs. De plus, un numéro vert doit être à disposition des consommateurs lanceurs d'alerte. Si un consommateur découvre un produit retiré en magasin, il n'a aujourd'hui d'autre choix que de prévenir la presse locale. Un numéro vert sous la responsabilité de l'administration serait le bienvenu.

Les cartes de fidélité seraient un bon moyen de prévenir les acheteurs potentiels. Dans une enquête de la CLCV sur la politique des retraits, 77 % des consommateurs se plaignaient d'un manque d'information et souhaitaient qu'elle transite par les cartes de fidélité.

M. Bruno Le Maire nous a déclaré que des décisions seraient rapidement prises. Nous y sommes : nos concitoyens attendent des actes, et non pas que cette affaire de santé publique soit enterrée.

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